Candidats de la Belle Alliance Populaire, vous vous dites de Gauche?
Lors des échanges du premier tour de la Primaire, les candidats de la Belle Alliance Populaire avaient largement abordé leur vision de l’entreprise, du travail et du programme économique du prochain quinquennat. En période de campagne, il n’est pas surprenant de retrouver des pétitions de principe qu’on a pu trouver aussi lors de la Primaire de Droite sur d’autres thèmes. Mais la volonté manifeste d’escamoter les vrais sujets de débat était très préoccupante et le reste à l’heure du deuxième tour.
Tous les candidats déclaraient vouloir une réforme de la fiscalité pour plus d’équité à l’heure du numérique. Ils s’engageaient à lutter contre les optimisations excessives des entreprises multinationales qui bénéficient de nos marchés de consommation mais ne payent pas d’impôts sur nos territoires. On comprend bien leur proposition un brin populiste de «faire les poches aux GAFA» mais ce n’est pas un sujet de débat sérieux! Bien sûr il faut mieux et plus équitablement collecter l’impôt, mais c’est un pur sujet d’exécution administrative et de diplomatie européenne…Et ceci depuis plus de 5 ans.
La formation professionnelle les réunissait également sur des grands principes: un «droit universel à la formation tout au long de sa vie» (Benoît Hamon) ou un droit à la formation «garantie» (Manuel Valls). Arnaud Montebourg était plus précis en proposant une obligation de formation pendant 12 des 24 mois d’indemnisation et Jean-Luc Benhamias proposait une réforme de l’assurance chômage pour qu’elle prenne en charge l’indemnisation autant que la formation («sur le modèle danois»). Pôle Emploi n’est-il déjà pas en charge des 2 sujets? Le compte personnel d’activité (CPA) ne vient-il pas d’être lancé par la loi El Khomri?
Presque tous (sauf Jean-Luc Benhamias) s’accordaient enfin sur une volonté d’harmoniser les régimes de protection sociale pour éviter les ruptures de traitement entre les salariés (régime général) et les indépendants (RSI). Les salariés agricoles au MSA étaient oublié au passage…Ce consensus et ce survol très rapide d’un sujet pourtant complexe était de prime abord étonnant! Mais l’explication venait avec l’inévitable débat autour d’Uber et des VTC: il devenait alors évident que les candidats souhaitent en réalité aligner le cadre juridique et social des indépendants sur celui des salariés en contrat à durée indéterminée. Pourtant ils ne peuvent ignorer les faits des 35 dernières années: qu’on l’approuve ou pas, le recours aux CDD et aux indépendants s’est développé car il permet de contourner les coûts et la rigidité du CDI! Dès lors appeler de leurs vœux le développement du travail indépendant en proposant en même temps des mesures qui le rendraient inopérant est d’un cynisme total.
L’organisation et le cadre juridique du travail sont pourtant des sujets de taille qui mériteraient bien mieux qu’un faux consensus et un jeu de dupes. Avec un vrai débat, on évoquerait les jeunes chômeurs aux qualifications faibles ou inadaptées qui trouvent aujourd’hui une activité rémunérée auprès des plateformes numériques et préfèrent cela à l’inactivité, même si les revenus sont faibles et les conditions sont dures au début. On rappellerait qu’après 25 ans de refus du CIP, du CIE ou de regards méprisants sur les «petits boulots à l’Allemande» issus des réformes de Gerhard Schroeder, la France connaît toujours un taux de chômage à 10% de la population active et un chômage des jeunes scandaleusement élevé. Il deviendrait donc moins facile de présenter comme une évidence le renforcement ou l’aménagement d’une politique de l’emploi qui ne fonctionne pas. Et il ne serait pas permis d’éviter les sujets qui fâchent: un salaire minimum le plus élevé d’Europe, un contrat de travail à durée indéterminée qui date du plein emploi des années 1960, un système de formation coûteux et inefficace à l’heure de la révolution numérique.
Avec un chômage de masse qui détruit des vies, notre ciment social et notre économie, comment peut-on encore vouloir défendre les droits des salariés plutôt que l’emploi? Comment peut-on refuser d’explorer des pistes d’insertion sociale par l’accès au monde du travail sous prétexte que cela peut se traduire par une moindre rémunération que le SMIC?
Messieurs les candidats du 2eme tour des Primaires de la Belle Alliance Populaire, aborder les thèmes à la mode de l’«überisation » ou de la taxation des robots ne vous rend en rien modernes ou novateurs. Par vos programmes vous confirmez le choix du chômage qui précarise et démoralise, plutôt que celui de l’emploi qui redonne une place et une dynamique à l’individu. Quelle conception de l’homme se cache derrière le choix de l’inactivité subventionnée de plusieurs millions de personne? Est-ce cela la Gauche?
Cyril Zimmermann est CEO chez AdUX.
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Pour ce Cyril Zimmermann, la solution passe par une rémunération en dessous du SMIC… alors que des salariés en CDD ne trouvent pas de logements en IDF à cause de ce statut précaire qui effraie les propriétaires bailleurs. #Pathétique
En résumé pour cet homme, il vaut mieux des travailleurs pauvres que des chômeurs.
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