Avec la pandémie de Covid-19 qui a décuplé le recours aux outils numériques, les entreprises n’ont eu d’autre choix que d’accélérer leur transformation digitale pour faire face à une crise inédite. Mais au-delà de l’usage de solutions digitales, encore faut-il se doter de talents capables d’appréhender les nouveaux enjeux induits par le numérique. «C’est la guerre des talents», admet Frédéric Sitterlé, directeur général d’HETIC (Hautes études des technologies de l’information et de la communication), école de formation aux métiers du numérique. Et d’ajouter : «Les entreprises veulent saisir les opportunités de sortie de crise.»
En effet, la pénurie de talents dans le numérique était déjà un sujet de préoccupation avant la pandémie de Covid-19, notamment en ce qui concerne la population de développeurs, particulièrement convoitée. Mais la crise sanitaire n’a fait qu’aggraver la situation. Selon une étude réalisée par le cabinet McKinsey en 2020, 87% des dirigeants d’entreprise estimaient qu’ils sont ou seront confrontés à une pénurie de talents disposant des compétences numériques adéquates pour répondre à leurs besoins. Plus inquiétant encore, d’après un rapport de Rand commandé par Salesforce, cette pénurie de talents dans les métiers du numérique pourrait coûter plus de 11 5000 milliards de dollars de croissance du PIB aux pays du G20 d’ici 2028.
Regardez notre interview avec Frédéric Sitterlé, directeur général d’HETIC :
1 milliard d’euros pour la formation dans les métiers du numérique en France
Dans ce contexte, les États tentent de réagir, à l’image de la France. En octobre, Emmanuel Macron a ainsi annoncé une enveloppe d’un milliard d’euros pour la formation dans les métiers du numérique dans le cadre du plan «France 2030». La moitié de cette somme sera fléchée vers les métiers dans l’intelligence artificielle, secteur qui a vu de nombreux talents français être captés par les GAFA, à l’image du Français Yann Le Cun, le patron de la recherche en intelligence artificielle chez Facebook. «Sur ces quatre dernières années, l’argent injecté dans l’apprentissage, et notamment dans les formations dans le numérique, a permis de contribuer à hauteur de 45 milliards d’euros à la croissance et a généré un revenu net public de plus de 11 milliards d’euros. Donc je ne sais pas si 1 millard c’est suffisant, mais c’est excessivement rentable si on veut accompagner la relance économique du pays», indique Frédéric Sitterlé. Et d’ajouter : «Les études supérieures dans la Tech sont vraiment devenues la voie royale vers toutes les opportunités de carrière.»
De plus, les choses ont évolué ces dernières années dans l’Hexagone, plus encore ces derniers mois, avec l’émergence de nombreuses pépites dans la French Tech, qui deviennent de plus en plus attractives aux yeux de talents français et internationaux. Et pour cause, les 120 entreprises présentes dans l’indice Next 40/French Tech 120 représentent désormais plus de 160 000 emplois directs et indirects dans l’Hexagone. Et elles devraient en créer 200 000 de plus d’ici 2025, selon les estimations de Roland Berger. Toutefois, les start-up françaises sont toujours en concurrence avec les GAFA, à l’image de Facebook qui prévoit de recruter 10 000 personnes en Europe au cours des cinq prochaines années pour construire le «métavers», ce monde virtuel parallèle au monde physique dans lequel il sera possible de communiquer, travailler, se divertir ou encore faire du shopping.
L’apprentissage permanent comme «garantie contre toute forme d’obsolescence»
Face aux mutations qui entourent les métiers dans le numérique, Frédéric Sitterlé estime que les jeunes diplômés doivent être en apprentissage permanent, notamment avec l’e-learning qui a été plébiscité durant la crise du coronavirus. «Une technologie a aujourd’hui une durée de vie de 18 mois avant de commencer à devenir obsolète. Un jeune qui arrête de se former à l’issue de sa formation deviendra lui aussi obsolète s’il ne continue pas à apprendre», explique-t-il.
Cette capacité d’apprentissage tout au long de la vie professionnelle, que Frédéric Sitterlé considère comme «une garantie contre toute forme d’obsolescence», s’applique également aux établissements qui forment les jeunes aux métiers du numérique. «Avec des signaux faibles, on doit adapter et réécrire chaque année un tiers de nos cursus pour adresser les besoins futurs», indique Frédéric Sitterlé, qui précise que les étudiants de son école sont sensibilisés aux enjeux sociétaux découlant du numérique au travers des portraits de Dark Vador (Tech mal utilisée) et Montaigne (science mise au service du progrès et de l’esprit critique).
Malgré le marasme actuel engendré par les dérives autour du numérique, le directeur général d’HETIC, connu également pour avoir été le créateur de Sport24.com et MySkreen.com, veut se montrer optimiste pour l’avenir : «On a peut-être une chance d’être à l’aube d’une renaissance technologique européenne qui va voir aboutir un Internet humaniste, positif, et qui doit contribuer à rendre le monde meilleur. L’Europe a probablement, plus que jamais, un rôle à jouer dans cette émergence d’un Internet humaniste et positif.»
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