De l’astronomie à l’entrepreneuriat: l’Univers
Vous avez craqué pendant les élections présidentielles françaises avec ses multiples rebondissements. Vous n’en pouvez plus si vous suivez les faits et gestes de Donald J. Trump. Vous en avez ras la casquette de la transformation digitale de charlatans qui ne fait plus rêver. Vous en avez marre d’entendre à tout bout de champs que votre métier va disparaître et être remplacé par une intelligence artificielle développée par un jeune de 19 ans sorti de l’école 42? Mes amis, je vais alléger vos souffrances et vous aérer les neurones en vous permettant de vous évader un peu, tout en restant les pieds sur terre.
Ces lignes vont reprendre et compléter le verbatim de la conférence «De l’astronomie à l’entrepreneuriat» que j’ai eu l’immense plaisir de délivrer dans la faille spatio-temporelle du Web2day, le 8 juin 2017 à Nantes. Elle durait une heure, le plus long format de cet événement. J’ai déjà publié les photos et mon support de présentation. La vidéo produite par le Web2day devrait suivre de peu.
Comme beaucoup de curieux sur les sciences et technologies, je m’intéresse à l’infiniment petit tout comme à l’infiniment grand. J’ai déjà eu l’occasion de traiter l’infiniment petit en m’intéressant à la fabrication des semi-conducteurs et au séquençage de l’ADN et à ses applications. L’astronomie et la conquête spatiale incarnent l’esprit de questionnement, de découverte et d’aventure de l’espèce humaine. Elles sont l’aboutissement ultime de l’entrepreneuriat humain et répondent à ce besoin de repousser nos limites pour comprendre les nombreux mystères de l’Univers et le conquérir à la mesure de nos moyens. Cette quête sert aussi à tenter de répondre à de nombreuses questions existentielles: d’où venons-nous, sommes-nous seuls dans l’univers, l’univers est-il fini ou infini, existe-t-il une planète B pour éventuellement contredire Emmanuel Macron?
J’ai compulsé des centaines de sources d’informations publiques pour préparer cette conférence du Web2day. La recherche en astronomie a ceci de particulier qu’elle est principalement financée par les derniers publics partout dans le monde et qu’elle donne lieu à une forte coopération internationale. Elle génère mécaniquement une grosse masse de données ouvertes, autant sur les observations de l’espace que sur les moyens de les mener, sans compter les photos! C’est grâce à cela que j’ai pu creuser de nombreuses technologies du secteur. Il est bien plus aisé de décortiquer le fonctionnement d’un télescope que d’une start-up utilisant de l’intelligence artificielle!
Dans cette série d’articles en plusieurs parties –comme d’habitude–, je vais dans l’ordre:
- Faire le point et à grosses mailles sur ce que l’on sait de l’univers, et surtout vous faire appréhender l’immensité du sujet. C’est ici-même. C’est de l’ordre de la culture générale et ne vous apprendra pas grand chose si vous vous intéressez déjà à l’astronomie.
- Décrire les technologies mises en œuvre dans les moyens d’observation terrestres de l’univers, à savoir, les télescopes et les radio-télescopes. Ces derniers étaient un peu mystérieux pour moi, surtout pour ce qui est des techniques de reconstitution d’images alors qu’ils n’ont pas de capteurs photo.
- Passer aux télescopes spatiaux qui permettent d’aller encore plus loin en distance et dans le passé de l’univers avec une focalisation particulière sur un véritable bijou technologique: le James Webb Space Telescope qui sera lancé en 2018. Et au passage, évoquer la notion de gestion du risque dans ce genre de projet à près de $10B.
- Puis traiter de la découverte des exoplanètes et des instruments qui y sont dédiés, tout en évoquant les équations de Drake, Seager puis le paradoxe de Fermi qui évaluent d’un côté les chances de trouver des vies extraterrestres dans la Voie Lactée et, de l’autre, qui expliquent que l’on n’en ai pour l’instant toujours pas encore croisé. Même dans l’Area 51!
- Enfin, terminer avec les entrepreneurs privés de la conquête spatiale, et pas seulement Elon Musk. Nous verrons que l’espace est devenu une branche à part entière de l’entrepreneuriat technologique, avec quelques particularités et des métaphores intéressantes sur l’entrepreneuriat «terrestre» qui reviendront sur les articles précédents. A ceci près que ces entrepreneurs se contentent d’essayer d’aller en orbite basse, de conquérir Mars voir d’atteindre Proxima du Centaure. Il n’est pas encore question d’aller plus loin. Et il y a même des margoulins de l’espace!
