Qui est Hideo Kojima, rock-star des salons de jeu vidéo?
AFP
Jour J pour la communauté mondiale des « gamers » qui guette depuis des années l’intriguant « Death Stranding », un jeu qui sort vendredi et qui ressemble à son créateur, le très cinéphile Hideo Kojima. Ce Japonais de 56 ans est jusqu’à présent surtout connu pour avoir créé la franchise à succès « Metal Gear », pionnier des jeux d’action dits d’infiltration, consistant à accomplir une mission en privilégiant la discrétion et la stratégie, même si le combat direct n’en est pas absent.
Kojima a grandi dans une famille passionnée par le septième art, dont le rituel était de voir ensemble un film chaque soir, avec une prédilection pour les westerns, les longs métrages européens et les films d’horreur. « Je n’avais pas le droit d’aller au lit avant la fin du film: c’était l’inverse de ce que la plupart des enfants connaissent», confiait-il en 2012 au quotidien britannique The Guardian. A partir de ses dix ans, ses parents l’incitent à aller seul au cinéma, en lui payant son billet à condition qu’il leur raconte après ses impressions sur le film.
A l’université au début des années 1980, il opte d’abord pour des études d’économie, faute d’avoir trouvé le moyen de travailler dans le monde du cinéma, avant de se tourner vers les jeux vidéo, dont il pressent immédiatement les connexions possibles avec sa passion première. Mais ce choix de carrière n’a rien d’évident à l’époque. Sa mère le soutient, pas ses amis, qui le traitent de fou. Il décide alors d’entrer chez Konami, en pensant que cette entreprise qui était alors le seul éditeur de jeux vidéo coté en Bourse au Japon, lui conférerait un certain statut social.
Des jeux aux dimensions cinématographiques
En 1987, un an après son arrivée chez Konami, son premier « Metal Gear » sort au Japon. Les aventures de son héros, le soldat d’élite Solid Snake, connaîtront de nombreuses suites, dont « Metal Gear Solid » en 1998, premier de la série à s’exporter. Ce sera un énorme succès tant commercial que critique. Dès « Metal Gear », Hideo Kojima développe la dimension cinématographique de ses jeux, qui va devenir sa marque de fabrique. Reste que la violence et des images à connotation sexuelle voire sexiste apparaissant parfois dans ses jeux lui ont valu des critiques, écornant un peu son image de créateur de génie.
En 2015, il quitte Konami pour diriger son studio Kojima Productions en toute indépendance. De nombreuses spéculations ont entouré son départ, certains évoquant notamment le désir quasi obsessionnel du créateur de contrôler de A à Z la production de ses jeux. Mais cette décision risquée n’a pas été facile à prendre: sa famille était contre, et les banques réticentes à lui prêter de l’argent, malgré sa solide réputation internationale, a confié Hideo Kojima dans les médias.
Depuis trois ans il était célébré comme une rock-star à chacune de ses apparitions dans les grands salons mondiaux du jeu vidéo, de l’E3 de Los Angeles au Tokyo Game Show en passant par la Gamescom de Cologne (Allemagne), distillant savamment des bribes nébuleuses de son nouveau projet Death Stranding, conçu pour la PlayStation 4. Pour ce jeu aux accents cinématographiques encore plus marqués -les acteurs Norman Reedus (« Walking Dead »), Léa Seydoux (« La Vie d’Adèle », « 007 Spectre ») et Mads Mikkelsen (« Casino Royale ») prêtent leurs visages aux personnages principaux- Hideo Kojima explique s’être inspiré de l’actualité politique mondiale, comme le projet de mur de Donald Trump à la frontière mexicaine et le Brexit.
Mais aussi d’éléments plus personnels: « Je suis très enclin à la solitude. Je pense qu’il y a des gens comme moi dans le monde, notamment parmi les fans de jeux vidéo (…). Ils n’ont pas l’impression d’être intégrés dans la société ou dans leur entourage« , a-t-il dit dans un récent entretien à la BBC. Death Stranding est un jeu sur les connexions humaines, où le joueur doit relier des agglomérations isolées et une société fragmentée dans un monde hostile. « Donc quand ces gens joueront à ce jeu, ils réaliseront que des gens comme eux existent dans le monde entier», espère son créateur. « Savoir que même si je suis seul, il y a d’autres gens comme moi, ça fait du bien».
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