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Loi « anti-Huawei »: les opérateurs pourront finalement réclamer des indemnisations, juge le Conseil d’État

AFP

Le bras de fer juridique est relancé: le Conseil d’État a jugé jeudi que les opérateurs télécoms SFR et Bouygues Telecom, sommés de retirer des antennes de réseau mobile 5G déjà installées en France en raison des dispositifs législatifs « anti-Huawei», pouvaient réclamer des indemnisations. Quand le Conseil constitutionnel a validé début février la loi du 1er août 2019 visant à préserver « les intérêts de la défense et de la sécurité nationale » dans le cadre notamment de l’exploitation des réseaux mobiles, certains opérateurs pensaient que le dossier était définitivement clos. Le Conseil d’État, en examinant la conformité de ces dispositifs au regard des textes européens, leur a donné la possibilité de poursuivre leurs réclamations, alors que le gouvernement a indiqué début septembre qu’il n’était pas prévu « qu’il y ait des indemnisations » versées aux opérateurs « pour les décisions » prises au sujet de Huawei, contrairement à d’autres pays.

Si la plus haute juridiction administrative française a écarté la majorité des requêtes concernant une demande d’annulation du décret, elle considère toutefois que ces dispositifs peuvent porter « atteinte » au droit de propriété au nom de la jurisprudence. « Il appartient au juge compétent (…) d’apprécier s’il existe un rapport raisonnable de proportionnalité entre les limitations constatées à l’exercice du droit de propriété et les exigences d’intérêt général qui sont à l’origine de cette décision », a notifié le Conseil d’État dans sa décision. En conséquence, si SFR et Bouygues Telecom estiment avoir subi un préjudice « grave et spécial », ils pourront saisir un juge administratif pour réclamer des compensations. Contactés par l’AFP, SFR et Bouygues Telecom n’ont pas souhaité faire de commentaires.

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Le gouvernement se dit « conforté »

Les deux opérateurs français, qui ont bâti pour moitié leur réseau mobile avec Huawei, avaient multiplié les procédures depuis juin après avoir réclamé à l’État une indemnisation financière face au préjudice lié aux fortes restrictions imposées à l’équipementier chinois sur le marché de la 5G. La France n’a pas interdit explicitement le matériel Huawei pour le déploiement du réseau mobile, mais l’Agence nationale chargée de la sécurité informatique (Anssi) a restreint très fortement fin août les autorisations d’exploitation. Bouygues Telecom a ainsi expliqué qu’il allait devoir retirer 3 000 antennes Huawei d’ici à 2028 dans les zones très denses en population, et qu’il avait interdiction d’utiliser des antennes Huawei pour la 5G à Strasbourg, Brest, Toulouse et Rennes.

Le cabinet du secrétaire d’Etat au numérique Cédric O, estime que la décision du Conseil d’Etat « conforte la position du gouvernement, en rappelant qu’une éventuelle indemnisation ne peut s’opérer que devant le juge et dans des conditions strictement limitées d’un dommage grave et spécial ». Il « conforte que la stratégie du gouvernement a permis de défendre au mieux les intérêts de l’Etat », a-t-il fait valoir auprès de l’AFP. « C’est une victoire pour la protection des intérêts stratégiques de notre pays, permettant un déploiement serein de la 5G au bénéfice de l’ensemble des Français », selon lui.

Huawei, numéro un mondial des équipements 5G, est dans le collimateur des États-Unis qui le soupçonnent d’espionnage au profit de Pékin, ce que dément l’entreprise. En Europe, seul le Royaume-Uni, depuis mi-juillet, et la Suède, depuis fin octobre, ont explicitement banni Huawei de la quasi-totalité de l’infrastructure nécessaire pour faire fonctionner leur réseau 5G. Malgré les restrictions, le géant chinois a annoncé récemment plusieurs investissements en France, dont l’ouverture d’un centre de recherche à Paris et d’un site de production dans l’Est à l’horizon 2023, dans le cadre d’une campagne visant à démontrer sa volonté de s’y implanter durablement.

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