Loin des fantasmes, pourquoi les futures smart cities ne seront pas des villes 100% Tech
Interview de Flavien Vottero, directeur d’études spécialisé dans les nouvelles technologies et le service aux entreprises pour Xerfi
Après des années fastes de 2008 à 2018, le marché de la smart city entre dans une nouvelle ère. Il «s’assagit», selon les conclusions du cabinet d’analyses Xerfi. «Le marché de la smart city en France arrive à un certain niveau de maturité», explique Flavien Vottero, directeur d’études spécialisé dans les nouvelles technologies et le service aux entreprises pour Xerfi et auteur du rapport*. «Il y a eu beaucoup d’expérimentations, de projets de R&D qui sont partis un peu dans tous les sens. C’était une période où tout le monde- les startups, les grands groupes- essayait de pousser sa technologie pour se développer. Aujourd’hui, les municipalités ont eu les premiers retours d’expérience. Cela leur permet de choisir les technologies les plus rentables et celles qu’elles veulent vraiment pousser».
Signe de cette rationalisation, le nombre de projets qui a drastiquement baissé en ce qui concerne les 40 plus grandes agglomérations françaises. Après une augmentation régulière pour atteindre plus de 250 projets à son apogée, le marché a subi une diminution à partir de 2019 qui s’est accentuée en 2020 avec une baisse de 60%. Un phénomène qui s’explique aussi par les effets du cycle électoral et la crise, rappelle Xerfi.
Les municipalités ont appris ce qu’était la smart city, elles se sont organisées
« Des pôles ont été créés avec des responsables smart cities. Les villes se sont un peu moins fait avoir. Il y a eu moins de ‘sur-promesses’ de la part des fournisseurs. Et donc on a des solutions qui répondent plus à la demande des municipalités avec un retour d’expérience tangible», développe Flavien Vottero.
Ecoutez l’interview complète de Flavien Vottero, directeur d’études spécialisé dans les nouvelles technologies et le service aux entreprises pour Xerfi
Un marché tiré par les villes moyennes et les villages
En ce qui concerne la typologie des communes, Xerfi prévoit que ce soit les villes moyennes et les villages qui tirent le marché dans les prochaines années. Et l’heure n’est donc plus au tout technologique. Si on a beaucoup entendu parler des projets de Dijon et d’Angers qui veulent devenir des villes intelligentes globales où tout est interconnecté, ce n’est pas le chemin que prennent aujourd’hui la plupart des municipalités.
«Il y a eu une vision ‘tout technologique’ qui a été poussée historiquement avec par exemple le projet de Google pour Toronto. Les grands groupes français ont essayé un peu de suivre cette logique. Ce n’était pas exactement la même chose, ils avaient conscience que le tout technologique n’était pas viable. Mais l’objectif était quand même de prendre en main l’intégralité des fonctions de la ville, de mettre un peu de technologie partout et d’avoir des données qui pouvaient créer des prestations supplémentaires», décrit Flavien Vottero. « Cela est possible dans un nombre très réduit de villes. Même dans les très grandes, cela ne marche pas car il y a beaucoup de problématiques autour de l’acceptation de la prise en main des données, de la méfiance de la part des citoyens sur les données privées. Et donc on s’aperçoit que ces gros projets sont technologiquement et en ce qui concerne l’acceptation, difficiles à déployer».
Qui seront les gagnants de ce marché évalué à 500 millions d’euros d’ici 2022?
Quelles sont alors les solutions aujourd’hui privilégiées par les villes intermédiaires? Il s’agit de projets avec un un objectif précis de retour sur investissement ou qui répondent à une problématique précise. Pour Xerfi, deux segments sont particulièrement prometteurs: « l’amélioration de l’efficacité énergétique (pilotage automatique de l’éclairage, réglage du chauffage, détection des dysfonctionnements…) et de la sécurité (vidéosurveillance intelligente, outils destinés à anticiper les inondations…) ». A cela s’ajoute des solutions pour revitaliser les centres-villes comme des places de marché numériques locales ou des services de livraison à domicile. Les villes commencent aussi à vouloir développer des solutions pour renforcer le lien social grâce par exemple à des plateformes d’entraide pour les seniors ou les personnes en situation d’handicap.
Si certaines municipalités doivent encore faire face à des enjeux de moyens ou de compétences internes pour pouvoir effectivement piloter leurs projets de smart city, le potentiel du marché est évalué à 500 millions d’euros d’ici 2022 par Xerfi. Aujourd’hui, « avec plus d’une vingtaine de projets à leur actif, EDF, Suez, Veolia et Bouygues s’imposent comme les principaux acteurs du marché de la ville intelligente en France», note le cabinet d’analyses. Mais étant donné les mutations expliquées plus haut il rappelle que «le paysage concurrentiel pourrait dès lors évoluer en profondeur. Les grands consortiums adossés à des grands groupes pourraient ainsi laisser davantage de place aux équipementiers et autres startups».
*«Le renouveau de la smart city en France – Classement des 40 premières agglomérations, stratégies de croissance et nouvelles opportunités d’affaires».
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