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A 890 km d’altitude, un nouveau satellite pour mesurer le niveau des océans

Par Mathieu RABECHAULT / AFP

Son lointain prédécesseur avait mis en évidence le phénomène El Niño en 1994; le satellite franco-américain SWOT, dont le lancement est prévu jeudi, doit pousser plus loin la compréhension du cycle de l’eau et son impact sur le climat.

Pour l’agence spatiale française, le Cnes, et son homologue américaine la Nasa, qui collaborent dans ce domaine depuis 30 ans, et le satellite Topex-Poseidon, il s’agit d’une mission « emblématique », rien qu’au regard de son budget d’un milliard de dollars.

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Cette coopération a été mise à l’honneur à l’occasion d’une visite du président français Emmanuel Macron à Washington, au siège de la Nasa le 30 novembre.

Le mastodonte de 2,2 tonnes doit être mis en orbite par une fusée de SpaceX lancée de la base de Vandenberg, en Californie. Une fois dans l’espace, SWOT, pour Surface Water and Ocean Topography, mesurera le niveau des eaux de surface des océans, mais aussi des lacs et des rivières.

Pour cela, le satellite est doté d’un instrument révolutionnaire, un interféromètre à large fauchée baptisé KaRin: deux antennes radars, situées au bout de bras à dix mètres l’une de l’autre, scannent la surface de l’eau sur une bande large 120 kilomètres, fournissant une image bidimensionnelle. Le signal légèrement différent reçu par chacune des deux antennes permet de connaître la hauteur d’eau.

Grâce à l’éloignement des deux antennes et à la stabilité du satellite, « nous allons disposer d’une résolution dix fois supérieure à ce que produisent les technologies actuelles pour mesurer la hauteur des océans et comprendre comment les fronts et les tourbillons océaniques influent sur le climat », explique Karen St. Germain, directrice de l’observation de la Terre à la Nasa.

« C’est comme observer une plaque d’immatriculation de l’espace quand on ne pouvait auparavant distinguer qu’une rue », abonde Thierry Lafon, chef du projet SWOT au Cnes.

L’enjeu est d’importance: si l’impact sur le climat des grands courants océaniques comme le Gulf Stream est connu, il n’en est rien des courants et tourbillons plus localisés, sur une dizaine de kilomètres. Or ceux-ci affectent la température de la surface de la mer, les transferts de chaleur, ainsi que l’absorption par l’océan du CO2 présent dans l’atmosphère, explique-t-il.

Cela aidera à mieux modéliser les conditions météorologiques et climatiques et mieux observer l’érosion côtière et les futurs changements climatiques.

– Fin de vie sans débris –

 

Son orbite à 890 kilomètres d’altitude est « optimale car elle permet de discriminer tous les composants qui jouent sur la hauteur d’eau, comme les marées ou le soleil », selon lui.

SWOT a également un rôle hydrologique: il pourra surveiller la hauteur, la superficie et l’évolution de la quantité d’eau de plus de 20 millions de lacs d’au moins 250 mètres de côté. Et observer les fleuves de plus de 100 mètres de large et calculer leur débit.

La gestion des ressources hydriques et la prévention des inondations comme des sécheresses s’en trouveront améliorées, ajoute Thierry Lafon.

L’acheminement du satellite vers Vandenberg depuis le site de Thales Alenia Space (TAS) à Cannes, où il a été assemblé, a relevé du casse-tête.

« Avec la guerre en Ukraine, il n’y avait plus d’avions de transport Antonov disponibles et il ne rentrait pas dans un Boeing 747 », relate Christophe Duplay, chef du projet chez TAS. Il a donc fallu compter sur la Nasa pour que l’armée de l’Air américaine détache un de ses rares géants des airs C-5 Galaxy pour convoyer la merveille.

A la fin de sa vie, prévue pour durer trois ans – « même si rien n’empêche que la mission se poursuive cinq à huit ans » selon Thierry Lafon – SWOT sera le premier satellite à effectuer une rentrée contrôlée dans l’atmosphère pour lutter contre la prolifération de débris dans l’espace, en vertu de la loi française sur les opérations spatiales.

Près de 80% des 400 kilos de carburant qu’il emporte sont consacrés à cela.

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