L’achat groupé, vraiment le nouvel eldorado ?
Les grandes manœuvres s’accélèrent autour de l’achat groupé aux Etats-Unis. Groupon prépare une introduction en bourse à hauteur de 15 milliards de dollars. Amazon a investi 175 millions de dollars dans LivingSocial. Google s’apprête à lancer « Google Offers ». Et les opérations marketing se multiplient pour promouvoir chaque plateforme.
Groupon a d’ailleurs affiché la taille de ses ambitions qui dépassent les 6 milliards $, montant de l’offre de rachat par Google qu’elle a rejetée. La société a levé 950 millions auprès d’investisseurs privés, ce qui établit sa “capitalisation virtuelle” à 5 milliards. Mais le site viserait encore plus haut : 15 à 20 milliards après son introduction en bourse.
Une ambition portée par des résultats impressionnants. Si l’on en croit le site AllThingsD, Groupon atteindrait un chiffre d’affaires annuel de 2 milliards de dollars. A moins que ce ne soit plutôt 800 millions $ selon les projections de Business Insider. Un chiffre largement suffisant, quoi qu’il en soit, pour attirer les investisseurs.
LivingSocial son principal rival anticiperait pour sa part un chiffre d’affaires supérieur à 500 millions de dollars en 2011. Pour 8% de parts de marché estimées sur le segment de l’achat groupé, contre 79% pour Groupon.
Quant au géant de la recherche éconduit, il s’apprête à lancer son propre produit “Google Offers”, c’est dire à quel point le secteur attire les convoitises.
UNE CONCURRENCE FÉROCE
Ça commence d’ailleurs à se bousculer sur le secteur de l’achat groupé : LivingSocial, Scoop St, BuyWithMe, HomeRun… Liste à laquelle s’ajoutent les clones, tels le russe Biglion, copie conformes du modèle original Groupon.
Sans parler des agrégateurs d’achats groupés comme Yipit, Dealsurf ou Dealery.com qui permettent de trouver, parmi tous les sites du genre, celui qui propose la meilleure offre à l’internaute.
En France où Groupon est présent via Citydeals, les sites d’achat groupés se multiplient également tels letrader.fr, bon-prive.com, kgbdeals.fr, obenn.com…
Pour amorcer les usages et se démarquer, les deux mastodontes Groupon et LivingSocial se livrent une guerre marketing à coups de réductions massives.
En août dernier Groupon et Gap s’associaient pour proposer des coupons d’une valeur de 50 dollars, vendus 25. Ils en ont écoulé quelque 441 000, pour un montant cumulé de 11 millions de dollars.
Record battu en janvier 2011 par Livingsocial.com et Amazon qui ont séduit 1,3 millions de clients grâce à leurs coupons à moitié prix (10 dollars au lien de 20), pour un chiffre d’affaires de 13 millions de dollars.
ELDORADO OU MIRAGE ?
Si l’engouement aux Etats-Unis pour les ventes groupées semble se confirmer, la question se pose toutefois de l’importation du modèle en Europe et en France en particulier.
Les Etats-Unis ne sont pas la France :
– Le marché “local” y est beaucoup plus restreint : le nombre d’habitants des grandes villes est 4 à 5 fois moins important que celui des grandes métropoles américaines. New York abrite 8 millions d’habitants, Paris un peu plus de deux millions. Los Angeles, c’est 4 millions de consommateurs potentiels, Marseille, 2e ville de France culmine à 800 000…
– Ceci conduit à une concurrence moindre sur les commerces, à part dans les très grandes villes. Pourquoi un commerce (ex : un spa) consentirait-il pareils efforts marketing alors qu’il se trouve en position dominante voire monopolistique, excepté dans les grandes villes ?
– Quant au marché européen, il est est beaucoup plus éclaté que le continent américain : langues, cultures et règles juridiques différentes rendent impossible ou très complexe la mise en place d’offres communes. Or le modèle repose sur un volume suffisant de ventes pour compenser la remise.
– Les sites d’achats groupés doivent faire face par ailleurs à une concurrence forte des acteurs locaux bien implantés : Pages Jaunes, SPIR, Paru Vendu… Lesquels disposent d’une force commerciale nombreuse et expérimentée.
– Enfin des critiques émanent aussi des commerçants, qui après l’engouement initial dénoncent l’iniquité du modèle dont l’effort repose principalement sur eux. D’autres dénoncent ces opérations qui ne fidélisent pas la clientèle et n’attirent que les “pique-assiettes”. Certains se montrent déçus par la faible mise en avant des commerces sur le site : lien discret des sites partenaires, pas de zoom sur la carte Google… (lire les commentaires de ce billet)
OPERATION MARKETING PONCTUELLE
A moins que Groupon ne serve à créer du trafic sur une période limitée, pour la création de notoriété, en phase de lancement. Une opération beaucoup plus rentable qu’une campagne de pub, comme l’explique Frank Zorn, patron de Citydeals, au JDnet
Et un modèle de vente qui permettrait d’élargir la clientèle en créant une consommation nouvelle sur des produits de découverte inhabituels : essais sur circuit, spas etc.
Ou encore un moyen efficace pour générer de la clientèle par phénomène grégaire : la clientèle d’un bar appelle la clientèle…
Une chose semble acquise cependant, tous les commerces de proximité n’y trouveront pas leur compte. Il faut des produits à forte marge et un volume de vente suffisant. D’ailleurs, aux Etats-Unis, 40% des commerçants renonceraient déjà à poursuivre la collaboration avec Groupon selon L’université de Rice au Texas.
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Euh le Grand Paris c’est 10 millions d’habitants. Donc c’est plus grand que NY.
Ca n’a pas de sens de compter seulement Paris intra muros…
@SaneFive : Oui surtout qu’il y a des offres en proche banlieue.
Bonjour Sanefive,
Je reconnais que la région parisienne est un foyer très peuplé et qui concentre beaucoup de ressources économiques, et d’entreprises. Même si le Grand Paris, est beaucoup moins bien desservi que les grandes villes américaines ou même que Londres. D’où la réforme du « Grand Paris » en cours.
Mais même si je fais abstraction de la région parisienne, combien de villes françaises ont une taille critique suffisante et une activité économique concurrentielle telle qu’elle justifie des opérations marketing coûteuses entre petits commerces ?
Un site d’ambition nationale comme Groupon ne peut se contenter de trois régions (Ile de France, Rhône Alpes et Paca) ? j’émets quelques réserves, mais je peux me tromper :)
Bonjour à tous.
Merci pour cette analyse pour une fois pas forcément avantageuse sur le marché de l’chat groupé.
Cyrille Frank vous avez eu raison au final sur groupon et leur introduction en bourse, elle s’est finalement bien cassé la figure.
Moi personnellement j’aime bien le système du deal, mais il faut faire très attention, et bien lire les petite ligne. Je ne cherche plus mes bonnes affaires sur un site en particulier. J’utilise depuis quelques mois un agrégateur que je trouve très sympa.
Si je peux leur faire un peu de pub au passage, vous pouvez retrouver tous les bons plans à cette adresse.
Cordialement. A quand Cyrille d’une nouvel étude sur le marché groupé avec un peu plus de recule, car certains sites cités dans l’article on déjà fermés leurs portes ?