Lisbonne et la technologie, une vision de l’intérieur
Par Clara Armand-Delille, fondatrice de ThirdEyeMedia
Pas un mois ne passe sans qu’un article sur le Portugal ne nous parle de ce pays comme de la meilleure destination de vacances, de la ville la plus sûre d’Europe et du dernier eldorado affichant les plus hauts rendements immobiliers. L’écosystème qui s’est construit autour des nouvelles technologies affiche une croissance soutenue et se densifie à grande vitesse. Plus de nouvelles entreprises, événements spécialisés et espaces de coworking ont été créés dans les douze derniers mois à Lisbonne que dans n’importe quelle autre ville d’Europe. Les talents et le capital-risque déferlent de tout le pays et de l’étranger.
De l’argent insufflé par le capital-risque et les grands événements dédiés aux nouvelles technologies
Le secteur des nouvelles technologies croît à un rythme deux fois plus soutenu au Portugal que dans les autres tech hubs européens : l’année dernière, 350 millions de dollars ont été investis au Portugal par les sociétés de capital-risque. Les chiffres récents indiquent que les investissements en private equity ont plus que triplé ces trois dernières années et atteignent aujourd’hui les 7 milliards d’euros, dans une économie en pleine reprise qui a besoin de capital.
Les organisateurs d’événements autour de la tech choisissent Lisbonne, notamment le Web Summit, la plus grande rencontre mondiale du secteur, qui a choisi de s’y établir pour les dix prochaines années après déjà trois ans ici. Cela devrait attirer 80 000 professionnels à l’Altice Arena et générer 3,5 milliards de dollars de recettes sur cette période. Grâce au Lisbon Investment Summit organisé au mois de juin, Lisbonne figure parmi les villes européennes à la pointe de la technologie. C’est l’occasion pour les start-up locales de présenter leur projet à des investisseurs étrangers. Récemment, Dig publishing, Go Youth ou encore Singularity University ont également choisi la capitale portugaise pour installer leur siège ou leur branche.
Lisbonne et son riche vivier de talents mondial
Le système éducatif portugais produit de jeunes talents hautement qualifiés destinés à travailler dans le secteur des technologies. Il est l’un des meilleurs systèmes européens et, plus que tout autre pays en Europe, il met l’accent sur l’acquisition de compétences technologiques. Les principales villes universitaires du pays disposent toutes d’un institut technique et, rapporté au nombre d’habitants, le nombre d’ingénieurs diplômés chaque année est bien supérieur à celui de nombreux pays : les jeunes diplômés du Politecnico Institute de Braganca, d’UpTec à Porto, du Tecnico, de l’Instituto Politecnico de Lisbonne et du nouveau campus de Nova School of Business and Economics de Carcavelos en périphérie de Lisbonne, se comptent par milliers chaque annee. Il n’est donc pas étonnant qu’avec une économie lisboète en pleine effervescence, de nombreux jeunes portugais diplômés choisissent de rester travailler au Portugal plutôt que de tenter leur chance à Londres ou Paris, par exemple.
En outre, on observe au Portugal en général, et à Lisbonne en particulier, une forte augmentation du nombre de professionnels internationaux, aussi bien des jeunes diplômés que des dirigeants expérimentés tels que Felix Petersen chez Faber Ventures, Simon Schaefer chez Startup Portugal et Rohan Silva qui a quitté Londres il y a quelques années pour lancer Second Home au Portugal.
Se lancer à Lisbonne, c’est chose facile si l’on en croit le nombre grandissant de personnes qui choisissent la capitale portugaise
La ville n’a de cesse d’absorber un nombre croissant de nouvelles entreprises et les aide à se développer. Ainsi, il est plus rapide et plus facile de lancer une start-up à Lisbonne que dans bien d’autres pôles technologiques urbains. Beta-i, l’un des premiers espaces de coworking et accélérateurs de Lisbonne les plus dynamiques, a triplé de taille au cours des 12 à 18 derniers mois et compte aujourd’hui autour de 70 salariés. Des dizaines de nouveaux espaces de travail ont ouvert cette année, parmi lesquels Heden, IDEIA, et Cowork Lisboa. Soho House, un member’s club, a récemment annoncé l’ouverture d’une antenne à Lisbonne en 2020. Enfin, la ville a annoncé le lancement d’ici à la fin de l’année de Beato Creative Hub, un gigantesque campus de 35 000 mètres carrés au sein duquel travailleront quelque 3 000 personnes.
