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ALEPH FARMS : Redéfinir l’industrie de l’alimentation à bout de souffle grâce à l’agriculture cellulaire

WE LOVE INNOVATION, un programme pour découvrir celles et ceux qui dessinent le monde de demain.

L’ascension d’une startup emblématique à la croisée de l’AGTECH et de la FOODTECH

Créé en 2017 par Didier Toubia et The Kitchen Hub (l’initiative de technologie alimentaire du groupe agroalimentaire Strauss), avec le concours du professeur Shulamit Levenberg du Technion, ALEPH FARMS s’est rapidement imposée comme une figure phare de l’innovation dans le domaine des protéines cultivées.

Innovation et méthode révolutionnaire

L’innovation majeure mise au point par Aleph Farms réside dans l’ingénierie tissulaire. Sous l’égide du professeur Shulamit Levenberg, Doyenne de la Faculté de génie biomédical du Technion, l’équipe a mis au point une méthode révolutionnaire pour fabriquer des steaks à partir de cellules souches bovines. Cette méthode novatrice permet la culture in vitro de tissus de viande pendant une période de trois à quatre semaines.

Photo: DECODE MEDIA / FRENCHWEB.FR

Un processus de culture inspiré de la nature

La méthode développée est une véritable prouesse technique. Elle permet l’interaction de quatre types de cellules animales (fibres musculaires, vaisseaux sanguins, tissus adipeux et tissus conjonctifs) qui sont cultivées in vitro afin de reproduire le tissu animal. Cette méthode confère au produit final une texture similaire à celle de la viande traditionnelle.

La protéine de soja, un choix stratégique

Dans le cadre de cette culture, un « échafaudage » à base de protéine de soja a été retenu. Cette protéine, sous-produit de la production d’huile de soja, est non seulement économique et accessible, mais sa structure poreuse favorise la croissance cellulaire. De plus, elle offre la flexibilité de créer des « échafaudages » de différentes tailles et formes en fonction des besoins. La Professeure Levenberg explique à ce sujet que : « Nous envisageons la possibilité d’utiliser d’autres protéines végétales pour construire les échafaudages à l’avenir. Cependant, la recherche actuelle avec la protéine de soja est essentielle pour démontrer la faisabilité de produire de la viande à partir de plusieurs types de cellules sur des plates-formes à base de plantes. » En effet, l’utilisation de protéines végétales permet d’augmenter la similarité entre la viande cultivée in vitro et la viande authentique.

Vers une redéfinition des systèmes alimentaires mondiaux

La mission d’Aleph Farms est ambitieuse : réinventer les systèmes alimentaires mondiaux pour réduire leur impact environnemental, résoudre des crises majeures comme la faim et la malnutrition et renforcer la diversité d’approvisionnement des pays. Il est à noter que l’équipe d’Aleph Farms ne considère pas leur solution comme la seule alternative, mais comme complémentaire à d’autres, telles que les steaks végétaux ou la diversification des sources de protéines animales.

De nombreux avantages, mais aussi des défis

Les avantages des steaks produits par Aleph Farms sont nombreux. Ils incluent une production maîtrisée qui peut être mise en œuvre partout dans le monde, un temps de production réduit et un impact environnemental minime. Cependant, des inconvénients ou incertitudes demeurent, notamment en matière de qualité sanitaire et nutritionnelle, de contrôle total de la composition et de perception des consommateurs. Et reste que le coût très élevé même s’il est en baisse régulière et de nombreuses molécules d’origine animale (sérum de veau fœtal) ou synthétiques (hormones, facteurs de croissance) utilisées dans le milieu de culture, qui devront être synthétisées en grande quantité en usine.

Une production assurée par la startup elle-même

Pour opérer la production, ALEPH FARMS construit ses propres usines. Aleph Farms est basé à 45 minutes de Tel Aviv, à Rehovot, où se dresse son siège social mais également son laboratoire de recherche, et une unité de production. La start-up se prépare à ouvrir deux nouvelles usines, en Israël et à Singapour, pour augmenter ses capacités de production avant le lancement de ses steaks prévu au plus tard début 2024. En choisissant de produire elle-même sa viande, Aleph Farms s’assure une maîtrise totale de la qualité, tout en diminuant les risques de contamination. Cette décision témoigne aussi de la confiance de l’entreprise dans la viabilité à long terme de son modèle de production.

