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La redoutable stratégie juridique et en affaires publiques d’Uber

Uber est une voiture de course dont la route est difficile à barrer, et pourtant nombreux sont ceux qui veulent mettre fin à son aventure. Voici le 2e volet de notre série sur la stratégie de développement imaginée par Travis Kalanick, son fondateur et CEO :

Lire le 1er volet : Travis Kalanik, l’homme capable d’uberiser la planète.

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Une entreprise qui sait s’accorder des lois et des procédures, des chauffeurs qui continuent d’exercer, des passagers qui montent à l’avant pour éviter les contrôles… Cette situation ub(er)uesque, le «cartel des taxis», comme aime l’appeler Travis Kalanick, veut y mettre fin. Mais à chaque offensive juridique, ils buttent contre un géant qui semble toujours avoir un coup d’avance.

Si la montée en puissance d’Uber dans 57 pays, dont 19 en Europe (et 25 prévus cet été) est rendue possible par un recrutement massif de chauffeurs qui permet d’aligner l’offre sur la demande, là n’est pas le plus difficile. Dans chaque pays, voire chaque ville, Uber doit non seulement faire face à une réglementation propre à chaque nation, mais doit aussi «jouer» avec.

A Genève, Uber force les autorités à voter une nouvelle loi qui vise à libéraliser les taxis, à New Dehli, après son interdiction, Uber se lance dans le pousse-pousse local. Dans les villes allemandes, Uber refuse l’interprétation de la loi qu’il considère comme obsolète. Résultat, il proposera dès l’été prochain de payer une licence de taxis à ses chauffeurs pour lever l’illégalité de leur statut.

Reste pourtant les irréductibles de l’uberisation. Corée du Sud, Belgique, Scandinavie, Pays-Bas, les attaques en justice se multiplient. En France Uber se bat contre la loi Thévenoud. En Espagne, la société se bat contre une décision du tribunal qui a déclaré le service illégal, et qui demande aux opérateurs d’empêcher la distribution de l’application auprès de tout espagnol et cela partout dans le monde. Mais aucune n’a encore fait reculer l’entreprise. Et pour cause.

Un recrutement très spécial

Partout, Uber jongle à la fois avec la législation, et les procédures judiciaires des pays. Pour ce faire, il s’est doté d’une armada de conseillers, et de lobbyistes en tous genre. Dans chaque pays, Uber recrute en interne des spécialistes en affaire publiques qui doivent être «à l’aise dans les situations inconfortables», et «prêt à développer des projets réglementaires afin de maintenir les marchés ouverts, et d’en ouvrir de nouveaux», comme l’indique les offres d’emploi publiées sur le site de recrutement d’Uber.

En France, Uber non seulement conteste la loi Thévenoud devant la Commission européenne, mais évite par tous moyens son application. Ainsi, ayant évalué avec ses avocats, une forte probabilité que la Cour d’appel de Paris statue en faveur de ses arguments un nouveau sursis, Uber est maitre du temps, le temps de transmettre à la Cour de cassation deux questions de constitutionnalité. En maitrisant les procédures, Uber a ainsi gagné au moins six mois pour développer son service; un temps précieux pour prendre des parts de marché.

«Uber fait de la Law Intelligence avec une gestion du risque juridique, et surtout une gestion du facteur temps redoutable. Ils élaborent des scénarios, des hypothèses plausibles, payent des centaines de milliers de dollars, des avocats, des lobbyistes, des juristes et des économistes et savent que cinq ans, sur internet, c’est aussi lointain que la fin du monde», explique Olivier Iteanu, avocat spécialisé dans les nouvelles technologies.

Avec une telle stratégie d’anticipation, la maxime Time is money n’aura jamais été aussi vraie. Car c’est bien du chiffre d’affaires qu’Uber engrange pendant ce temps là.

Plus de 160 lobbyistes

Au-delà d’une structure organique parfaitement rodée et qui joue de concert pour participer à «la révolution des transports en ville», Uber s’appuie sur une armée de conseillers, avocats et agence en communication publique. Selon le Washington Post, Uber aurait tissé un maillage de plus de 160 lobbyists pour défendre ses intérêts, rien qu’aux Etats Unis. Aucune liste de lobbyistes n’a d’ailleurs été communiquée par la société.

En Europe, Uber a fait appel à Mark MacGann, un lobbyiste connu à Bruxelles pour avoir accompagné notamment NYSE Euronext. Ce dernier est là pour assurer les affaires publiques à la fois en Europe, au Moyen-Orient et en Afrique.

Mais rien n’arrête Uber qui développe une ligne de défense simple, il se revendique auprès des instances européennes, comme étant une plateforme technologique et non un service de transport. A ce titre, la société demande l’application des traités européens, qui imposent notamment une égalité de traitement dans les différents pays.

Après s’être déclaré l’entrepreneur le plus malchanceux, Travis Kalanik ne veut pas perdre la partie et développe une stratégie particulièrement offensive. Difficile d’imaginer qu’une grève ou une manifestation de taxis puisse l’arrêter. Il peut aussi compter sur la proposition de valeur et l’accessibilité de son service qui séduisent les chauffeurs. Malgré les 350 procédures contre eux en France, (risquant un an de prison, de 500 à 1 500 euros d’amende, et une suspension du permis pendant 5 ans avec confiscation du véhicule), ils apprécient l’activité, disponible à tout moment, sur leur smartphone.

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