Coronavirus: comment le commerce automobile se réinvente dans la crise
AFP
Après des semaines de confinement forcé, le commerce automobile mis à terre par le coronavirus se réinvente sur Internet dans un monde où les relations en ligne et sans contact sont devenues la nouvelle normalité. C’était prévu avant la crise, mais on peut y voir un symbole de la révolution en cours. Citroën a ouvert lundi, uniquement en ligne, les précommandes d’Ami, son nouveau mini-véhicule électrique urbain. Via les sites du partenaire Fnac Darty ou sur des applications dédiées, l’objet sera configuré, financé et commandé de façon entièrement dématérialisée.
Au moment où les concessions automobiles rouvrent dans une grande partie de l’Europe et s’inquiètent de la faible affluence des acheteurs, encore inquiets des risques de contamination, le commerce en ligne s’impose comme une évidence. Chez PSA, maison mère de Citroën, mais aussi de Peugeot et DS, un cap majeur a été franchi fin avril. Le groupe a lancé un nouvel outil de vente en ligne qui permet désormais de réaliser l’achat automobile entièrement depuis chez soi sur l’ensemble de la gamme, y compris la reprise d’un ancien véhicule et le financement en location avec option d’achat. « On voit bien qu’il y a aujourd’hui une demande de plus en plus forte de clients qui disent: je suis habitué à faire mes achats en ligne, je connais les produits et je n’ai pas forcément besoin d’aller voir un concessionnaire », a expliqué à l’AFP Thierry Koskas, directeur des ventes et du marketing de PSA.
Le réseau de distribution reste étroitement associé à la démarche, notamment pour effectuer la remise du véhicule, même si la prestation va parfois, et de plus en plus, jusqu’à la livraison à domicile. En avril, Fiat Chrysler, désormais fiancé au constructeur français, a commencé à déployer dans plusieurs pays européen son programme « distributeur virtuel » qui met en place des visioconférences entre un client potentiel et un revendeur pour l’accompagner dans son projet d’achat. « Le développement actuel du travail à domicile va probablement faire évoluer les modalités d’achat pendant et après la crise », estime le groupe. Toujours au mois d’avril, le japonais Toyota a proposé la réservation en ligne de la dernière génération de sa citadine hybride Yaris. Tous les constructeurs ont multiplié ces dernières années les expérimentations au moins sur quelques séries limitées.
Le modèle Tesla
Mais le phénomène est en train de se généraliser sur le modèle du spécialiste des voitures électriques Tesla. Alors que l’automobile a longtemps été réputée trop complexe et coûteuse pour être vendue sur Internet, le jeune constructeur californien en a fait dès l’origine son principal canal de vente. En Europe, trois quarts de ses clients commandent déjà depuis chez eux. Sur certains marchés, comme en Chine ou en Italie, Tesla propose même des « essais sans contact ». Une personne vient sur un site de vente, passe un coup de téléphone, on lui déverrouille la voiture à distance et à l’intérieur un tutoriel explique la marche à suivre. Le groupe californien travaille actuellement à développer les « chats » en ligne et les visioconférences avec un conseiller.
La tendance bouscule le modèle traditionnel de la distribution automobile qui s’appuie sur des réseaux indépendants, désormais contraints de se réinventer. « Il est probable qu’on aille de plus en plus vers la vente en ligne, jusqu’à l’acte d’achat », reconnaît Jean-Patrice Bernard, patron du groupe Bernard qui compte 102 points de vente en France pour plusieurs marques, dont Renault, Mercedes et Nissan. Il prévoit « des concentrations » dans ces métiers qui vivent cependant aussi de l’après-vente. « L’expérience en concession reste primordiale » aujourd’hui, souligne Guillaume Crunelle, expert automobile chez Deloitte.
Mais, selon lui, la crise « a poussé à la fois les consommateurs et les constructeurs à se tourner vers le digital dans une phase d’expérimentation forcée » et les comportements vont durablement changer. Une étude de son cabinet de consultants menée début mai dans 14 pays dont la Chine, les Etats-Unis et la France, révèle que 15% des personnes interrogées affirment envisager un achat uniquement en ligne pour leur prochain véhicule. « C’est une tendance tout sauf marginale » qui rend la vente en ligne « probablement obligatoire demain pour tous les constructeurs », estime M. Crunelle.
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