Industrie du futur: l’État consacre 500 millions d’euros aux PME
20 sept 2018 (avec l'AFP)
Incitations fiscales, accompagnement renforcé: le gouvernement a annoncé jeudi des mesures pour aider les petites et moyennes entreprises (PME) industrielles à rattraper leur retard dans la transformation numérique qui bouleverse leurs activités, un plan globalement salué par les industriels.
Mesure phare de ce « plan d’action », le retour du suramortissement, un avantage fiscal exceptionnel pour stimuler les investissements des entreprises en équipements de production. A l’inverse d’un dispositif similaire activé de 2015 à 2017, le suramortissement version 2019-2020 sera réservé aux PME et seuls les investissements dans la robotique et d’autres outils de transformation numérique (capteurs connectés, imprimantes 3D, réalité augmentée…) seront éligibles. Concrètement, le mécanisme permettra aux PME de déduire de leur résultat imposable jusqu’à 40% du prix de revient d’un nouvel équipement de production éligible. Soit jusqu’à 11% de réduction du coût de l’investissement, selon le gouvernement. Pour les petites entreprises, à l’inverse des grands groupes, « investir vers l’industrie du futur, se transformer (…) est toujours plus délicat« , a souligné le Premier ministre Edouard Philippe lors d’un discours au siège de Dassault Systèmes à Vélizy-Villacoublay (Yvelines).
Rattraper le retard d’investissement dans la robotisation
L’automatisation et la robotisation des procédés de fabrication « ne sont pas les ennemies de l’emploi, elles sont les conditions d’une compétitivité qui garantit la puissance de l’appareil industriel français, et donc le développement de l’emploi« , lequel va toutefois « changer de nature », a encore estimé M. Philippe, qui s’exprimait aux côtés du ministre de l’Economie Bruno Le Maire notamment.
« Il y a un retard d’investissement majeur par rapport à nos voisins comme l’Italie et l’Allemagne par rapport à la robotisation. Le suramortissement est un moyen de rattraper ce retard« , a déclaré à l’AFP Bruno Grandjean, président de la Fédération des industries mécaniques (FIM) et de l’Alliance pour l’industrie du futur. Epauler les PME pour s’engager dans la transformation numérique constitue une « nécessité absolue« , a souligné la confédération du secteur (CPME) dans un communiqué.
Le gouvernement s’est aussi fixé jeudi pour objectif d’accompagner la transformation numérique de 10 000 PME supplémentaires d’ici à 2022, en partenariat avec les régions, contre 5 200 PME actuellement. Par ailleurs, une mission présidée par le député LREM Bruno Bonnell, lui-même entrepreneur dans la robotique, a été chargée d’identifier d’ici à la fin novembre une centaine de « territoires d’industrie« , des zones qui seront prioritaires pour bénéficier de l’action publique en matière d’accès au très haut débit ou de formations par exemple.
Baisse de la fiscalité énergique, mise en conformité du régime fiscal des brevets…
Une baisse de la fiscalité énergétique pour les centres de stockage de données (« data centers ») a également été annoncée, afin de favoriser l’implantation de ces installations en France. Cet autre geste fiscal, qui figurera lui aussi dans le budget 2019, « n’a pas pour vocation d’augmenter la consommation électrique du secteur« , lequel s’est engagé à baisser de 15% sa consommation énergétique d’ici à 2022, a précisé M. Philippe. Ce dernier a aussi annoncé comme prévu la prochaine mise en conformité du régime fiscal français des brevets avec les règles de lutte contre l’optimisation fiscale, édictées par l’Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE) et reprises par l’Union européenne. Seuls les profits tirés d’innovations protégées par le droit d’auteur et ayant été conçues et développées en France pourront désormais bénéficier de ce régime fiscal attractif, au taux réduit à 15%. D’un autre côté, ce régime fiscal sera étendu aux recettes tirées de logiciels originaux protégés (licences d’exploitation), qui en étaient jusqu’alors exclues.
Le coût de l’ensemble des mesures annoncées jeudi a été chiffré à 500 millions d’euros, dont la moitié pour le suramortissement, le reste provenant de subventions via le Programme des investissements d’avenir (PIA). Les industriels ont néanmoins déploré un grand absent de ce « plan d’action »: l’allègement des impôts de production, des taxes locales diverses pour les entreprises et qui sont « un boulet » pour leur compétitivité, selon M. Grandjean. « Nous nous y attaquerons dès que nous aurons recouvré les marges de manoeuvre budgétaires » nécessaires, a de nouveau promis M. Philippe, comme en mai dernier. « Sur ce point, le Premier ministre nous a écoutés mais il ne nous a pas encore entendus jusqu’ici« , a réagi auprès de l’AFP Philippe Varin, président de l’organisation France Industrie, reconnaissant toutefois qu’il était « cohérent de fixer des priorités« .