Finalement, je vous propose donc une longue thèse hors-sujet en quatre parties, puis une antithèse et une synthèse dans la dernière partie qui nous rapprochent du sujet. Le voyage et le jeu en valent la chandelle! Le principe de ces interventions et articles est toujours de vulgariser un domaine scientifique qui comprend une part de mystères technologiques.
Vous pourriez obtenir le même type d’informations en parcourant régulièrement la presse scientifique (Science et Avenir, Science & Vie, La Recherche, Pour la Science, …) mais, généralement, en pièces détachées et pas avec le même regard technologique. Venant du numérique, on peut ainsi se poser des questions pratiques peu évoquées dans ces supports. Par exemple, à quoi ressemblent les capteurs photo des télescopes spatiaux, quels volumes de données sont générés par ces télescopes, comment sont-ils transmis sur terre et comment y sont-ils traités? Et enfin, quelles en sont les éventuelles retombées industrielles qui affectent notre vie dans ce bas monde terrestre?
L’astronomie commence avec les astronomes!
Comme tous les domaines, l’astronomie est avant tout une aventure humaine. On compte environ 10000 astronomes et astrophysiciens professionnels dans le monde, les 2/3 aux USA et quelques centaines en France, qui sont répartis dans différentes villes et institutions tels que le CNRS ou le CEA. Il faut y ajouter les ingénieurs des entreprises du spatial, à commencer par ceux d’Arianespace, d’Airbus, de Thalès et de nombreux sous-traitants spécialisés dans des technologies de pointe. Il s’agit, même de manière extensible, d’une profession assez rare. Mais on compte un bien plus grand nombre d’astronomes amateurs qui, armés de leur modeste télescope, scrutent le ciel ou bien analysent les données publiques issues des grands télescopes. Ils contribuent au développement du savoir. Il détectent par exemple fréquemment des astéroïdes. Ils sont l’équivalent des contributeurs individuels à des projets open source dans le logiciel.
Depuis l’antiquité, les astronomes essayent de comprendre l’univers. Cela requiert une approche scientifique: de l’intuition, des mathématiques, de la géométrie, de la physique et de l’observation permettant de vérifier des théories élaborées sur le fonctionnement de l’univers. J’admire ainsi les astronomes d’avant la Renaissance qui observaient patiemment les étoiles et savaient distinguer les planètes du système solaire des étoiles de la Voie Lactée. Il a fallut quasiment deux millénaires pour que l’héliocentrisme soit accepté par l’ensemble des scientifiques, sans compter le bien récalcitrant Vatican. Bien plus tard, en 2015, le LIGO a permis de vérifier la théorie d’Einstein sur les ondes gravitationnelles un siècle après son élaboration.
Passons sur les Ptolémée, Galilée, Newton et autres Copernic. Après avoir parcouru quelques histoires de l’astronomie au travers des âges, quelques personnages peu connus m’ont particulièrement intrigué:
- Ole Roemer, un Danois, qui su déterminer la vitesse de la lumière au 17eme siècle en observant les éclipses de la lune Io de Jupiter. Il a obtenu un résultat valable à 26% près (190 000 km/s vs 300 000 km/s) ce qui est une performance. Surtout dans la mesure où il ne devait disposer que d’une simple lunette de Galilée et du calcul à la main pour y parvenir. Chapeau bas!
- Albert Michelson, un Américain qui détermina cette vitesse avec précision en 1887, soit avec moins de 0,1% d’erreur par rapport aux mesures modernes. Il était alors sous-officier de la Navy. Il obtint le Prix Nobel de physique en 1907. La méthode s’appuyait sur un système de miroirs rotatifs et d’interférométrie.
- Georges Lemaitre, un prêtre Belge formé à Harvard et Cambridge, puis travaillant au MIT, qui théorisa le big bang en 1927. Une théorie qui fut validée progressivement les décennies suivantes, et nommée «big bang» en 1949. En 1929, Edwin Hubble identifia le «red shift», le décalage vers le rouge de la lumière émise par les galaxies distantes, expliquant leur éloignement et l’expansion de l’Univers.
