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Demain des «journey managers» dans l’entreprise?

La transformation digitale entraine un certain nombre de changements dans les entreprises. Il y a des choses qu’on ne peut plus gérer comme avant et des choses dont on ne s’occupait pas avant dont il faut s’occuper maintenant. C’est ainsi qu’on a vu ces dernières années naître de nouveaux métiers : Community Managers, Chief Digital Officer, Chief Data Officer.

Bien sur cela a systématiquement entrainé un débat sur le coté «effet de mode» de ces métiers. Un débat inutile à mon avis : si ces métiers émergent c’est que dans une grande majorité des entreprises ils ont un intérêt à un moment donnée. Par contre ils peuvent rapidement disparaitre. Soit parce qu’il s’agit d’une compétence qui se généralise, soit parce qu’il s’agit d’une mission qui même si elle s’étale sur des années est d’une certaine manière ponctuelle dans le temps. Leur caractère provisoire dans le temps n’est pas la preuve d’un effet de mode mais simplement d’un monde qui change vite. Le long terme c’est 5 ans, pas plus.

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La notion de parcours est essentielle dans le digital

La notion d’expérience est centrale dans la transformation digitale et parmi ses éléments clés on trouve la personnalisation, la continuité et la cohérence. Trois éléments qu’on peut aisément regrouper au sein de l’idée de «parcours». Ce qui est certainement la raison pour laquelle on voit «pousser» des «journey managers» çà et là dans les entreprises. Une tendance qui relève encore du signal faible mais dont je ne vois pas pourquoi elle ne s’ancrerait pas durablement.

Prenons l’exemple du client. Qui est «le propriétaire» du client dans l’entreprise. Les ventes ? Le marketing ? Le service client ? La direction produit ? J’ajouterai presque également les RH car si on est en déficit de talent, d’engagement et de culture, il y a de fortes chances que cela finisse se ressentir coté client. En fait tout le monde est un peu responsable du client car, peu importe sa forme, l’interaction avec le client suit un chemin et passe successivement de l’un à l’autre.

L’entreprise gère les étapes du parcours client, pas le parcours

Chaque étape de ce chemin peut «appartenir» à quelqu’un. D’autre auront un rôle continu pour supporter les acteurs à chaque étape. Mais le gros problème, vu du client, c’est qu’il sent voire subit ces étapes. Nouveaux interlocuteurs, nouveaux process, relation à recréer de zéro sans prise en compte de l’historique etc. Ce qui devrait être un parcours fluide et linéaire devient en fait un parcours de saut d’obstacles, voire une suite de sauts. L’entreprise gère les étapes du parcours client, pas le parcours client. Et je ne parle même pas de la complémentarité physique/digital, souvent aux abonnés absents, chaque dimension étant gérée indépendamment.

D’où l’intérêt d’un «journey manager» en charge de la cohérence, de la continuité et de la personnalisation du parcours, qui permettrait enfin de prioriser l’optimum global par rapport à une suite de maximum locaux qui amènent à une logique de destruction de cohérence, qui rendrait le parcours fluide et cohérent et forcerait ses acteurs à, de leur coté, collaborer davantage. L’enjeu étant de s’organiser autour du client et pas autour d’autre chose.

Le parcours doit en effet être pensé et géré dans sa globalité pour être personnalisable, adaptable, flexible. De ce coté ma question originale, à savoir «à qui appartient» le client était erronée. Le client n’appartient plus à personne dans l’entreprise et pas même à l’entreprise elle-même : il s’appartient a pris son indépendance et s’appartient à lui même. Il ne suit plus le «funnel» qu’on veut lui imposer mais celui qu’il se crée lui même. Sans journey manager il devient difficile de piloter la cohérence interne d’un parcours client personnalisé.

La vie du collaborateur consiste à cheminer entre les silos applicatifs

Ce qui vaut coté client vaut également nécessairement coté employé.

J’ai déjà longuement exposé l’intérêt de l’expérience employé. Rien qu’en regardantla dimension de l’expérience du poste de travail on comprend bien l’importance du sujet. Le poste de travail est géré par «briques» en fonction de la mission ou du type d’application alors que le collaborateur le vit de manière transverse. On a optimisé les silos alors que la vie du collaborateur consiste à cheminer entre les silos applicatifs. Un «journey manager» du poste de travail aurait beaucoup de travail. Appliquez la même règle aux process qu’ils soient métier ou administratifs… il y a du travail

Mais de manière générale, l’expérience employée dépasse elle aussi largement le digital. Là par contre et même sans ce que cela soit parfait il y a quelques bases sur lesquelles s’appuyer. La notion de gestion des carrières existe, on a la GPEC même si dans la pratique c’est devenu une usine à gaz qui ne contribue pas nécessairement de manière sensible et visible à l’amélioration du parcours de l’employé dans l’entreprise et dans le temps.

Car la notion de parcours s’interprète à la fois de manière très spécifique, pour une action donnée, que dans le temps, à très long terme.

Une multitude de parcours à gérer

Qu’on parle du client ou du collaborateur il y a une multitude de parcours à gérer. Ces parcours sont clés dans la cohérence et la continuité d’expériences qui ne peuvent être que personnalisées. Cela suffira-t-il pour pérenniser le «journey manager» ? On verra. On peut également se demander ce que vaut le «journey manager» sans «journey designer» car la notion de parcours si elle existe n’est que faiblement maîtrisée et modélisée dans la perspective d’être pilotée.

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Bertrand Duperrin est Digital Transformation Practice Leader chez Emakina. Il a été précédemment directeur conseil chez Nextmodernity, un cabinet dans le domaine de la transformation des entreprises et du management au travers du social business et de l’utilisation des technologies sociales.

Il traite régulièrement de l’actualité social media sur son blog.

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