Trouver des bureaux pour accélérer la croissance de son entreprise ou se lancer en indépendant n’a jamais été aussi facile grâce au dynamisme de la scène technologique locale. Des dizaines de start-up internationales choisissent Lisbonne pour y établir leur siège. Des fondateurs internationaux comme ceux de Linkilaw, JungleAi et Yoochai, ont décidé de démarrer leur activité ou de transférer leur siège à Lisbonne. L’entreprise James basée à New York et spécialisée dans l’intelligence artificielle a ouvert des bureaux ici, tout comme Veniam après une levée de fonds de 26,9 milliards de dollars cette année.
Même les grands groupes élisent la ville aux sept collines pour renforcer leur croissance sur le long terme. Ainsi, Daimler inaugurera bientôt un immense pôle technologique et Google a annoncé le lancement d’un pôle d’ingénierie à Oeiras, à quelques pas des sublimes plages de Lisbonne, avec un objectif de 500 créations d’emplois dans les prochains mois.
Un taux de réussite supérieur à la moyenne pour les start-up de la première génération
Lisbonne peut s’enorgueillir de son succès. La première vague de start-up est arrivée il y a cinq à dix ans, alors que personne ne croyait dans le potentiel du Portugal en tant que centre high-tech, et que la crise économique faisait rage accompagnée par une baisse des salaires et des perspectives économiques moroses. Avec discrétion, elles se sont lancées, seules, perfectionnant leur produit sur l’un des marchés les plus difficiles et milieu de l’une des pires crises économiques de l’histoire contemporaine du pays. Pour pouvoir grandir, ces start-up ont dû envisager l’international dès leur création et surmonter les obstacles posés par la diversité linguistique, juridique et culturelle en Europe.
Nombreuses sont ces entreprises pionnières qui ont acquis une notoriété internationale comme TalkDesk, Uniplaces, Unbabel, Codacy, Farfetch ou Hole19. Parmi elles, certaines sont en passe de devenir des licornes. Ainsi, Outsystems a levé cette année 360 millions de dollars auprès de Goldman Sachs et de KKR et est valorisée à un milliard de dollars.
Si l’argent disponible et l’attention portée à Lisbonne sont enivrants, l’un de ses plus précieux atouts réside dans ces premières start-up qui ont réussi à se développer. Tout comme elles sont parvenues à se hisser discrètement au rang d’entreprises reconnues à l’international en s’implantant à Londres, New York (Codacy) ou San Franscisco (Unbabel), les entreprises de technologie les plus florissantes de Lisbonne partagent leur expérience et les meilleures pratiques, essentielles à la réussite et à la pérennité d’une ville high-tech comme Lisbonne.
La contributrice
Clara Armand-Delille est la fondatrice de ThirdEyeMedia, une agence de conseil en communication stratégique et relations presse dédiées aux startups et fonds de capital risque. Avec plus de 10 ans d’expérience dans l’industrie, et des rôles auprès de Google, Accel Partners et iZettle, Clara a su mener avec succès le développement de startups en Europe, aux Etats-Unis et en Amérique Latine, organisant des lancements sur de nouveaux marchés, des annonces de levées de fonds et des campagnes de communications à l’échelle régionale ou internationale.
Parmis ses clients actuels ou précédents, ThirdEyeMedia compte TransferWise, GoCardless, ZipJet, TechTour, 360 Capital Partners, Cubyn, Tramonex, Badoo, FoodCheri, Le Slip Francais, Navya et PayFit.