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Coronavirus: les entreprises de la Tech face aux défis du télétravail

AFP

« Plus besoin de passer une demi-heure dans un bus bondé et je peux cuisiner chez moi », s’enthousiame Polina Berenstein, une des dizaines de milliers d’employés de la Tech qui ont troqué les open space pour un coin de table chez eux. Sans regrets. Comme Google, Apple, Facebook et la majorité du secteur du numérique, son entreprise informatique recommande à ses salariés de se mettre en télétravail, pour lutter contre la propagation du nouveau coronavirus. Chez Twitter, c’est même devenu une obligation pour les près de 5 000 employés du réseau social dans le monde.

« C’est une décision sans précédent, mais nous vivons aussi une époque sans précédent », a justifié la vice-présidente Jennifer Christie dans un communiqué en ligne mercredi. Même sans y être forcée, Polina a sauté sur l’occasion. Certes, les chiens des collègues lui « manquent » – à San Francisco beaucoup de sociétés autorisent les animaux de compagnie – et il n’est pas toujours évident de coder sur l’écran de son ordinateur portable. Sans compter les distractions dans sa grande maison, qu’elle partage avec neuf autres personnes, pour la plupart aussi en télétravail à cause de la pandémie.

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« Nous n’avons pas tellement d’espace commun alors je vais travailler au café, où c’est plus facile de me concentrer. J’espère juste que ça ne va pas être interdit…», raconte cette ingénieure informatique de 27 ans. Elle adopterait bien ce mode de vie sur le long terme: « On irait au bureau un ou deux jours par semaine. Et le reste du temps on travaillerait de chez soi!»

Une différence dans les négociations

Dans le quartier des affaires de San Francisco, de nombreux immeubles ont été désertés. Les rares visiteurs sont accueillis par des flacons de solution hydro-alcoolique en libre-service, comme à l’hôpital. Le « touché du coude », pour se saluer, est réservé aux intimes. Chez Google à l’heure du déjeuner jeudi, une seule table de pique-nique avait trouvé preneur, un employé qui tire son parti de la situation: « Il n’y a pas la queue pour manger! », se réjouit-il. Tout le campus coloré ressemblait à une ville fantôme, à part quatre salariés intrépides, réunis pour une partie de volleyball en plein soleil.

Sur le parking de Facebook, les navettes de l’entreprise, qui relient notamment San Francisco au siège dans la Silicon Valley, arrivaient et repartaient vides. A Oakland, Martha Lackritz-Peltier, avocate chez TechSoup, peut désormais travailler de son lit pour commencer la journée, puis de son jardin, sous la mangeoire où viennent picorer des colibris, ou étaler ses dossiers dans la salle à manger, quand la lumière devient trop aveuglante.

« Franchement, j’étais soulagée quand la nouvelle est tombée, parce que j’avais beaucoup de déplacements prévus en mars », dit-elle en se préparant un thé. « Je me sens plus productive, Je rattrape des dossiers en retard », ajoute-t-elle. Mais elle s’inquiète pour la communication. « Même si les visioconférences sont de très bonne qualité, dans les négociations ça fait une énorme différence de pouvoir lire le visage de la personne en face ».

Outils collaboratifs

Les spécialistes des technologies, du cloud et des réseaux sont bien placés pour organiser le travail à distance, contrairement aux secteurs plus traditionnels ou aux services en personne. Mais les écueils restent nombreux. Le télétravail brouille les frontières entre vie privée et professionnelle, et cela va empirer à mesure que les écoles ferment et que toute la famille se retrouve coincée à la maison. Les Tollner ont pris les devants. David dirige sa firme juridique depuis la chambre d’amis, où sa femme l’a mis en quarantaine quand il est rentré d’une conférence à Baltimore avec une toux sèche.

Elle lui envoie des textos pour le prévenir que son petit-déjeuner l’attend derrière la porte. « Je suis dans mon donjon à attendre ma ration », s’amuse-t-il. « C’est probablement juste un rhume, mais ça l’a terrorisé, et tant mieux – il n’est pas aussi alarmiste que sa femme », relate Mitra Ahani, épouse, gardienne improvisée et directrice d’un centre d’éducation spécialisée, qu’elle gère désormais à distance.

Confinés ou pas, les équipes ont recours aux outils collaboratifs (comme Slack) pour avancer sur leurs projets. Les réunions virtuelles permettent de démarrer la journée et les messageries internes tiennent lieu de machine à café. « Cela demande aux managers de changer de posture, de regarder le résultat au lieu de surveiller tout le temps », analyse David Bchiri, directeur de la société de conseil Fabernovel aux Etats-Unis. Mais gare à l’isolement, selon un porte-parole de Slack. « C’est la plus grande menace pour l’engagement et la motivation des salariés, et ça peut survenir petit à petit, de façon silencieuse ».

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