Bertrand DuperrinLes Experts

Comment mesurer l’expérience employé?

Par Bertrand Duperrin, expert FrenchWeb

L’expérience employé c’est un peu comme l’expérience client: tout le monde en parle mais peu la mesure. Au delà du pur qualitatif et de l’effet «Wow» on peine à mesurer et, surtout à identifier les axes d’amélioration. Une fois que le collaborateur dit «expérience bonne ou mauvaise», reste à savoir pourquoi, ce qui fonctionne ou pas.

La mesure de l’expérience employé pose en fait deux questions: celle de la nature de la mesure et celle des éléments mesurés.

L’expérience employé n’est pas le bonheur au travail

Je vois pas mal d’entreprises prendre le sujet par le biais de la satisfaction et du bonheur au travail. Cela me rappelle un peu l’époque, pas encore révolue, où tout le monde parlait d’engagement et ressortait les vieux baromètres de satisfaction.

Ici c’est un peu la même chose. Bien sur qu’on peut être satisfait avec une expérience employé de qualité et insatisfait avec une expérience insuffisante. Mais on peut être insatisfait avec une bonne expérience ou l’inverse. Ces situations «bizarres» peuvent être dues à des facteurs personnels, externes au travail, sur lesquels l’entreprise a peu de prise mais qui peuvent avoir une incidence sur la vie et le comportement au travail du collaborateur. Certains collaborateurs se satisferont aussi d’une expérience médiocre car ils sont nouveaux, motivés, voire ont connu pire avant, mais ça n’est pas durable et finira par s’étioler dans le temps. De plus ça n’est pas parce que le collaborateur se contente de ce qu’il a que l’entreprise n’a rien à gagner à travailler sur une expérience qui est vectrice de plus d’engagement et d’efficacité.

Les axes de l’expérience employé

Si vous voulez un modèle bien pensé et tout fait je vous recommande la lecture du livre de Jacob Morgan sur l’expérience employé.

Pour ma part (mais tous les modèles ne sont que des axes de travail et demandent à être discutés, adaptés, améliorés), je vois un certain nombre d’axes à mesurer plutôt que de traiter l’expérience employé comme un tout.

• L’entreprise donne-t-elle au collaborateur les moyens de faire son travail efficacement et sans heurts et complexité inutiles (simplicité, efficacité)? Cela touche d’ailleurs aussi bien le collaborateur que le candidat. On parle ici d’outils, de process, de management. On parle aussi d’alignement par ce qui est promis au client tant en termes de moyen que de symétrie des attentions.

• Le collaborateur est-il heureux dans son environnement de travail? On adresse ici des facteurs exogènes au travail lui-même comme l’ambiance, la qualité de l’environnement de travail, les services et bénéfices fournis par l’entreprise, les rapports avec les autres. L’équilibre vie pro/perso joue également son rôle ici.

• Le collaborateur se sent-il sur une trajectoire? Subit il sa carrière ou sait il comment il peut évoluer à terme et comment? Le met-on dans une logique de progrès et de continuité ou joue-t-on avec lui comme avec un bloc de Tetris en le bougeant, le retournant et l’empilant sans ligne directrice dans le collectif en fonction des contraintes du moment. Et, à chaque moment de sa carrière, est-il rémunéré légitimement par rapport à sa contribution, ses performances, son passé, ses pairs?

• Le collaborateur vit-il quelque chose d’unique (ie: propre à son employeur, qu’on ne retrouve pas ailleurs)? Je pense que pour une expérience employé de qualité il y a des «must have» qu’on retrouvera partout. Par contre ils pourront être interprétés différemment selon l’entreprise, sa culture, ses valeurs. Et puis il y aura des choses uniques qui correspondent au croisement de la culture, de l’identité et du métier. L’objectif ici est de montrer une cohérence entre l’expérience et le discours et avoir ce petit quelque chose qui fera dire au collaborateur, à l’extérieur, «dans ma boite c’est vraiment pas comme ailleurs». Quand on connait l’impact de ce que le collaborateur partage à l’extérieur de l’entreprise sur la marque employeur….

Quand on donne à un collaborateur les moyens de réussir sa mission, un contexte de travail agréable, qu’on le rend acteur de sa carrière et qu’une ou deux choses lui font parler positivement et spontanément de son entreprise autour de lui on peut penser qu’on a une expérience employé de qualité.

L’expérience employé: mesure quanti ou quali?

Alors vient la question de comment on mesure? La norme semble être à la mesure quantitative par le biais de baromètres ou qualitative au travers d’interviews. Finalement on fait émerger un ressenti global, chiffré ou non mais on ne mesure rien à proprement parler. Par mesure j’entends par rapport à un référentiel dépourvu de biais de ressenti ou d’interprétation. Pour autant en prenant le sujet méthodologiquement on peut mesurer ce que l’entreprise a fait sur certains axes, ce qui complète utilement le ressenti des collaborateurs, la perception qu’ils en ont. En effet tout n’est pas visible en la matière mais si quelque chose est fait et ses conséquences pas ressenties soit c’était inutile, soit c’était mal fait, soit on a mal communiqué dessus.

On peut aussi mesurer l’effort de simplification (nb de process digitalisés, d’étapes supprimées, de règles supprimées etc.) et mettre ça en regard de la perception des collaborateurs. On peut aussi mettre en place un système de remontée d’irritants (ressenti) et mesurer le nombre d’actions correctives mises en place.

Mesurer l’expérience employé c’est bien, mesurer ses effets c’est mieux

Ce qui nous amène à une troisième étape. Après avoir mesuré l’input (ressenti), son traitement, il reste à mesurer son impact, l’outcome. Là encore les items à mesurer ne manquent pas: efficacité/productivité, engagement, NPS…. ces outcomes vont bien sur dans une logique de boucle vertueuse venir alimenter les inputs dans une logique d’amélioration continue.

La mesure de l’expérience employé? Une affaire d’ambition

Vous l’avez bien vu, il y autant de choses à mesurer et de manière de le mesurer que vous le voulez. La vraie question est donc de savoir ce que vous cherchez à mesurer (votre définition de l’expérience employé, son scope) et ce que vous voulez en faire (en faire de beaux powerpoints ou piloter une démarche d’amélioration continue). Bref il n’y a pas de manière unique de mesurer l’expérience employé, elle dépendra juste de votre ambition en la matière.

L’expert:

bertrand-duperrinBertrand Duperrin est Digital Transformation Practice Leader chez Emakina. Il a été précédemment directeur conseil chez Nextmodernity, un cabinet dans le domaine de la transformation des entreprises et du management au travers du social business et de l’utilisation des technologies sociales.

Il traite régulièrement de l’actualité social media sur son blog.

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2 commentaires

  1. Les humeurs et les émotions sont étroitement liées. Elles affectent tout le monde et tous les aspects d’une entreprise, du PDG à l’équipe de direction en passant par les ventes et les ressources humaines. @Emolytics (www.emolytics.com), nous avons bien compris que demander l’avis des gens sans prendre en compte les émotions était peine perdue. C’est pourquoi nous proposons une plateforme innovante qui mesure l’expérience employé à travers le prisme des émotions.

  2. C’est le meilleur article sur l’expérience employé que j’aie jamais lu, et d’habitude je les trouve nuls à ch***.

    Bravo

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