Réglementation européenne sur l’IA: pour Yann Le Cun (Facebook), le danger vient des usages de l’IA
AFP
Le patron de la recherche en intelligence artificielle chez Facebook, le Français Yann Le Cun, estime qu’il ne faut pas chercher à réglementer l’intelligence artificielle (IA) en tant que telle, mais plutôt ses usages. « Je suis plutôt partisan de réglementer » une « application particulière plutôt qu’une technologie » en général, a-t-il estimé dans un entretien à l’AFP, à l’occasion du sixième anniversaire du laboratoire parisien de recherche en IA de Facebook célébré mercredi. Le chercheur, qui est l’un des scientifiques à l’origine des intelligences artificielles modernes, regarde ainsi d’un oeil prudent le projet de réglementation européenne sur l’IA, proposé en avril par Bruxelles.
Ce projet a par exemple été très critiqué par Eric Schmidt, l’ancien patron de Google qui a jugé que ce texte était un « désastre », en s’attaquant à un domaine encore trop récent pour être réglementé. Pour Yann Le Cun, le projet européen « part d’une bonne intention ». « Il faut que les systèmes d’intelligence artificielle soient sécurisés, qu’ils ne mettent pas les personnes en danger, qu’ils respectent la vie privée », explique-t-il. « Mais il faut se méfier de ne pas ralentir la recherche et la créativité des chercheurs, qui sont un peu le moteur de l’innovation de l’économie. L’Europe prendrait le risque de prendre du retard » avec une réglementation de l’IA trop contraignante, a-t-il ajouté. En matière de reconnaissance faciale par exemple, il faut arriver à faire la part des choses entre les applications qui serviront « de bonnes fins », et les autres, explique-t-il.
« La reconnaissance faciale ou la reconnaissance biométrique se révèlent absolument indispensables pour certains pays qui n’ont pas de moyens très simples de faire de l’authentification de l’identité », indique-t-il. « Cela peut permettre à des gens d’avoir accès à un compte bancaire, à des services sociaux », voire, comme le fait la fondation Bill Gates, d’arriver à identifier des bébés par une photo de leur plante des pieds, pour éviter de les vacciner deux fois. « En revanche, il faut des réglementations très strictes pour protéger la vie privée, éviter qu’on reconnaisse le visage de n’importe qui passe dans un espace public », ajoute-t-il.
Apprentissage « auto-supervisé »
Yann Le Cun est l’un des invités vedettes de la conférence virtuelle organisée mercredi par Facebook pour célébrer les six ans de Fair Paris, son labo parisien de recherche en IA qui regroupe aujourd’hui près de 90 personnes et a publié des travaux reconnus par la communauté scientifique mondiale. Sur un plan pratique, la recherche de Fair Paris a notamment été utilisée par Facebook pour améliorer les outils de reconnaissance de texte et d’images utilisés pour la modération des contenus du réseau social mondial.
Aujourd’hui, le chef de la recherche scientifique du réseau social s’intéresse particulièrement à l’apprentissage « auto-supervisé », un champ de recherche qui vise à construire des intelligences artificielles capables de s’entraîner beaucoup par elles-même, et d’avoir besoin de moins de données pour apprendre à réaliser une tâche. « Dans un futur soit proche, soit lointain, en fonction des progrès que nous allons faire, cela pourrait nous permettre d’avoir des assistants personnels intelligents qui comprennent à peu près tout ce que l’on dit, qui ne sont pas frustrants dans l’interaction », explique-t-il. « Cela pourrait aussi déboucher sur des robots qui ont une espèce d’intelligence un peu autonome: des machines à qui on donnerait un but, sans leur spécifier comment atteindre leur but », envisage-t-il.
- EDEN AI lève 3 millions d’euros pour démocratiser l’accès à l’IA en entreprise - 21/11/2024
- Plan marketing 2025 : la méthode de Maxime Baumard pour structurer la stratégie B2B de PENNYLANE - 21/11/2024
- Freqens lève 3 millions d’euros pour accompagner les équipes achats dans leurs décisions. - 21/11/2024