Covid-19: comment la crise a boosté les applications pour rester en contact avec les seniors
AFP
Créer un journal familial, partager des photos à la télévision ou conter des histoires en vidéo: proposés par des start-ups, de nouveaux services pour garder le lien avec les personnes âgées connaissent un fort engouement en pleine la crise sanitaire. Depuis le premier confinement, Josette, qui fête en mars ses 89 ans, reçoit chaque mois dans sa boîte à lettres un journal contenant des photos et des messages de ses quatre enfants et huit petits-enfants. « C’est une excellente idée, ça me permet de garder contact avec ma famille alors qu’en ce moment on ne peut pas se réunir », confie-t-elle à l’AFP.
« À chaque fois que je l’ai au téléphone, elle m’en parle! », se réjouit sa petite-fille Gabrielle, 26 ans, qui apprécie de son côté la simplicité du système. Chaque membre de la famille envoie ses photos sur une application ou un site, qui se charge ensuite de la mise en page, de l’impression et de l’expédition. Neveo propose ce service sur abonnement depuis 2016. « L’idée était de trouver une solution qui ne nécessite pas d’apprentissage particulier », explique Simon Desbarax, co-fondateur de cette start-up belge aux 100 000 utilisateurs, laquelle a connu un pic d’activité en mars-avril derniers. Son concurrent Famileo a également vu les messages destinés aux grands-parents affluer lors du premier confinement, strict et marqué par l’interdiction des visites dans les Ehpad. Son nombre d’utilisateurs a quasiment doublé l’an dernier pour dépasser le million.
Cette période particulière « a renforcé notre conviction que notre solution était adaptée et répondait à un vrai besoin », indique Tanguy de Gélis, co-fondateur de cette start-up lancée en 2015 à Saint-Malo. De son côté, Sunday propose aux personnes âgées de recevoir des nouvelles de leurs proches sur leur télévision, grâce à un boîtier. La famille envoie photos et vidéos au travers d’une application, le grand-parent peut y réagir avec une télécommande ergonomique.
« Fédérer les générations »
« Ces services permettent de maintenir un lien familial qui est une ressource très importante pour les personnes âgées, surtout celles qui vivent en établissement », commente Valentine Trépied, sociologue spécialiste du vieillissement. Toutefois, « ils ne sont pas adaptés à toutes les personnes âgées, ils s’adressent à celles qui ont une grande part d’autonomie ». Difficile de feuilleter un magazine ou de regarder la télévision en cas de déficience visuelle ou auditive, par exemple. Dans ces cas de figure, le contact par le toucher (tenir la main, caresses) devient essentiel.
Les start-ups, qui commercialisent leurs solutions auprès du grand public ainsi que des maisons de retraite, essaient néanmoins d’adapter leurs produits aux plus âgés. « Le challenge c’est d’arriver à fédérer toutes les générations, d’impliquer les aînés sans que ce soit compliqué », décrit Nelly Meunier, co-fondatrice de Sunday, qui a écoulé près de 13 000 boîtiers depuis 2018 et recense 100 000 utilisateurs sur son application. La start-up bordelaise a lancé de nouvelles fonctions et doublé son chiffre d’affaires l’an passé. Son de cloche similaire du côté de Story Enjoy, qui propose aux grands-parents de se filmer en racontant un livre numérique et de transmettre la vidéo à leur petit-enfant.
Des apps pensées pour les personnes «éloignées du numérique»
«L’application a été pensée pour que les personnes éloignées du numérique puissent l’utiliser facilement», explique Caroline Lopez, co-fondatrice de l’entreprise créée en 2018. Le contexte de crise sanitaire et de restrictions « a poussé certains à s’y mettre, notamment des personnes âgées », estime-t-elle. Au cours de l’an dernier, la start-up réunionnaise a multiplié par trois le nombre de nouveaux abonnés et recruté des utilisateurs plus âgés, jusqu’à 75 ans.
Pour beaucoup d’aînés, le numérique a permis de rétablir des contacts pendant le confinement, selon une étude publiée en juin par Les petits frères des pauvres. Toutefois, 4,1 millions de Français de 60 ans et plus « n’utilisent jamais internet, surtout les plus âgés et les plus modestes », indique l’association. « Il faut du monde pour nous aider à accéder à Internet », souligne Philippe Wender, 83 ans, président de l’association Citoyennâge, qui regroupe des résidents de maisons de retraite. Dans celle où il vit, les résidents sont épaulés pour passer des appels vidéos à leurs proches.
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