Le télétravail, facteur de modernisation du système d’information?
Lorsqu’on parle du télétravail, on évoque d’abord l’impact managérial ou organisationnel pour l’entreprise. Du côté des directions informatiques, le télétravail inquiète plus qu’il n’enthousiasme. Il questionne surtout sur les contraintes sécuritaires du travail hors entreprise et la capacité d’adaptation du système d’information pour que l’ensemble des outils de travail puissent être utilisés, avec la même facilité qu’au bureau. Au-delà de ces difficultés, le télétravail peut pourtant constituer un facteur de modernisation progressive du SI et un moyen de faciliter une meilleure acceptation de l’innovation technique. En quelques étapes, voici comment le télétravail peut contribuer à cette innovation partagée.
Définir un environnement sécurisé pour le travail à distance
La première crainte liée au développement du télétravail reste l’ouverture extérieure du système d’information. Une inquiétude qui peut sembler paradoxale, alors même que la plupart des salariés travaillent déjà, ponctuellement, depuis des lieux publics (gare ou aéroport par exemple). Contrairement au travailleur nomade, le lieu de télétravail est unique (le domicile dans la plupart des cas) et généralement non-public. L’équipement est fourni par l’entreprise et paramétré par cette dernière (ordinateur portable et smartphone) et la connectivité est assurée via une box individuelle dont on peut s’assurer qu’elle sera sécurisée. Autant de facteurs qui devraient donc rassurer les directions informatiques.
En réalité, la difficulté tient plutôt dans la nécessité de répondre à des demandes métier différentes en permettant un accès à un ensemble d’applicatifs pas toujours conçus pour le travail à distance et avec un niveau de sécurité optimal. Il nécessite aussi de mettre en place des règles précises d’utilisation au travers, notamment, d’une charte informatique adaptée.
Opérer une montée en gamme progressive
Au-delà de ces contraintes sécuritaires, l’intérêt du télétravail tient d’abord dans sa capacité à expérimenter une nouvelle organisation technique sur une échelle réduite. Ce mode d’organisation est en effet généralement testé sur un effectif limité avant d’être étendu à d’autres catégories de personnels. Il permet ainsi de déployer de nouveaux outils et de nouvelles procédures «en situation réelle», de les tester sur une période plus ou moins longue (généralement de 6 à 12 mois), d’y apporter si besoin des correctifs et évolutions avant des les déployer à plus grande échelle, en fin d’expérimentation.
Envisager le déploiement de nouveaux outils
L’un des autres atouts majeurs du télétravail, côté directions informatiques, tient également dans sa capacité à moderniser un mode de fonctionnement en envisageant, à petites touches, le déploiement de nouveaux outils. Nombre d’organisations ont ainsi profité de la mise en place du télétravail pour déployer des outils en client léger ou mettre en place des applicatifs ou équipements facilitant la communication à distance et évitant l’isolement du télétravail, comme par exemple une messagerie instantanée utilisée en contexte professionnel ou encore des nouveaux outils d’audioconférence, de webconférence ou de visioconférence, couplés à des systèmes de partage d’écran.
Expérimenter de nouveaux usages… et faciliter leur adoption
Au-delà de l’impact sur les process, sur le management ou sur la communication d’équipe, ces outils permettent aussi d’envisager d’autres façons de travailler et d’envisager la mobilité professionnelle. Lorsque le management intègre la webconférence en lieu et place d’une réunion physique, lorsqu’il permet d’envisager d’autres modes de communication que les sempiternelles réunions d’équipes, il contribue aussi à moderniser l’organisation et le fonctionnement de l’entreprise.
Alors que, dans un autre contexte, certains de ces outils pourraient être déployés mais non-utilisés, les télétravailleurs deviennent souvent des facilitateurs d’usage en permettant une transition pacifiée vers ces nouveaux outils et les nouvelles procédures qui les accompagnent. Cette transition est rendue possible d’abord par la progressivité du changement évoquée plus haut, mais aussi et surtout par la construction d’une relation gagnant / gagnant entre un salarié demandeur et un employeur désireux d’expérimenter d’autres modes de fonctionnement en télétravail.
Tester en configuration réelle la capacité de continuité des activités
Moderniser l’entreprise, c’est aussi s’assurer que la continuité de son activité pourra être assurée. Loin des plans théoriques de continuité, le télétravail a également un intérêt majeur : il permet de tester en configuration réelle, les aspects techniques d’un plan de continuité, basé sur l’ouverture de son système d’information vers l’extérieur. Il facilite la configuration des équipements, permet de mieux réfléchir aux droits d’accès et aux privilèges, aux questions de sauvegarde et d’assurer le bon usage de ces équipements au travers d’une charte informatique adaptée.
Pascal Rassat est le fondateur de CITICA. Il est également consultant et formateur spécialisé sur le télétravail. Il a accompagné de nombreuses entreprises privées et publiques, à la mise en œuvre et à l’évaluation d’expérimentations de télétravail. Il est auteur de deux ouvrages sur le télétravail parus aux éditions Territorial en 2011 et réédités en 2016, dont une méthodologie d’introduction du télétravail pour les organisations.
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