Comment Airbnb permet à ses hôtes d’échapper au fisc
Les relations entre Airbnb et Bercy ne devraient pas se réchauffer de sitôt. Déjà dans le collimateur du ministère des Finances, qui chasse les hôtes profitant des plateformes d’hébergement entre particuliers pour générer des revenus occasionnels exorbitants, la firme américaine permettrait aux propriétaires de logements d’échapper au fisc. Pour cela, Airbnb propose aux hôtes une carte de crédit rechargeable qui permet de dissimuler les revenus issus de la location de leur bien au nez et à la barbe de l’administration fiscale française, selon une information dévoilée par Franceinfo.
Disponible gratuitement en ligne depuis son compte Airbnb, cette carte prépayée aux couleurs de la plateforme américaine permet à son titulaire de l’utiliser dans la limite du montant crédité par Airbnb. Pour la recevoir, il suffit de renseigner son numéro de passeport. Aucune copie de pièce d’identité n’est requise. Pour rappel, Airbnb ne vérifie pas l’identité de ses hôtes. Avec cette MasterCard, le propriétaire peut ainsi être payé pour la location de son logement. Dans la foulée, le détenteur de la carte peut retirer l’argent versé par Airbnb dans un guichet ou effectuer des achats. Ce dispositif est très prisé par les propriétaires vivant à l’étranger qui louent leur bien en France. Et pour cause, cette carte permet de faire des transferts d’argent à l’étranger avec des frais beaucoup plus avantageux que les virements bancaires internationaux.
Gibraltar au coeur du mécanisme d’évasion fiscale
Jusque-là, rien d’illégal… sauf que cette carte est émise par la société américaine Payoneer depuis Gibraltar. Ce petit territoire britannique de la péninsule ibérique est la clé du système dans la mesure où l’argent qui y transite échappe aux radars du fisc français, alors que les revenus issus de la location de logements entre particuliers doivent être soumis aux impôts. Concrètement, Airbnb paie les propriétaires français depuis le Royaume-Uni sur leur carte émise via Gibraltar, indique Franceinfo. Pour procéder ainsi, Payoneer a obtenu le statut d’Electronic Money Institution, qui permet à la société américaine de délivrer des moyens de paiement dans toute l’Union européenne. A ce jour, Payoneer revendique 4 millions de clients dans le monde, mais Airbnb ne précise pas la part de ses hôtes utilisant cette carte.
Face à ces accusations, Airbnb se défend d’encourager ses hôtes à frauder. «Nous leur rappelons la nécessité de s’informer des réglementations fiscales applicables, et de s’y conformer», a répondu la plateforme américaine à Franceinfo. Pour autant, le gouvernement ne semble pas décidé à accentuer la pression sur Airbnb, et ce malgré les tentatives du Parlement pour mieux encadrer la location de logements entre particuliers. Le 5 décembre 2016, le député socialiste Pascal Cherki avait notamment déposé un amendement, voté à l’unanimité en commission, pour imposer aux plateformes de type Airbnb de transmettre automatiquement les revenus des propriétaires qui louent leur bien à l’administration fiscale. Cependant, le gouvernement avais émis un avis dévaforable, invoquant des «problèmes techniques». Le 24 novembre dernier, nouvelle tentative, du côté du Sénat cette fois. Ce jour-là, les sénateurs avaient adopté à la quasi-unanimité une mesure pour fiscaliser les revenus supérieurs à 3 000 euros par an issus de la location sur les plateformes collaboratives, comme Airbnb et Drivy. Mais là encore, le gouvernement a donné un avis défavorable. En France, Airbnb revendique 400 000 logements proposés sur sa plateforme, dont 65 000 sont situés à Paris.
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