Le bazooka européen pour réguler internet pleinement activé samedi
Par Daniel ARONSSOHN / AFP
La législation européenne sur les services numériques entre pleinement en vigueur samedi avec des obligations désormais imposées à l’ensemble des plateformes en ligne, sous peine d’amendes, pour mieux protéger les utilisateurs contre les contenus illégaux.
Le règlement sur les services numériques (DSA) s’applique déjà depuis fin août aux entreprises les plus puissantes comme X, TikTok ainsi que les principaux services de Meta (Facebook, Instagram), Apple, Google, Microsoft ou Amazon.
L’Union européenne a ainsi ouvert en décembre une enquête formelle visant le réseau social d’Elon Musk soupçonné de manquements à ses obligations en matière de lutte contre la désinformation, la circulation d’images violentes ou les incitations à la haine.
Au total, 22 très grands acteurs de l’internet, dont trois sites pornographiques, ont été placés sous la surveillance directe de la Commission européenne qui a recruté plus d’une centaine d’experts à Bruxelles pour assumer son nouveau rôle de gendarme du numérique.
A partir de samedi, les éléments clé du règlement s’appliquent cependant à toutes les plateformes, quelle que soit leur taille, avec seulement des allégements partiels pour les plus petites entreprises. L’objectif est d’en finir avec les espaces de non droit: tout ce qui est illégal hors ligne doit l’être en ligne.
Parmi les obligations imposées à tous les fournisseurs de services, celle de proposer aux internautes des outils simples de signalement des contenus illicites tels que définis par les législations en vigueur (le plus souvent au niveau national) et d’agir « promptement » pour les retirer.
Les sites marchands doivent contrôler l’identité des vendeurs et bloquer les fraudeurs récidivistes notamment quand ils distribuent des produits dangereux ou contrefaits.
Le ciblage publicitaire des mineurs ainsi que l’exploitation de données sur le genre, les idées politiques ou l’appartenance religieuse.
– Lourdes amendes –
Les contrevenants s’exposent à de lourdes amendes jusqu’à 6% de leur chiffre annuel mondial, voire à une interdiction d’opérer en Europe en cas de violations graves et répétées.
Le 17 février marque aussi l’entrée en vigueur de ces sanctions potentielles, y compris pour les très grandes plateformes qui étaient déjà soumises au règlement mais pas encore à son volet répressif.
« Le but n’est pas d’imposer des amendes, c’est plutôt que les plateformes changent leurs pratiques, c’est à cela qu’on mesurera le succès de la législation », souligne cependant Alexandre de Streel, codirecteur du groupe de réflexion Center on Regulation in Europe (Cerre).
Si la date du 17 février est importante, les changements de pratiques « prendront du temps, ils ne se décrètent pas par une loi, car il faut changer la culture des utilisateurs et des entreprises », reconnaît cet expert.
Les plateformes, qui ne font pas partie des 22 « très grandes », seront surveillées par l’autorité du pays où elles ont leur établissement principal. Les Etats membres de l’UE avaient jusqu’à samedi pour désigner leur organisme national de régulation afin d’être prêts à faire appliquer les nouvelles règles.
Des dispositions plus strictes restent réservées aux très grands acteurs, dont on estime que la puissance fait peser des risques plus importants. Ces 22 géants ont été désignés sur la base d’un nombre d’utilisateurs actifs en Europe, évalué à plus de 45 millions.
Parmi leurs obligations spécifiques, les très grandes plateformes doivent analyser elles-mêmes les risques liés à l’utilisation de leur service et mettre en place les moyens pour les atténuer.
Elles sont soumises à une transparence accrue, avec l’obligation de fournir au régulateur un accès à leurs algorithmes, et sont auditées une fois par an à leurs propres frais.
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