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Recession Playbook : le guide CFO des 5 priorités à activer en cas de ralentissement

Quand l’environnement macroéconomique devient incertain, les startups n’ont plus le luxe de l’improvisation. Inflation persistante, resserrement du crédit, ralentissement de la demande : autant de signaux faibles qui imposent un repositionnement stratégique. Le CFO, longtemps cantonné au rôle d’optimisateur en coulisse, devient l’un des architectes du cap à tenir.

Dans ce contexte, un mot d’ordre émerge : préparation. Car si le ralentissement n’est pas encore officiellement là, les entreprises qui le traverseront avec le moins de dommages sont celles qui auront agi en amont. Anticiper. Prioriser. Consolider. Voici le playbook en cinq leviers que chaque CFO devrait activer dès aujourd’hui.

D’un impératif de vitesse à une exigence de résilience

Pendant une décennie, la norme dominante dans l’écosystème startup s’appelait “growth at all costs”. Il fallait croître vite, capter des parts de marché, recruter massivement, lever encore. La croissance était une fin en soi. Dans cet environnement, les CFO devaient suivre, rationaliser, justifier après coup.

Mais les règles ont changé. Lorsque les liquidités se font rares, que les investisseurs exigent des signaux de rentabilité, le modèle se retourne. Ce n’est plus la vitesse qui compte, mais la trajectoire. Non pas combien on grossit, mais comment. La résilience devient une stratégie, pas un repli.

La première mission du CFO est alors de poser les bonnes questions :
→ Ce que nous appelons croissance… crée-t-il réellement de la valeur ?
→ Quels clients, quelles lignes de produits méritent encore nos efforts ?
→ Sommes-nous capables de tenir si les revenus chutent brutalement de 20 ou 30 % ?

Ce changement de perspective n’est pas cosmétique. Il transforme la façon de fixer les objectifs, d’allouer les ressources, et de structurer les équipes.

Sécuriser la trésorerie : poser les amortisseurs avant la secousse

En cas de turbulence, la survie d’une entreprise tient rarement à sa vision long terme. Elle dépend de sa capacité à tenir 6, 9 ou 12 mois sans dépendre d’un tour de table. Dans ce contexte, la trésorerie redevient un sujet stratégique, non pas à surveiller mais à orchestrer activement.

Le premier indicateur est le runway : combien de mois d’activité peut-on couvrir, à revenus constants ou en baisse ? La recommandation est claire : viser au minimum 12 mois de visibilité financière, y compris en intégrant un stress test réaliste.

Mais le pilotage ne s’arrête pas là. Il implique d’activer plusieurs leviers concrets :

    • Ligne de crédit : la négocier avant d’en avoir besoin. Attendre, c’est risquer de ne plus être en position de force.
    • Cycle de paiement : raccourcir les délais de règlement des clients, tout en allongeant ceux envers les fournisseurs. Cela demande de la diplomatie, mais aussi de l’assertivité.
    • Buffers de sécurité : instaurer des marges de manœuvre dans les contrats, dans les prévisions, dans les engagements.
    • Revue des charges fixes : chaque coût doit être interrogé selon une logique binaire : mission critique ou ajustable.

Ce travail donne au CFO ce que tout stratège recherche : du temps et des options. Deux ressources aussi précieuses que rares en période de crise.

Recalibrer le triptyque : Burn, Budget, Break-even

Trois indicateurs souvent surveillés indépendamment doivent désormais être analysés comme un tout cohérent.

    • Burn rate : au-delà du montant, c’est la flexibilité de ce burn qui importe. Que se passe-t-il si les revenus baissent de 30 % ? Peut-on adapter sans sacrifier l’expérience client ? Dispose-t-on de scénarios prêts à être activés ?
    • Budget : il ne s’agit pas de couper pour couper. La réduction des dépenses n’a de sens que si elle protège les fondamentaux. Cela suppose de différer certaines embauches, d’optimiser les licences logicielles, mais aussi d’évaluer le retour sur chaque projet. Ce n’est plus une logique de confort, mais d’arbitrage froid.
    • Break-even point : en période d’euphorie, rares sont les startups qui cherchent activement à se rapprocher de leur seuil de rentabilité. En période de crise, ce devient une priorité. Même sans l’atteindre, s’en approcher augmente le pouvoir de négociation face aux investisseurs ou aux partenaires.

Ce triptyque constitue le cœur du pilotage stratégique. Il permet de transformer une baisse subie en un recentrage contrôlé.

Identifier les revenus essentiels, abandonner le reste

Une entreprise qui traverse une récession sans fracture est une entreprise qui a su distinguer le superflu de l’essentiel.

Le CFO doit ici jouer un rôle de catalyseur : pousser l’organisation à analyser la rentabilité réelle de chaque ligne de produit, de chaque segment client, de chaque canal de distribution.

Il ne s’agit pas de tout arrêter, mais d’arbitrer avec lucidité :

    • Quels clients génèrent une marge nette élevée ?
    • Quels produits offrent un cycle de vente court et prévisible ?
    • Quelle base existante peut générer plus de valeur par la rétention que par l’acquisition ?

Cela impose un recentrage, souvent inconfortable. Abandonner un produit que l’on a mis des mois à développer. Freiner un marché que l’on voulait conquérir. Mais c’est ce type de décisions qui fait la différence entre survie et disparition.

Instaurer une discipline de communication financière

L’incertitude nourrit l’anxiété. Et l’anxiété nourrit les décisions court-termistes. Pour y faire face, une seule réponse : la clarté.

Le CFO a ici un rôle fondamental à jouer. D’abord en interne, auprès des équipes :

    • Montrer la situation réelle.
    • Expliquer les décisions.
    • Partager les objectifs de cash, de marge, de sécurité.

Ensuite, vis-à-vis des investisseurs. Il ne faut pas attendre qu’une mauvaise nouvelle survienne pour renouer le dialogue. Un reporting simple, régulier, même si les chiffres sont encore flous, démontre une posture proactive. Et cette posture renforce la confiance, parfois plus que les résultats eux-mêmes.

La transparence financière devient alors une arme stratégique. Elle ne s’affiche pas sur une ligne de compte, mais elle se voit dans la mobilisation des équipes, dans la stabilité des relations partenaires, dans la vitesse de réaction en cas de choc.

La stratégie comme filet de sécurité

Recession-proofing n’est pas un slogan. C’est une méthode. Pas pour éviter la tempête, mais pour y résister sans dévier.

Le CFO qui accepte ce rôle de stratège opérationnel — entre contrôle des coûts, priorisation des marges et transparence absolue — ne protège pas seulement la trésorerie. Il protège la mission, l’équipe, et l’avenir de l’entreprise.

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