Plus récemment, des femmes brillantes sont venues apporter leur contribution à une histoire trop souvent bâtie uniquement par des hommes:
- Vera Rubin: une américaine qui travaillait sur la rotation des galaxies et en a inféré l’existence de la matière noire en 1976, seul moyen d’expliquer leur cohésion. Elle est décédée en décembre 2016.
- Amy Mainzer: une autre Américaine qui a contribué à la création du télescope spatial Spitzer qui explore l’univers dans l’infrarouge. Lancé en 2003, c’est l’un des premiers à avoir détecté des exoplanètes.
- Sara Seager: également Américaine, qui a créé en 2013 une nouvelle équation de Drake pour prédire le nombre de planètes dotées de la vie dans la Voie Lactée.
On pourrait aussi y ajouter Ralph Alpher et Robert Herman qui, en 1948, prédisent les scénarios du big bang avec la température résiduelle de l’univers lorsqu’il est devenu transparent après le big bang (-240°C) ainsi que le fond diffus cosmologique (160 GHz). Après son expansion, la température de l’Univers devait descendre à -270°C. Ces théories sont vérifiées fortuitement en 1964 par Arno Allan Penzias et Robert Woodrow Wilson. Ils ont pour cela obtenu le Prix Nobel de Physique en 1978. Les astrophysiciens ont ceci de particulier qu’ils ont une forte capacité à conceptualiser le fonctionnement de la matière à très bas niveau, la physique des particules mise en œuvre dans la création des atomes, puis à bâtir des théories générales, et à les vérifier ensuite. Ce sont ces théories appliquées au big bang qui permettent par exemple d’expliquer le ratio entre hydrogène et hélium dans les étoiles et galaxies.
Ce que l’on sait des dimensions de l’univers
Avant de décrire en détail les technologies qui permettent de l’observer, je vous propose un petit tour de l’Univers observable en partant du système solaire. Nous allons naviguer du plus petit au plus grand, ce qui nous rappellera que nous ne sommes pas grand-chose. C’est un bel exercice d’humilité. Le schéma ci-dessous est une version documentée d’un schéma issu de Wikipedia.
J’utilise l’année lumière comme unité de référence. Une année lumière fait 9 461 milliards de kilomètres. Le système solaire fait juste deux dizaines d’heures-lumière de diamètre. La Terre n’est qu’à 150 millions de km du soleil, qui ne fait que 1,4 million de km de diamètre, soit quatre fois la distance entre la terre et la Lune. Le système solaire ne fait que 3% d’une année lumière de diamètre jusqu’à Pluton. Si l’on y intègre le nuage de Oort qui entoure le système solaire, bien au-delà de l’héliosphère, et qui contient des comètes en formation, le diamètre complet du système solaire dépasse l’année lumière.
Ensuite, dans la proche banlieue stellaire du soleil, on ne trouve que 54 étoiles distantes de moins de 14 AL. Ce n’est pas énorme compte tenu des distances. L’étoile la plus proche est Alpha du Centaure, à 4,37 AL. A la vitesse des sondes spatiales actuelles, il faudrait 80 000 années pour s’en approcher. On a déjà trouvé quelques exoplanètes dans cette proche banlieue mais pas encore de vie.
Lorsque l’on s’éloigne encore plus, on trouve évidemment d’autres étoiles mais aussi de nombreuses nébuleuses, de gigantesques nuages de poussières ainsi que des restes d’étoiles ayant explosé, les supernovas. L’un des plus beaux de ces nuages qu’il soit possible d’observer, notamment avec le télescope spatial Hubble s’appelle les «Piliers de la création». Ils sont situés à 500 AL du soleil et font 4 AL de hauteur. Cette belle image est une composite d’images de sources différentes et dans différentes longueurs d’ondes visibles et non visibles, que nous décortiquerons plus tard dans cette série d’articles.
Si l’on s’éloigne encore un peu, à 3900 AL, on trombe sur l’étoile géante Canis Majoris qui est l’une des plus grosses de la Voie Lactée. C’est une super géante rouge dont le diamètre est d’environ 600 fois celui du soleil, soient 2 milliards de km (vs 1,4 million de km). La périphérie de cette étoile correspond à l’orbite de Saturne. Mais sa densité est très faible, de 5 to 10 mg/m3, soit bien plus faible que celle de l’atmosphère terrestre en haute altitude. Cette étoile ressemble à ce que deviendra notre soleil lorsqu’il s’éteindra d’ici quelques milliards d’années. Période où la Terre y aura été engloutie sachant que la vie y aura disparu bien avant avec le réchauffement planétaire qui sera provoqué non pas par l’Homme mais par l’expansion du Soleil.