ALEPH FARMS LABS
Photo: DECODE MEDIA / FRENCHWEB.FR

L’acceptabilité par le consommateur, un enjeu majeur

Un défi majeur pour Aleph Farms et l’ensemble du secteur de la viande cultivée en laboratoire est l’acceptabilité par le consommateur. Le changement de perception peut prendre du temps, et il est essentiel pour Aleph Farms de garantir la qualité et le goût de ses steaks. La startup a d’ailleurs banni le mot viande de son champs lexical pour apporter plus de clarté et réduire la friction avec les défenseurs de la filiere de la production bovine. Cela nécessite une communication ouverte et transparente, des campagnes éducatives pour sensibiliser les consommateurs aux avantages de la viande cultivée en laboratoire, et des efforts pour rendre les produits aussi accessibles que possible en termes de coût.

Pour évangéliser auprès du grand public, ALEPH Farms s’est allié au chef Marcus Samuelsson  qui a rejoint la startup en tant qu’investisseur, conseiller culinaire et accompagner les prises de paroles afin de mettre en valeur les produits commercialisés sous la marque ALEPH Cuts. Tout au long de son ascension vers la renommée en tant que célèbre chef de 13 restaurants à travers le monde, auteur à succès du New York Times et personnalité de la télévision, Marcus Samuelsson a mis à profit son expérience unique pour promouvoir la diversité dans le monde culinaire.

Peu connu en France, Marcus Samuelsson a remporté huit prix de la Fondation James Beard en tant que chef, auteur et personnalité de la télévision, notamment pour avoir présenté No Passport Required sur PBS. Il est apparu en tant qu’Iron Chef sur Netflix dans la série à succès Iron Chef: Quest for an Iron Legend. Ses restaurants dans le monde incluent Red Rooster Harlem (New York) et Red Rooster Overtown (Miami), MARCUS Montréal, Marcus B&P à Newark, Streetbird au Yankee Stadium, Marcus at Baha Mar Fish + Chop House aux Bahamas, le récent Hav & Mar à Chelsea (New York City) et Marcus Bar and Grille à Atlanta

De fortes disparités dans l’accessibilité qui témoignent de la dimension pionnière d’ALEPH FARMS

Une enquête réalisée en 2019 révèle que les intentions d’achat de viande in vitro sont plus élevées en Chine (59%) et en Inde (56%) qu’aux États-Unis (30%). Il convient de noter que les participants à cette enquête étaient principalement des citadins aisés, avec environ 1000 personnes interrogées en Inde et en Chine.

Cependant, une autre enquête menée en 2015 par des chercheurs français, dont l’INRAE, auprès de scientifiques et d’étudiants de différents pays du monde, révèle un pourcentage beaucoup plus élevé de sceptiques. Seulement environ 10% des personnes interrogées se déclarent prêtes à consommer régulièrement de la viande artificielle, la majorité préférant réduire leur consommation de viande. Enfin, environ un tiers des personnes interrogées restent indécises sur la question.

Légalisation et réglementation, des obstacles à surmonter

Un autre défi majeur pour Aleph Farms est la législation et la réglementation. La réglementation de la viande cultivée en laboratoire diffère largement d’un pays à l’autre, et est encore en cours de développement dans de nombreux endroits. Aux États-Unis, la Food and Drug Administration (FDA) et le United States Department of Agriculture (USDA) partagent la réglementation de la viande cultivée en laboratoire, assurant à la fois la sécurité alimentaire et la précision de l’étiquetage.

En Europe, la réglementation est également complexe. L’Agence européenne de sécurité des aliments (EFSA) est responsable de l’évaluation de la sécurité de ces nouveaux aliments. En décembre 2018, la Cour de justice de l’Union européenne a déclaré que les produits issus de nouvelles techniques de mutagénèse, comme le CRISPR, sont soumis aux mêmes réglementations que les OGM, ce qui pourrait également s’appliquer à la viande de laboratoire.

Aleph Farms doit donc travailler en étroite collaboration avec ces entités pour garantir que leurs produits respectent toutes les réglementations sanitaires et de sécurité pertinentes.

