MedTech: cette startup lyonnaise tente de bousculer le marché de l’hygiène bucco-dentaire
Par Denise Silber pour FrenchWeb
Commercialisée par la start-up française, FasTeesh, Y-Brush a été conçue pour nettoyer nos dents en profondeur en 10 secondes ! Comment est-ce possible ? Y-Brush brosse toutes les dents simultanément, à l’aide d’une nouvelle sorte de brosse, composée de poils vibrants en nylon insérés dans deux gouttières qui épousent la forme des dents. La brosse est attachée à un manche qui permet à l’utilisateur de tenir la brosse efficacement, soit à un angle de 45° par rapport aux dents.
Lancée en 2017, la société Fasteesh, soutenue par la BPI, a présenté Y Brush au CES dès 2019. Nous avons rencontré Benjamin Cohen, l’un des deux co-fondateurs, à l’issue de la troisième participation de Y Brush, celle du CES 2021, une édition qui s’est déroulée pour la première fois en full digital, crise sanitaire oblige.
Denise Silber : Que retenez-vous du CES 2021 ? Étiez-vous gênés par l’impossibilité cette année de faire tester le Y Brush par les visiteurs?
Benjamin Cohen : Effectivement le CES 2021 était plutôt calme et peu représentatif des éditions précédentes. Nous avons perdu l’ambiance, l’effervescence, la possibilité de flâner. Puisque tout allait se dérouler en ligne, et que c’est le salon de la technologie, nous nous attendions à des fonctionnalités qui allaient faciliter l’échange. Mais il n’y en avait pas. A l’entrée du site web, il y avait un « shuffle » qui devait favoriser les rencontres au hasard, mais c’était peu visible.
Quant à la possibilité de faire tester notre produit, nous avions mis en place un petit lavabo au CES 2020, et c’était bien. Mais ce n’est pas si grave que cela de ne pas pouvoir faire tester. Si on peut montrer le produit, ne serait-ce qu’en vidéo, les visiteurs comprennent. Nous avons noué quelques contacts intéressants au CES 2021, et sommes partants pour revenir l’année prochaine !
Revenons au début de l’histoire de Y Brush. Comment se sont déroulées ces cinq années depuis que vous aviez imaginé en quelque sorte, de disrupter le marché du brossage des dents ?
Je ne cherchais pas à disrupter le marché du brossage des dents; il s’agissait simplement de résoudre un problème de santé. Réalisant que nous sommes nombreux à mal nous brosser les dents par impatience et que cela provoque des caries, des maladies gingivales et d’autres effets négatifs, je voulais trouver une solution. J’ai cherché un co-fondateur susceptible de porter avec moi ce projet, ce rêve. J’ai rencontré Christophe Cadot qui a un background d’ingénieur et de chercheur. Notre difficulté au début était surtout de trouver les financements. La BPI a adhéré à notre projet, mais il fallait aussi apporter des fonds propres. Et c’est plus compliqué pour un projet industriel.
Et pourtant, il y a peu de temps, les investisseurs français s’inquiétaient du tout digital.
En effet, mais maintenant, les fonds d’investissement perçoivent la fabrication comme un projet plus risqué. Pour moi, ce sont juste deux stratégies différentes, l’industrialisation et le numérique. Un projet digital est plus facile à copier; dans la fabrication, il y a des brevets et des délais incompressibles, ce qui ralentit celui qui veut copier.
Nous avons néanmoins réussi à trouver notre financement de départ par un mixe de love money et investisseurs. Nous avons démarré, non pas par Y Brush, mais par une gamme de produits pour les EHPAD et les établissements pour personnes handicapées. Ces populations ont des difficultés réelles pour se brosser les dents. C’est probablement mon passage à l’Inserm qui m’a sensibilisé au secteur public.
Et aujourd’hui, où en est votre société Fasteesh ?
Il nous a fallu trois ans pour passer un premier cap. Pendant ce temps, nous avons conçu le produit, réalisé des études scientifiques, obtenu le statut de dispositif médical, créé notre petite usine à Lyons, lancé un site d’e-commerce, et organisé la logistique pour pouvoir expédier des commandes partout dans le monde.
Nous vendons deux gammes de produits, même si nous présentons seulement le produit grand public, Y Brush au CES. L’autre gamme s’appelle FasTeesh. C’est la même technologie, avec un design ou forme différent.
Vous disiez que les retours des utilisateurs sont bons. Qu’en pensent les dentistes ?
Les dentistes sont positifs. Ils préfèrent que les patients aient les dents en meilleur état, sans caries, pour qu’ils puissent se concentrer sur les vrais problèmes dentaires et pas ceux qui sont évitables par la bonne hygiène. Nous remplaçons la brosse par un outil plus pratique. Mais nous n’enlevons pas la relation entre le patient et son dentiste. Nous recommandons toujours aux patients de voir leur dentiste tous les six mois.
La prochaine étape, est-ce de repartir en levée de fonds ?
Tout à fait. YBrush est victime de son succès. Il faut attendre deux mois pour recevoir sa brosse ! Nous avons une croissance importante depuis un an, mais nous avons besoin de produire plus. Pour faire tourner les machines au maximum, nous devons passer d’une équipe de 7 à une de 20. Cela nous permettra d’agrandir notre capacité de production, de passer notre usine aux deux puis aux trois huit, de faire plus de marketing, de logistique, de nous structurer.
Vous ne craignez pas que les copieurs n’arrivent, alors que vous avez fait tout le travail difficile ?
Nous sommes les seuls à savoir faire une brosse flexible. Il y a des produits similaires, mais avec des brosses en silicone rigide, à peine flexible, et elles n’enlèvent pas la plaque dentaire. Pour produire ce type de brosse, il faut développer la chaîne de fabrication. Il faut faire du R&D, faire des dossiers réglementaires, obtenir des brevets. Nous en avons 4. Tout prend du temps. Et nous cherchons à garder une longueur d’avance.
Combien coûte Y Brush ?
Pour une personne, c’est 125 euros pour le manche et la brosse. Le manche durera des années, la brosse 6 mois. Elle coûte 30 euros à remplacer.
Next stop, ouvrir des antennes dans le monde ?
Pourquoi pas ! Nous regardons, mais ce sera pour plus tard.
L’experte:
Denise Silber, présidente de Basil Strategies et et fondatrice de Doctors 2.0 & You, est conférencière et consultante en communication de la santé digitale. Sa volonté d’améliorer la qualité des soins et de renforcer le rôle des patients la conduit depuis les débuts du Web à s’engager à s’engager dans la e-santé à ses débuts et de co-fonder VRforHealth.com en 2020, afin de sensibiliser professionnels et patients à la Réalité Virtuelle Thérapeutique.
Conseillère des acteurs de santé publics et privés et communicante sur les réseaux, par l’intermédiaire des événements, et des publications pour l’Institut Montaigne, elle devient rapidement leader d’opinion digital en France et à l’international. Décorée de la Légion d’honneur en 2011, puis nommée aux «Inspiring Fifty», le top cinquante femmes inspirantes de la tech en France en 2018, Denise Silber, franco-américaine, est titulaire du MBA de Harvard et vice-présidente du Harvard Club de France.
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C’est donc une brosse à dents à 125€ + 30€ tous les six mois (shocked)
Et il y en a qui mettent des fonds là-dedans ??
Bravo BPI