On trouve bien d’autres monstres dans la Voie Lactée : au moins un gros trou noir en son centre ainsi que des pulsars qui sont des étoiles à neutrons tournant rapidement sur elles-mêmes une fois par seconde voire moins et émettant un fort rayonnement électromagnétique. Ce bel article de Vincent Pinte-Deregnaucourt fait un inventaire plus détaillé des composantes de la Voie Lactée.
La Voie Lactée est notre galaxie. Sa structure n’a été découverte que tardivement, dans les années 1920, notamment par Hubble. Elle fait 100000 AL de diamètre et comprend entre 200 et 400 milliards d’étoiles de taille et maturité variables et au moins autant de planètes. Notre soleil est situé à environ 26 000 AL du centre de la galaxie. Celui-ci est difficile à localiser avec précision. La cartographie exacte de la Voie Lactée est d’ailleurs encore incomplète, surtout pour les bras qui sont situés de l’autre côté de son centre vis à vis du Soleil.
Que voit-on de la Voie Lactée au juste en observant le ciel? Dans une zone dénuée de pollution lumineuse, nous pouvons observer la trainée d’étoiles de la Voie Lactée, comme ici dans cette magnifique photo prise en Australie. Elle correspond à la tranche de la Voie Lactée dans laquelle nous sommes. Lorsque l’on regarde dans une autre direction, on peut surtout observer une partie moins dense de la Voie Lactée. La pollution lumineuse empêche de bénéficier de ce genre de vue dans les zones habitées. J’avais eu l’occasion de faire une belle observation de la Voie lactée en Afrique du Sud en 2001 et c’est tout bonnement merveilleux et inoubliable.
Il n’y à qu’à peine 10% du territoire français qui soit potable pour des observations astronomiques à l’œil nu. Il s’agit essentiellement des zones montagneuses et d’une bonne partie de la Corse. A l’occasion de l’élection présidentielle 2017, j’ai d’ailleurs découvert l’association de lutte contre la pollution lumineuse, l’ANPCEN. Son programme s’était même retrouvé dans celui de Jean-Luc Mélenchon! Evidemment, sans que cela ne génère d’écho particulier, autant dans les médias que dans les discours du candidat. C’est un exemple parmi d’autres des conséquences hasardeuses du lobby associatif vis à vis des politiques.
Dans cette vue de la Voie Lactée, fictive, ou tout du moins inspirée de ce que l’on en sait, vous trouvez la position du Soleil dans l’un des bras de la Voie Lactée. Le petit cercle indique la partie de la voie lactée que l’on voit à l’œil nu lors d’une nuit étoilée et sans pollution lumineuse, ce qui correspond à un rayon d’environ 500 AL La portée maximale de certaines étoiles serait de 10 000 AL. Le soleil tourne en fait autour du centre de la Voie Lactée, mais on ne s’en rend pas compte car la période de rotation, l’année galactique, est de 250 millions d’années solaire. C’est le temps qu’il faut pour que le soleil fasse le tour complet de la voie lactée.
Dans les photos du centre de la Voie Lactée prises dans le visible, de la terre ou de l’espace, le centre de la voie lactée est un mélange de bande d’étoiles et de bandes obscures. Elles empêchent d’observer le centre de la galaxie. Il s’agit de grands nuages de poussière. Le centre de la Voie Lactée comprendrait un gros trou noir de 2,6 millions de fois la masse du Soleil. Mais il n’est probablement pas le seul.
A noter que la portée des ondes électromagnétiques d’origine humaine est d’à peine 150 années-lumières, correspondant à l’invention des émetteurs radios sur terre. Il s’agit de l’empreinte la plus éloignée de la civilisation humaine dans la galaxie. Sachant que les pyramides et autres constructions humaines plus anciennes sont difficilement observables de l’espace lointain! En 1974, l’initiative SETI a envoyé un message structuré vers l’espace à partir du radio-télescope d’Acirebo de Porto Rico. Il a été envoyé de manière très directionnelle vers un cluster d’étoiles, dit Messier 13, qui contient tout de même 300 000 étoiles.
