Aux États-Unis, la réforme pour réguler les géants de la Tech s’articule
AFP
Le gouvernement américain et des sénateurs républicains se mobilisent pour traduire la colère de Donald Trump contre les géants des technologies en une réforme de la loi qui accorde l’immunité aux plateformes dans la régulation des contenus. Le ministère de la Justice a présenté mercredi des orientations pour une réforme de la Section 230 du « Communications Decency Act ». Pierre angulaire de l’Internet américain, elle protège les réseaux sociaux contre toute poursuite judiciaire liée aux contenus publiés par des tiers.
Mais l’interprétation de cette loi par les tribunaux « protège les plateformes des conséquences d’une large palette d’activités illicites organisées via leurs services » et leur permet de modérer les contenus « avec trop peu de transparence et sans avoir à rendre de comptes », estime le ministère. En parallèle, quatre sénateurs républicains soutiennent un projet de loi qui permettrait aux utilisateurs des réseaux de les poursuivre en justice « s’ils appliquent leurs règles de façon injuste ou inéquitable ».
« Pendant trop longtemps, les géants de la Tech comme Twitter, Google et Facebook ont utilisé leur pouvoir pour museler la parole politique des conservateurs », accuse le sénateur républicain Josh Hawley, auteur du projet, dans un communiqué publié mercredi. La querelle politique n’est pas nouvelle. Depuis des années, de nombreux conservateurs américains accusent les réseaux sociaux de favoriser le camp démocrate.
Anti-constitutionnel
Le président, notamment, tient régulièrement des propos acerbes contre la Silicon Valley, même s’il est suivi par 82 millions de personnes sur Twitter, son réseau de prédilection où il fait campagne pour sa réelection tous les jours. Mais il y a quelques semaines, le réseau des gazouillis a épinglé des messages du tempétueux milliardaire comme « trompeurs » et faisant « l’apologie de la violence », une décision sans précédent.
Excédé, le locataire de la Maison Blanche avait réagi en signant un décret s’attaquant à la Section 230, pour en modifier le champ d’application, affirmant que l’immunité ne pouvait s’étendre à ceux qui pratiquent la « censure de certains points de vue ».Le projet de loi de Josh Hawley veut retirer cette protection aux services qui « restreignent l’accès ou la disponibilité d’un contenu (…) à l’aide d’un algorithme qui applique de façon sélective » leur règlement. Josh Hawley appelle ainsi les plateformes à faire preuve de « bonne foi », sous peine de perdre leur immunité et de payer des amendes.
Mais des experts considèrent que ces tentatives de réguler les réseaux sociaux sont anti-constitutionnelles. « C’est une violation directe du Premier amendement (sur la liberté d’expression) », commente Eric Goldman, directeur du High-Tech Law Institute de la Santa Clara University. Une telle loi donnerait lieu à « un nombre infini de procès » contre les sociétés numériques à cause du sens très vague de la « bonne foi », a-t-il ajouté.
Promouvoir plus de concurrence entre les plateformes
Les efforts pour amender la Section 230 ne sont pas limités aux républicains. En janvier, Joe Biden, le candidat démocrate à la présidentielle, a affirmé que la loi de 1996 devait être « révoquée » pour Facebook pour propagation « de mensonges ». D’autres personnalités de son camp accusent régulièrement les plateformes de laisser passer trop de désinformation et de contenus alimentant la violence et la haine. Ils pourraient donc être en partie d’accord avec le gouvernement.
Le ministère insiste notamment sur la possibilité de retirer leur immunité aux sites qui facilitent ou permettent des activités illégales, comme l’exploitation des enfants, le terrorisme ou encore le harcèlement numérique. Autant de pratiques contre lesquelles les réseaux se sont mobilisés, sans en venir à bout. La réforme, si elle voit le jour, est aussi censée promouvoir plus de concurrence entre les plateformes et les forcer à plus de transparence vis-à-vis des utilisateurs quand elles prennent des décisions de modération… comme celle de signaler ou masquer des tweets du chef de l’Etat.
« C’est une proposition choquante », s’est indigné Matt Schruers, président de la Computer & Communications Industry Association, un lobby qui représente les grands groupes numériques et informatiques. « Nous sommes dans une période de pandémie, d’injustice raciale et de campagne électorale, et le ministère propose de retirer de ce statut essentiel les protections légales qui permettent de lutter contre la désinformation liée au coronavirus, les propos racistes ou les tentatives de manipulations étrangères ».
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