
AgTech en Europe : réduire la fracture technologique entre grandes et petites exploitations
Edition spéciale Salon de l'Agriculture 2025
L’agriculture européenne est à un tournant. Face aux défis croissants liés à la pénurie de main-d’œuvre, à la pression sur les coûts et à l’urgence d’améliorer la productivité, l’AgTech s’impose comme un levier stratégique. Pourtant, une fracture persiste : si les grandes exploitations adoptent rapidement les nouvelles technologies, les petites et moyennes exploitations, qui représentent l’essentiel du paysage agricole européen, peinent encore à en bénéficier.
Un marché polarisé : quand l’innovation ne profite qu’aux grands acteurs
L’AgTech en Europe connaît un essor rapide, avec des investissements record dans l’automatisation, la robotique et la gestion des données agricoles. Mais cette dynamique favorise surtout les grandes exploitations, qui disposent des ressources nécessaires pour tester et adopter ces solutions.
Les startups du secteur, souvent contraintes par des cycles de financement exigeants, se tournent naturellement vers les grandes exploitations qui offrent des débouchés plus rapides et une validation de marché plus simple. Résultat : les petites et moyennes exploitations, pourtant cruciales pour la souveraineté alimentaire européenne, restent à la marge de cette révolution technologique.
Cette polarisation est particulièrement visible dans les cultures spécialisées à forte valeur ajoutée, comme la viticulture, les fruits et légumes ou l’arboriculture, qui nécessitent une main-d’œuvre importante et un suivi méticuleux. En France, en Espagne ou en Italie, ces exploitations de taille intermédiaire sont confrontées aux mêmes défis que les grandes structures, mais sans bénéficier des mêmes solutions technologiques.
Le défi du coût et de l’accessibilité
L’un des principaux freins à l’adoption de l’AgTech pour les petites exploitations réside dans le coût initial des équipements. Les robots agricoles, les capteurs avancés ou les plateformes de gestion des données représentent un investissement important, difficilement soutenable sans un retour sur investissement rapide.
Pourtant, des solutions existent :
- Des modèles économiques flexibles comme la location, l’abonnement ou le paiement à l’usage peuvent rendre ces technologies accessibles à une plus large base d’agriculteurs.
- Des programmes de subventions européennes comme ceux de la PAC (Politique Agricole Commune) pourraient jouer un rôle clé en facilitant l’investissement des agriculteurs dans ces technologies.
En parallèle, le manque de formation et d’accompagnement constitue un frein majeur. Les agriculteurs hésitent souvent à investir dans des technologies qu’ils ne maîtrisent pas et qui exigent une montée en compétence. Des initiatives locales, comme des démonstrations sur le terrain, des partenariats avec des coopératives ou des formations spécifiques, pourraient accélérer l’adoption de ces outils.
Une innovation repensée : la scalabilité au service de tous
Pour que l’AgTech bénéficie à l’ensemble du secteur, elle doit être scalable et s’adapter aux différentes tailles d’exploitation. L’un des concepts les plus prometteurs en la matière est la technologie en essaim (« swarm technology »), qui permet de déployer des unités autonomes en fonction des besoins réels de chaque exploitation :
- Un petit viticulteur pourrait utiliser une seule unité autonome pour le suivi de ses parcelles, l’analyse des sols ou le désherbage ciblé.
- Une grande exploitation céréalière pourrait déployer plusieurs unités simultanément, optimisant ainsi ses rendements.
Ce type de technologie modulaire permettrait aux petites exploitations d’accéder à l’innovation à un prix adapté, sans avoir à supporter l’investissement massif qu’exige l’achat de solutions conçues pour les grandes structures.
Réinventer l’AgTech pour un marché plus inclusif
Si l’AgTech veut réellement transformer l’agriculture européenne, elle ne peut se limiter aux grands acteurs. Il est impératif de :
- Réorienter les investissements vers des solutions plus flexibles et adaptées aux exploitations de taille intermédiaire.
- Créer des passerelles entre les startups AgTech et les petits agriculteurs, via des coopératives, des groupements d’achat ou des dispositifs de leasing simplifiés.
- Encourager une approche plus diversifiée de l’innovation, en s’intéressant aux problématiques spécifiques des cultures spécialisées, trop souvent laissées de côté au profit des grandes cultures céréalières.
L’agriculture européenne repose sur une diversité de modèles, et les technologies doivent s’y adapter. Ne pas inclure les petites et moyennes exploitations dans la transition technologique, c’est freiner le potentiel de l’AgTech et fragiliser la résilience de l’ensemble du secteur.
- Connaissez vous Aleph Farms ? une startup pionnière à la croisée de l’AgTech et de la FoodTech - 25/02/2025
- AgTech en Europe : réduire la fracture technologique entre grandes et petites exploitations - 25/02/2025
- Kate Bush et Hans Zimmer, sortent un album silencieux / YNSECT un redressement judiciaire pour faciliter une reprise / Bird claque la porte des Pays-Bas - 25/02/2025