Par contre, les caractéristiques favorables de la Terre sont détectables de plus loin. Et elles sont bonnes depuis au moins 3,8 milliards d’années, malgré les nombreuses fluctuations que la Terre a connues, par exemple dans sa température, et la composition de son atmosphère qui a varié dans sa teneur en oxygène et CO2. Donc, notre banlieue de la Voie Lactée doit pouvoir détecter la Terre et si on y trouve une civilisation. Mais pas forcément dans n’importe quelle direction puisque les techniques de détection d’exoplanètes que nous verrons dans une autre partie de cette série d’article limitent celle-ci aux plans de rotation des planètes autour de leur étoile qui croisent l’axe point d’observation-soleil. Comme nous le verrons aussi, les exoplanètes détectées récemment sont situées à une relative proximité du soleil dans la voie lactée, et sont situées dans la limite du second cercle en pointillé (10 000 AL de rayon). Les plus proches sont à respectivement 4,2 AL et 10 AL. On ne risque à priori pas de détecter d’exoplanètes dans d’autres galaxies qui sont trop lointaines pour ce genre d’observation. Ce qui nous rappelle que la recherche de planètes habitables et de planètes abritant une vie extraterrestre est très limitée en porte dans l’espace observable.
Eloignons-nous encore un peu. La Voie lactée est située dans un groupe local de galaxies qui fait un diamètre de 6,5 millions d’AL et comprend 54 galaxies. La plus importante des galaxies de ce groupe est Andromède. Elle comprend cinq fois plus d’étoiles que la Voie Lactée et fait 140 000 AL de diamètre. A l’échelle de l’histoire, elle est assez éloignée: 2,5 millions d’AL ! La lumière que l’on reçoit de cette galaxie correspond à l’arrivée d’Homo Habilis, un ancêtre d’Homo Erectus puis Néanderthal et Homo Sapiens.
La photo ci-dessous a été prise par le télescope spatial Hubble. Vous pouvez aussi profiter de cette très belle vidéo d’observation d’Andromède qui rassemble des milliers de photos prises par Hubble. Elle est visualisable en 4K si votre installation le supporte.
Quand on s’éloigne encore, on se retrouve dans un superamas (supercluster), un groupe de groupes de galaxies, celui de la Vierge. Il comprend 110 groupes de galaxies du style du groupe local dans lequel se trouve la Voie Lactée et Andromède. Ce superamas fait 110 millions d’AL de diamètre.
Ce superamas est lui-même intégré dans le superamas de Laniakea, qui a été décrit en septembre 2014 par l’américain R. Brent Tully et la lyonnaise Hélène Courtois. Leur étude est basée sur la vitesse relative des galaxies les unes par rapport aux autres. Ce superamas de Laniakea comprend la bagatelle de 100 000 galaxies.
Dans Laniakea, on trouve notamment le superamas de Persée (Abell 426). C’est le plus gros objet observable de l’univers. Il contient des milliers de galaxies de tailles diverses. Son image ci-dessous ne visualise pas ses galaxies mais les gaz chauds qu’il contient. Elle a été obtenue dans les rayons X par le télescope spatial Chandra et avec un temps de pose de 16 jours. Le bousin fait un million d’années lumières de diamètre. A côté, notre gigantesque Voie Lactée est une naine ! Il est situé à 240 millions d’années lumières, 90 fois plus loin que la galaxie Andromède.
Bon, et puis ensuite, on s’éloigne encore, on découvre d’autres galaxies en se rapprochant de la naissance de l’univers puisque plus loin vont nos observations, plus on remonte dans le temps. La galaxie la plus éloignée que l’on ait pu observer, GN-z11, est à 13,4 milliards d’AL, environ 400 millions d’années lumières après la naissance supposées de l’univers.
Compte-tenu de sa dilatation depuis sa création, l’univers observable fait 90 milliards d’années lumières de diamètre. Une galaxie qui est à 13,5 milliards d’années lumières était à cette distance là au moment où elle a émis sa lumière observée. Mais elle a bougé depuis et se trouve maintenant à environ 45 milliards d’AL. D’après les observations et estimations les plus récentes, l’univers observable comprendrait 2 trillions de galaxies.
Quels sont les grands objectifs actuels de l’astronomie? En gros, il s’agit déjà de bien comprendre le fonctionnement de notre propre étoile, le Soleil. Plusieurs télescopes sont braqués dessus en permanence pour l’observer et notamment détecter ses fluctuations. Notre climat est en effet sensible à ses variations. Un orage électromagnétique issu du Soleil peut aussi à tout moment détruire tous les processeurs et mémoires sur Terre malgré la protection de sa magnétosphère.
