Internet, télévision et réseaux sociaux sont les canaux qu'utilise Brutus, l'émission créée par Emery Doligé et Pierre Abruzzini, pour rencontrer son audience. Le co-fondateur de Doctissimo, devenu «conseiller en digitalisation et communication», et le fondateur de l'agence de production Isegoria ont mis sur pied la première émission politique française diffusée sur Facebook Live et Free. En cela, le format propose au moins trois révolutions à travers une dimension participative, plurimédia et totalement spontanée pour le candidat invité.
Dès le numéro un, avec Alain Juppé, l'émission a enregistré 434 000 vues, dont 100 000 curieux sur le Live Facebook. A titre de comparaison, le maire de Bordeaux avait rassemblé 2,7 millions de téléspectateurs lors de son passage dans «L'Émission politique» sur France 2.
L’idée date de 2006 mais «il n’y avait pas la technologie et la puissance pour faire une telle émission», raconte Emery Doligé. Dix ans plus tard, les réseaux sociaux ont bouleversé l’approche digitale des médias. En 2016, près de la moitié des internautes utilisent les réseaux sociaux pour s'informer, selon le Reuters Institute of Journalism.
Depuis le 2 novembre, l’émission est diffusée en direct sur Facebook via la page de la chaîne publique France 24, qui veut doper sa communauté de 6,9 millions de fans. «Pour héberger le Live, il faut qu’il y ait une audience conséquente. Tout naturellement, je suis allé voir Sylvain Attal (NDLR : directeur adjoint de la rédaction de France 24, chargé des nouveaux médias), et nous sommes rapidement tombés d’accord», détaille Emery Doligé.
«Aucune contrainte éditoriale»
Brutus souhaite avant tout s’affranchir des contraintes imposées par la télévision. «Le conducteur est vierge, il n’y a aucune contrainte éditoriale», affirme Emery Doligé. L’émission se déroule en deux temps : un échange entre l’invité et le public puis un débrief de la rencontre. La durée initiale de l’émission est de 60 minutes, mais elle peut dépasser cette limite en fonction du débat amené par les citoyens, expliquent les deux créateurs. Lors de la venue d'Alain Juppé, Brutus -du nom du sénateur romain qui a trahi et poignardé Jules César- avait ainsi duré 105 minutes.
A chaque émission, les citoyens sélectionnés découvrent l’identité de l’invité politique en même temps que les internautes. Si Emery Doligé fait tourner la parole pendant l’émission, ce sont la trentaine de citoyens présents sur le plateau qui alimentent le débat. La production s'assure seulement que les personnes choisies ne refusent pas de voir l’invité, tout en conservant le secret autour de son identité. La parité et la représentativité des tranches d’âge sont également prises en compte par l’émission. Cependant, «aucune question d’ordre personnel ou politique» n’est posée par la production, affirme Emery Doligé.
10 000 euros par émission
Le format de Brutus a d’ores et déjà séduit Free. L’opérateur français a fait part de son intérêt pour Brutus après la première émission, le 2 novembre dernier. Le 8 décembre, Free a proposé l’émission sur son portail pour la première fois. Ce partenariat permet à Brutus de bénéficier de recettes publicitaires alors que le projet était jusque-là financé sur fonds propres par Emery Doligé et Pierre Abruzzini. Les frais de production s’élèvent aux alentours de 10 000 euros par émission.
Après Bruno Le Maire début novembre, c'est Yannick Jadot, candidat EELV à la présidentielle de 2017, qui s’est à son tour prêté à l’exercice début décembre. Une quinzaine d’autres candidats à la présidentielle devraient participer à l’émission d’ici le 23 avril, date du premier tour.
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