Recrutement: comment attirer les talents du numérique?
[Spécial semaine de l'emploi dans le numérique]
2020 ne fera aucune exception à l’année précédente, attirer les talents du numérique reste une tâche difficile. «C’est même un peu plus dur », estime Emmanuel Stanislas, fondateur du cabinet de recrutement Clémentine. «Car avant, ceux qui recrutaient étaient les acteurs de la nouvelle économie alors qu’aujourd’hui cela concerne aussi ceux de l’économie traditionnelle».
Une difficulté qui est une réalité même en dehors des très rares profils de développeurs dont Martin Villelongue, directeur exécutif pour Michael Page et spécialiste des recrutements dans les métiers du digital, rappelle qu’il y a en moyenne 4 profils pour 10 offres… Ainsi, à des échelles différentes, la problématique concerne tous les métiers qui se transforment avec le numérique: expérience client, data, marketing…
Soignez votre processus de recrutement comme vous le faites pour le parcours client
«Nous sommes dans une guerre des talents, il faut être le meilleur. Il ne suffit pas de faire ce qu’il faut», pose d’emblée Emmanuel Stanislas. La bonne nouvelle est que toutes les entreprises peuvent sortir du lot, peu importe leur taille ou leur niveau de notoriété. Pour y parvenir, une ligne de conduite en fil rouge peut accompagner tout le processus: il s’agit d’appliquer les techniques utilisées en parcours client au recrutement.
«Un certain nombre d’entreprises se disent qu’elles vont utiliser ce qu’elles savent sur la façon d’attirer des clients et ainsi travailler tous les points de contact», développe le fondateur de Clémentine. L’idée est de réfléchir à l’ensemble du parcours des candidats et de repérer où il pourrait y avoir des accrocs, de la même façon qu’est pensé l’ensemble du parcours client afin de ne pas le perdre en chemin. Une multitude de facteurs peuvent pousser des candidats, en particulier les talents du numérique qui sont très sollicités, à abandonner pour privilégier une autre piste: processus trop long, peu clair, onboarding raté… Ce sont ces points de contacts qui vont être développés tout au long de cet article. L’expérience candidat est devenue aussi importante que l’expérience client.
En amont
Marque employeur: personnalisation du discours et authenticité
La marque employeur est un sujet à plusieurs dimensions et dans un marché aussi tendu que celui des talents numériques, aucune ne peut être laissée de côté. Dans la catégorie de celles qui paraissent plus difficiles à maîtriser se trouve l’habitude qu’ont pris les candidats d’aller consulter les avis d’anciens ou d’actuels collaborateurs, sur différents sites Web comme Glassdoor. Il ne fait plus aucun doute que ces avis peuvent réellement peser dans la décision finale du candidat, en particulier pour une génération qui a pris l’habitude d’y avoir recours, au quotidien, pour des choix moins impactants que leur future entreprise: pour choisir un restaurant, un hôtel… «Le discours du patron s’apparente à du ‘pitch’ tandis que celui d’une autre personne est du témoignage. C’est important aujourd’hui dans l’économie d’Internet», résume Emmanuel Stanislas. Et pour avoir de bons commentaires, il n’y a pas de miracle. Il faut soigner son processus de recrutement, l’intégration des collaborateurs, l’expérience employée…
L’autre facette à travailler est ce que Martin Villelongue préfère appeler la « marque recruteur ». «C’est un marché de l’Intuitu personæ, le recruteur doit travailler son discours». Les outils pour le faire son à la portée de tous les types de structures. « Aujourd’hui, avoir de la visibilité en ligne est important. Il faut avoir une stratégie de contenus. Cela permet au recruteur de se positionner comme expert », développe Martin Villelongue. L’entreprise doit aussi apprendre à parler d’elle, de sa marque. Pour Emmanuel Stanislas, rien ne remplace l’authenticité. Le but n’est pas de plaire à tout le monde mais aux candidats susceptibles de se plaire dans votre environnement. Et puis, le décalage entre les discours et la réalité se voit très vite, au détriment de l’entreprise. Chaque structure doit apprendre à se raconter: comment les salariés travaillent chez elle? Comment elle souhaite évoluer ou grandir? Quelles sont les dimensions des postes? «C’est difficile, parce qu’il faut répondre un peu à toutes les questions pour tous les postes», reconnaît Emmanuel Stanislas. Mais cela est tout à fait possible.
Le sourcing
Parler le même langage que les candidats
Le point clé consiste à rédiger une annonce dans laquelle le candidat va se reconnaître. «Il faut savoir travailler la définition du poste avec son langage, notamment en y intégrant une touche plus digitale», conseille Martin Villelongue. S’entourer d’un opérationnel pour la rédaction de l’annonce est une bonne façon de ne pas viser à côté et d’éviter de ne s’appuyer que sur une définition générique du poste.
