Accompagner le changement : reconnaître le positif
Par Aude Sibuet, contributrice FrenchWeb
- Enjeux et périmètre de la transformation en question,
- Contraintes (budgétaire, de temps, etc.) de celles et ceux qui la mettent en oeuvre
- Postulats et convictions de ces derniers.
Atouts et limites du design thinking
Le « design thinking » est de plus en plus prisé comme une méthode clé pour réussir les projets de transformation. Chez AKKA DS, nous réalisons cette méthode en trois grands temps : inspiration, idéation, matérialisation itérative. Effectivement, cette démarche au service de l’innovation comporte de nombreux avantages.
- Elle permet d’interroger le problème initial pour trouver des réponses… aux bonnes questions.
- Elle repose sur l’empathie et permet d’engager dès l’amont et de manière authentique les parties prenantes. Ceci est un atout considérable pour préparer le terrain du troisième avantage.
- Elle donne lieu à une matérialisation rapide d’une première solution, validée et soutenue par les parties prenantes. Une bonne base pour commencer à itérer… et aboutir à une solution durable.
- Elle permet aux équipes de travailler d’une nouvelle manière ensemble et de développer l’intelligence collective.
Nous privilégions les solutions issues du design thinking qui répondent à ces trois critères : désirabilité par les clients et les équipes, viabilité économique, potentiel pour changer d’échelle.
Le design thinking n’est pas la seule démarche répondant aux enjeux contemporains, comme notamment encourager dans les équipes l’ouverture et l’agilité. Il en existe d’autres, que les spécialistes peuvent combiner, telles que l’open innovation, le reverse mentoring, l’excubation, « l’appreciative inquiry », etc. Intéressons nous à cette dernière.
Construire sur les forces plutôt que sur les problèmes
Contrairement au design thinking, l’appreciative inquiry est un processus de transformation qui repose sur les forces, le positif, ce qui fonctionne dans les organisations. Petits pas par petits pas, de manière individuelle et collective, cette méthode permet au sein de l’organisation la co-construction d’un futur désiré et partagé par tous.
Un sujet, ce n’est rien à résoudre mais tout à construire !
Pour démarrer, il faut identifier le ou les sujets sur lesquels l’entreprise souhaite concentrer son travail de transformation. Comme l’indique Béatrice Lecerf et Yann Viot dans leur ouvrage (1), un sujet, ce n’est rien à résoudre mais tout à construire. Les porteurs se poseront cette question clé : « Dans notre organisation, qu’est-ce que nous voulons le plus voir se développer ? »
« Qu’est-ce que nous voulons le plus voir se développer dans notre organisation ? »
Dès que les équipes commencent à explorer un sujet, à réfléchir à une question, elles transforment déjà le monde sur ce sujet. Selon les auteurs et les scientifiques, les images positives véhiculées par les discours et les mots attirent les énergies et sont génératives. Une cohérence se construit et est une grande source d’apprentissage.
Béatrice Lecerf et Yann Viot nous livrent une astuce. Reformuler un problème (a) en une opportunité (b) en utilisant des mots et des tournures de phrases positifs qui invitent à imaginer un futur désirable. Par exemple :
a. Qu’est-ce qui fait que nous avons un turnover de 15 % ?
b. Pourquoi avons-nous 85 % de collaborateurs satisfaits ?
Passer de la logique causale à la logique effectuale pour s’affranchir de la complexité
Comme le souligne Dominique Vian, professeur associé en entrepreneuriat à SKEMA Business School, dans un article publié dans la Harvard Business Review (3), face à un sujet complexe (4), l’idée est de changer le cadre de référence de la réflexion et de passer d’une logique causale à une logique effectuale. Dans la logique causale, le nécessaire est guidé par le devoir : « Que dois-je faire pour ? ». Dans la logique effectuale, le champ des possibles s’ouvre « Que puis-je faire avec ? ».
Une fois que votre sujet est déterminé, il suffit de suivre la recette de l’appreciative inquiry en quatre temps :
- Diagnostic : réunissez vos meilleurs ingrédients
- Projection : imaginez le beau plat que vous pourrez réaliser avec.
- Priorisation : définissez votre recette pour le réaliser.
- Mise en oeuvre : passez en cuisine pour préparer votre plat.
Les objectifs de la Start-up et les avantages de chaque phase sont résumés dans l’infographie ci-dessous :
David Cooperrider et Suresh Srivastva ont théorisé et expérimenté cette méthode en 1980 à la Case Western Reserve University, une université de recherche privée américaine située à Cleveland dans l’Ohio.
Le positif est-il un frein à l’innovation ?
Cette méthode permet de mettre les parties prenantes dans un état d’esprit positif, de reconnaître l’intérêt de l’altérité (2) et de changer le cadre de référence face à la complexité. La phase de mise en oeuvre peut sembler néanmoins moins rapide et opérationnelle que la phase de matérialisation du design thinking. De ce point de vue, l’appreciative inquiry est-il moins prompt à porter l’innovation sur le terrain ?
Ce n’est pas l’avis de Bernard Anselem, médecin et conférencier en neuropsychologie qui soutient l’efficacité de la méthode d’appreciative inquiry. Selon le médecin, si l’on en juge par les études empiriques – étude expérimentales des conséquences d’un exercice sur l’humeur ou le comportement – comme par les études neurophysiologiques – étude des réseaux et des grandes fonctions cérébrales, les démarches d’accompagnement du changement basées sur le positif sont loin d’être des visions idéalistes, naïves ou relevant d’une méthode Coué. Reposant sur une orientation de l’attention sur le réel et sur la logique effectuale, elles sont d’une redoutable efficacité.
La contributrice:
Aude Sibuet est Culture Manager. Son expertise est à la croisée de trois domaines: communication corporate, change management et social selling. Elle est spécialisée dans l’accompagnement de la transformation culturelle des entreprises, notamment managériale.