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Comment vos émotions sont-elles manipulées à travers les réseaux sociaux ?

Par Grégory Pouy, expert FrenchWeb

Guy Philippe Goldstein est chercheur et intervenant à l’école de guerre économique  et est spécialisé sur la cyber sécurité et la manipulation des émotions.
Ce titre semble sortir tout droit de la série de science fiction Black Mirror et pourtant…
On a tous entendu parlé des scandales liés aux fake news, des trolls Russie ou encore de Cambridge Analytica.
Pourtant, la majorité d’entres nous ne savent pas bien comment tout cela fonctionne vraiment.

Est-ce que cette supposée manipulation n’est pas la « fake news » ultime après tout?
Guy Philippe va vous prouver que non et va vous donner envie de vous méfier encore un peu plus des réseaux sociaux et plus particulièrement de Facebook.
Mais à la fin de l’épisode il donne aussi une solution inattendue que ce soit pour les soucis climatiques ou la manipulation des émotions.

La manipulation des émotions sur Facebook est une réalité

D’abord il y a eu cette étude en 2014 de l’université de Cornell en association avec Facebook qui sans vraiment de déontologie a essayé de se rendre comprendre s’il pouvait influer sur les émotions des utilisateurs de Facebook. Test validé puisqu’ils ont réussi à rendre les gens plus ou moins heureux ou malheureux.
On a tendance à se concentrer sur ce qui est vrai ou ce qui est faux lorsque l’on voit les messages d’un tel ou d’un tel mais ce qui est oublié ce sont les émotions que cela génère.
Cambridge Analytica comme d’autres sociétés utilisent un standard d’analyse des traits de personnalité (Big Five) qui se base sur 5 grands traits: l’ouverture aux idées nouvelles, le fait d’être consciencieux, extraversion/introversion, l’empathie et enfin, le capacité à garder son calme.
Vous vous demandez sans doute comment on peut connaître ces éléments sur vous?
En réalité, votre activité sur les réseaux sociaux parle pour vous. En fonction de votre manière de partager, de commenter, de liker et bien sur en fonction du contenu sur lequel vous interagissez, il est facile de définir l’ensemble de ces éléments.
Si votre CSP peut expliquer jusqu’à 25% de vos agissements, votre profil de personnalité peut en expliquer jusqu’à 47% aujourd’hui.
Dans un premier temps cela permet de cibler les bons messages en fonction des profils des personnes mais ce n’est pas tout….

Déstabiliser la stabilité émotionnelle par la peur afin de favoriser la montée des extrêmes

En fait en amplifiant le sentiment de désordre de manière hyper ciblée, on peut faire basculer une personne avec un bon niveau de stabilité émotionnelle (vote pour un parti modéré) vers les extrêmes.
C’est exactement ce qui a été fait aux U.S. mais aussi dans les autres pays ou les politiques se sont mis à investir très largement sur Facebook à travers la publicité
Ils ont ainsi diffusé des messages de désordre.
Cela est d’autant plus facile que les messages négatifs (un message de peur) et surprenant se diffusent 10 fois plus que les messages positifs et non surprenants.
Ils ont également identifié que les personnes qui propageaient ces messages de peur étaient souvent isolées.
La capacité nouvelle pour ces personnes d’envoyer des messages à travers les réseaux sociaux leur permettent de créer une forme de lien sociaux à travers une audience.
Ce qui est très particulier comme le souligne Guy Philippe, c’est que les médias traditionnels sont réglementés mais pas Facebook.
Ors si la réglementation des médias traditionnels impose à ces dernier de proposer aux U.S. au moins 2h de messages objectif par jour, Facebook n’a pas d’obligation particulière.
Et dans la mesure ou pour un certain nombre de personnes, Facebook représente la seule source d’informations…on comprend facilement où se trouve le souci.
C’est donc tout l’intérêt des politiques extrémistes de décrédibiliser les médias traditionnels pour renfermer les personnes vers les réseaux sociaux et faire naitre chez eux, le sentiment dont ils ont besoin pour les destabiliser un peu plus.

Les réseaux sociaux ont détruit la résilience sociale

Comme l’explique Guy Philippe, la résilience sociale, c’est la capacité à avoir des liens avec des personnes proches et éloignées.
Au fondement de cette résilience sociale, on retrouve la nécessité de liens forts et des liens faibles mais également des liens qui permettent de connecter 2 endroits qui n’ont à priori rien à voir entre eux.
Les bulles créent par les réseaux sociaux ont cassé cette résilience sociale et cela bénéficie aux partis extrémistes bien sur car cela implique un renfermement sur soi et donc de la peur.
L’une des toutes premières étapes de la radicalisation, c’est la remise en cause du monde vu par les médias traditionnels nationaux.
De la même manière, il s’agit bien ici de manipulation des émotions puisqu’on essaie de casser le groupe pour renfermer les personnes vers un groupe plus sectaire.
On peut évidemment étendre la technique pour des raisons commerciales et comme le souligne Guy Philippe, si aujourd’hui, nous sommes capables de manipuler jusqu’à 70% des agissements à travers les CSP et les traits de personnalité, on peut imaginer que demain nous serons capables d’aller plus loin.
Se pose donc nécessairement une question d’éthique.
Ce qui est essentiel selon lui, c’est de permettre au consommateur de garder sa raison critique en maintenant leurs résiliences cognitives.
Pas certain de savoir comment atteindre cette mission si ce n’est en démantelant Facebook qui a pris une place trop importante. A la taille de l’Europe, nous avons encore un mot à dire.
A nous de nous faire entendre.

L’expert:

gregory-pouy

 

Grégory Pouy est le fondateur de LaMercatique, un cabinet de conseil de transformation digitale axé sur la partie marketing. Basé entre New York et Paris, il est «expert» marketing pour FrenchWeb.fr. Pour suivre ses écrits et échanger avec lui

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Un commentaire

  1. Et si on ajoute l’information « mainstream » déversée par les médias traditionnels, alors on comprends mieux ce besoin particulier qu’ont certains de s’isoler de ces propagandistes patentés, afin de se construire leur propres jugements. Or c’est ce qu’ont bien compris certain influenceurs véreux, qui se servent de cette forme de rébellion pour faire avancer leurs fumeuses théories. Le problème n’est pas tant que ces influenceurs investissent des réseaux d’information parallèle, mais que les médias traditionnels soient téléguidés par de puissants lobbyings.

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