Ensuite, on continue d’explorer sans relâche les autres planètes du système solaire et leurs propres satellites. Mars est une destination future de l’exploration humaine, après les nombreuses sondes que l’on y a fait atterrir comme Curiosity. La planète contient de l’eau et aurait pu voir des formes de vie primitives y émerger. Certains rêvent même de terra former la planète et d’en faire une colonie humaine durable. C’est probablement le seul endroit où il est envisageable de le faire. Et encore, c’est loin d’être une panacée.
Au-delà du système solaire, les recherches d’exoplanètes vont bon train. Les astronomes cherchent en priorité des exoplanètes ressemblant de près à la Terre ou tout du moins capables d’y héberger une vie équivalente à la notre. Il faut donc une gravité de préférence voisine de celle de la terre, une atmosphère, de l’oxygène, du carbone, de l’eau liquide et une magnétosphère pour protéger la vie des rayons cosmiques. La distance entre la Terre et ces éventuelles exoplanètes reste cependant énorme pour les rendre colonisables.
On cherche ensuite à mieux comprendre les divers objets qui constituent notre galaxie, les trous noirs, les pulsars, puis à comprendre les mécanismes de la naissance comme du crépuscule des étoiles et des galaxies. Les temps évalués sont “cosmiques”, c’est-à-dire de plusieurs ordres de grandeur supérieurs à l’histoire de l’Humanité. C’est donc un exercice plus intellectuel que pratique.
En allant plus loin et en remontant le temps dans l’histoire de l’Univers, on cherche à en comprendre le processus de formation. Celle de la matière, de la lumière, puis des étoiles et des galaxies. On cherche aussi à trouver la forme que prend la fameuse matière noire qui expliquerait la cohésion des galaxies.
Cette matière noire est cependant aussi difficile à trouver que l’intelligence humaine en période électorale. La première pourrait bien ne pas exister si on reformulait les lois de la gravité. C’est l’hypothèse MOND de Mordechai Milgrom, exposée en 1983, affinée par Erik Velinde en 2010 et validée partiellement en 2016 (cf New theory of gravity may explain dark matter qui date de novembre 2016). De son côté, Margot Brouwer, de l’observatoire de Leiden aux Pays-Bas, a observé la distribution de matière dans 30 000 galaxies et en conclu qu’il n’y a pas de “naissance” de l’univers et que celui-ci serait en fait éternel. Bref, en astronomie comme ailleurs, il ne faut jamais s’assoir sur ses certitudes!
Ceci n’était qu’une petite mise en bouche pour comprendre la suite. Dans le second épisode, je vais m’intéresser aux télescopes terrestres qui continuent de jouer un rôle clé dans l’observation de l’univers, et notamment les radio-télescopes dont le fonctionnement est quelque peu mystérieux. Comment diable font-ils pour créer des images alors qu’ils ne comprennent pas de capteurs d’images?
Et petit appel: si vous êtes un entrepreneur ayant à voir de près ou de loin avec l’espace, n’hésitez pas à me contacter, ce qui me permettra d’enrichir la dernières partie de cette série, à défaut des autres.
Olivier Ezratty est consultant et auteur. Il conseille les entreprises pour l’élaboration de leurs stratégies d’innovation, et en particulier dans le secteur des objets connectés et l’intelligence artificielle. Très actif dans l’écosystème des startups qu’il accompagne comme consultant, advisor, conférencier et auteur, il est apprécié pour les articles fouillés de son blog Opinions Libres dans des domaines très divers. Il y publie le « Guide des Startups » ainsi que le « Rapport du CES de Las Vegas » chaque année depuis 2006. Olivier est expert pour FrenchWeb qui reprend de temps à autres la publication des articles de son blog.
Lire aussi: Peut-on benchmarker l’intelligence artificielle?
- Ask A VC : comment modéliser un compte de résultat — Partie 6/6 : analyse de sensitivité - 21/05/2024
- Ask A VC : comment modéliser un compte de résultat — Partie 3/6 : les Coûts Fixes - 16/01/2024
- Question à un VC : Pourquoi les marges unitaires sont-elles si importantes pour votre modèle d’affaires? - 13/11/2023