La blockchain, l’avenir de l’e-démocratie
FrenchWeb publie les bonnes feuilles du nouveau livre de Philippe Rodriguez («La révolution blockchain», Dunod, 2016). Cet ouvrage questionne les transformations portées par la blockchain, en explique les mécaniques de fonctionnement et les prochaines évolutions.
Dans la tempête médiatique du PeneloppeGate, la question de la transparence de la vie politique française a resurgi avec une violence inédite. Les tenants et les aboutissants de l’affaire Fillon révèlent, chaque jour un peu plus, une part de mystère enveloppant la vie politique française, des secrets bien gardés de la vue des honnêtes citoyens. Ces arrangements parfois mal connu des citoyens nuisent à l’image de notre système politique, aujourd’hui décrié par tous les journaux de la presse étrangère. Pouvons-nous tolérer plus longtemps ces pratiques d’un autre temps? N’est-il pas urgent de remettre à plat ce système pour refonder une démocratie plus saine? Le numérique a toute sa place à jouer dans cette révolution.
La blockchain, un outil au service du politique
Depuis qu’elle a été imaginée puis développée dans la seconde moitié des années 2000, la blockchain n’a cessé d’inspirer de nouvelles méthodes de contrôle de l’activité politique. Ses théoriciens, le mouvement international des Cypherpunks, une sorte d’ancêtre d’Anonymous, y voyait le moyen d’assurer une totale transparence sur les élections, l’application des programmes politiques ou encore le financement des activités publiques. En effet, en tant qu’outil de partage de données à la fois autonome et décentralisé, la blockchain apparaît comme un livre ouvert, dans les pages duquel chacun peut vérifier ce qui a été dit, ce qui a été fait, voire même déclencher, s’il ou elle l’estime nécessaire, une sorte de signal d’alarme.
Avant les lanceurs d’alerte de Wikileaks, les Cypherpunks ont donc été les premiers à dénoncer les abus du système politique et à plaider pour un contrôle accru de la vie publique. Dans leur conception de la démocratie, chaque citoyen est ainsi le garant de la bonne tenue de la vie politique. Aux Etats-Unis, d’ailleurs, la procédure des «élections de rappel» (recall election) permet de voter la destitution d’un élu en cas de manquement grave à sa fonction ou de non-respect de ses engagements politiques. Apparu dès 1631, dans la colonie du Massachussetts, ce processus politique fait donc du citoyen le véritable contrôleur de la rigueur de l’activité politique. A quand son introduction dans la Constitution française?
Contrôler les votes pour en assurer la transparence
L’autre innovation politique de la blockchain est sa capacité à encadrer et à contrôler la procédure des élections. Le scandale du nombre de votants à la primaire de la gauche a rappelé que, même en 2017, le trucage d’une élection était une fraude politique encore possible. Nombre d’entre vous ont d’ailleurs peut-être vécu ce scandale comme une vraie désillusion politique. La blockchain est une solution définitive pour lutter contre cette dérive. En effet, en scellant chaque vote au sein d’une chaîne publique d’informations, cette technologie empêche tout truchement du vote. Pour modifier un vote, il faudrait en effet modifier toute la chaîne, ce qui demanderait une puissance de calcul immense.
En outre, le développement d’un vote numérique, accessible depuis son domicile permettrait de lutter contre les phénomènes d’abstention. Lors de la dernière élection présidentielle, en 2012, près de 20% du corps électoral avait choisi de ne pas s’exprimer, au premier comme au second tour. Depuis 1999, le taux d’abstention aux élections européennes en France n’est même jamais descendu en-dessous de 50%. Il y a donc une vraie crise démocratique. Une enquête menée par Haris Interactive/Nouveaux Horizons (novembre 2015) assure pourtant que 58% des abstentionnistes consultés seraient prêts à voter s’ils disposaient du droit de vote par internet. Chez les 18-24 ans, ils sont mêmes 79% à se dire prêts à accomplir leur devoir citoyen avec l’aide du vote numérique.
Engager les candidats dans le cadre d’un contrat programmatique
Pour transformer la démocratie, la blockchain propose des alternatives réalisables à court terme, voire même applicables dès la prochaine élection présidentielle de 2017. Plusieurs candidats, comme François Fillon ou Emmanuel Macron, ont évoqué leur volonté de s’engager avec les Français par un contrat programmatique. Dans le cadre de la création d’une blockchain politique, sur laquelle chaque citoyen disposerait d’un vote, les candidats pourraient donc proposer une liste de propositions détaillées, que les citoyens pourraient valider comme réalisées ou irréalisées au cours du mandat. Ainsi, au moment du vote, chacun serait en mesure de juger si les promesses politiques ont été (ou non) respectées.
Si les entreprises d’e-démocratie se multiplient (DemocracyOS, PublicVote, BitCongress, FollowMyVote), une certaine méfiance demeure à l’égard de ces initiatives numériques. Le vote numérique comporte, c’est vrai, des risques, ne nous voilons pas la face, mais ses potentialités sont gigantesques et notre système politique doit s’en nourrir pour s’améliorer. Ce mariage de la politique et du numérique est la condition de sortie de la crise démocratique dans laquelle notre pays est empêtré depuis plusieurs années. L’alternative blockchain est une promesse démocratique, sachons nous en saisir!
La révolution Blockchain
Philippe Rodriguez
Dunod, 2016
224 pages
Philippe Rodriguez est le cofondateur et managing partner de Avolta Partners, l’une des banques d’affaires les plus actives en Europe pour les entreprises dans les nouvelles technologies. Philippe est par ailleurs très présent dans l’écosystème Blockchain comme conférencier et président de Bitcoin France. Dans écosystème numérique il a co-fondé l’EBG dont il est le trésorier depuis 1998. Philippe est diplomé de l’ESCP et de l’EISTI.
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