Un financement important mais pas encore à la hauteur des enjeux

Pour assurer son développement Aleph Farms comptabilise 119,4 millions de dollars levés auprès de 21 investisseurs dont Leonardo DiCaprio, aux cotés de Disrupt AD, Preregrine Ventures ou encore Strauss Group, au cours de différents tours de table (2,4 millions de dollars en 2017, 14,4 millions de dollars en 2019 lors de sa série A, et un autre tour de financement de série B de 119,4 millions de dollars en 2021.

Stade de financement Investisseurs
Funding Round Markus Samuelsson
Venture Round Leonardo DiCaprio
Series B Alumni Ventures, L Catterton (Michael J. Farello), VisVires New Protein (Kenneth Lee), BRF, Thai Union Group, Strauss Group, DisruptAD (Mansour AlMulla), Cargill, Peregrine Ventures, CJ CheilJedang Corp., Skyviews Life Science, Millenium Food-Tech, CPT Capital, Champel Capital
Series A CPT Capital, Technion Seed, Cargill, M-Industry, New Crop Capital, Strauss Group, Jesselson Capital, VisVires New Protein (Kenneth Lee), Peregrine Ventures
Seed Round New Crop Capital, The Kitchen – FoodTech Hub

Des perspectives d’avenir prometteuses

Malgré ces défis, l’avenir semble prometteur pour Aleph Farms et l’industrie de la viande de laboratoire. L’engagement croissant envers la durabilité, la demande croissante de protéines alternatives et l’amélioration constante de la technologie signifient que le secteur est en plein essor.

En résumé, Aleph Farms est en première ligne pour changer notre façon de produire et de consommer de la viande. Si elle réussit, elle pourrait aider à transformer l’industrie de l’élevage, réduire l’impact environnemental de notre alimentation et fournir une source de protéines plus durable et éthique. C’est là tout l’enjeu de la FOODTECH, une technologie qui vise à nourrir la planète de manière plus efficace et durable.

Enfin, la production de viande in vitro est à l’heure actuelle, entièrement entre les mains du secteur privé, avec plus d’une cinquantaine de start-up travaillant sur ce sujet .

En synthèse:

Avantages de la viande cultivée en laboratoire

  1. Durabilité : La production de viande en laboratoire nécessite moins de terre, d’eau et de ressources énergétiques que l’élevage traditionnel. Cela pourrait aider à réduire l’empreinte carbone de la production de viande.
  2. Bien-être animal : La viande de laboratoire élimine la nécessité d’élever et d’abattre des animaux, ce qui pourrait réduire considérablement la souffrance animale.
  3. Sécurité alimentaire : Comme la viande de laboratoire est produite dans des conditions contrôlées, le risque de contamination par des bactéries, des virus ou des parasites est nettement réduit.

Inconvénients de la viande cultivée en laboratoire

  1. Acceptabilité par le consommateur : De nombreux consommateurs sont encore sceptiques quant à l’idée de manger de la viande cultivée en laboratoire. Il faudra du temps pour changer ces perceptions.
  2. Coût : Actuellement, la production de viande de laboratoire est assez coûteuse. Bien que les coûts soient en baisse, la viande cultivée en laboratoire n’est pas encore compétitive en termes de prix avec la viande traditionnelle.
  3. Questions éthiques : Certaines personnes ont exprimé des préoccupations éthiques quant à l’ingénierie de la viande en laboratoire, bien que ces préoccupations soient largement débattues.

ALEPH FARMS en 6 dates:

    • 2017 : Co-fondation d’Aleph Farms avec l’incubateur israélien de food-tech « The Kitchen » du groupe Strauss Ltd.
    • Décembre 2018 : Lancement du premier prototype de steak cultivé à partir de cellules de vache.
    • Septembre 2019 : Réalisation de la première expérience mondiale de culture de viande à bord de la Station spatiale internationale.
    • Avril 2020 : Annonce des objectifs de carbone net zéro, à atteindre dans les opérations d’ici 2025, et dans toute la chaîne d’approvisionnement d’ici 2030.
    • Février 2021 : Présentation du premier steak de côtelette au monde à base de cellules, produit par bio-impression 3D.
    • Juillet 2021 : Levée de 105 millions de dollars lors d’un tour de financement de série B.

 

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