Soyez un futur partenaire à l’écoute
Avant de s’intéresser à « où » trouver des candidats, il est important de réfléchir à la façon dont vous comptez leur parler. Pour Martin Villelongue, le recruteur doit désormais se considérer comme « un partenaire à l’écoute ». C’est-à-dire « savoir identifier le parcours du candidat, les différentes étapes et lui proposer plus une prochaine étape de carrière qu’une offre ». Il s’agit donc d’être dans une posture d’écoute pour bien comprendre les attentes du talent en question et voir si vous pouvez y répondre. «Un candidat dans le numérique, il n’y a pas que la rémunération qui l’intéresse. La richesse des missions, les personnes avec lesquelles il sera amené à travailler… sont également des éléments importants», rappelle Martin Villelongue.
Une recherche, 4 leviers
Pour la question de savoir où trouver ces talents du numérique, il n’y a pas de miracle, multiplier les différents canaux de recrutement est toujours la technique la plus efficace. «L’advertising est important même si le marché français reste un marché de jobboard», constate Martin Villelongue. Deux options à compléter avec votre propre vivier de CV. «Mais les entreprises ne peuvent pas se permettre de perdre du temps et doivent aussi privilégier l’approche directe», complète le directeur exécutif de Michael Page. À vous la chasse sur LinkedIn, notamment. En effet, pour un poste comme data scientist, par exemple, les entreprises ne reçoivent parfois qu’une dizaine de CV, activer les différents leviers dès le début permet d’optimiser la recherche.
Au cœur du processus
Mettez du rythme dans votre recrutement
Une fois le candidat repéré et approché, pour un processus efficace, l’entreprise doit être agile en sachant s’adapter aux disponibilités du candidat, tout en étant rapide. «Il faut aller vite dans un un contexte de marché tendu où les candidats à l’écoute ont deux/trois offres en même temps », développe Martin Villelongue. Mais attention, il ne s’agit pas non plus de se précipiter. D’ailleurs, « le candidat a aussi besoin de nourrir sa réflexion», rappelle Emmanuel Stanislas. Pour ce dernier, en fait, un parcours bien huilé est un processus « où il y a un rythme ». «Il faut apporter de la valeur à chaque étape », insiste-t-il. Vouloir que le candidat rencontre différentes personnes de l’entreprise a du sens. En revanche, il est important qu’ils repartent à chaque fois avec des informations différentes et supplémentaires. Ne le faites pas venir pour rien.
Une façon de réduire les étapes ou de s’assurer qu’elles sont bien toutes pertinentes est de regrouper certaines personnes au sein du même rendez-vous, par exemple en lui faisant rencontrer le DRH et le CEO ensemble. «L’idée est d’avoir 3-4 étapes maximum», mesure Martin Villelongue. Sachant que les candidats sont maintenant habitués à ce que certaines d’entre elles, en particulier au début, aient lieu à distance.
L’après
Tout le monde en piste
«Cela ne sert à rien de recruter à grand frais si c’est pour ne pas réussir à retenir les talents», insiste Emmanuel Stanislas. Les conseils sont plutôt classiques, pourtant certaines entreprises semblent encore ne pas avoir pris la mesure de l’importance du parcours d’intégration, qui commence dès la première journée. Un poste dédié et propre, des outils fonctionnels, une journée planifiée et expliquée, un déjeuner organisé… «Il faut lui consacrer du temps, qu’il soit avec une personne de telle à telle heure, qu’il ne se retrouve pas seul à l’heure du déjeuner, etc ». « On n’a rien inventé», accorde Emmanuel Stanislas. Cela doit être un réflexe.
Mettre des metrics dans son processus
Qui prend vraiment le temps d’évaluer son processus de recrutement? Pourtant, mettre en place des indicateurs et les interpréter peut vraiment permettre à l’entreprise de faire un bond en avant, d’être encore plus efficace pour le prochain recrutement et celui d’après… «Combien de personnes ont été contactées? Combien ont été sélectionnées? À quel moment certains candidats ont abandonné…», décrit Emmanuel Stanislas.
Ce type de d’indicateurs est particulièrement intéressant pour ceux qui ont d’importants volumes de recrutement. Par exemple, si les candidats abandonnent souvent au même stade, il est important de savoir pourquoi… Peut-être qu’il faut changer d’interlocuteur ou de façon d’aborder cette partie… Encore une fois, il s’agit de rendre le processus de plus en plus fluide, pour recruter toujours plus efficacement.
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