Comment lutter contre la fragmentation du poste de travail
Il y a peu j’évoquais ici même avec Arnaud Rayrole et Alain Garnier la question de la fragmentation du poste de travail. Un sujet essentiel que j’ai eu l’occasion de creuser avec Richard Hugues, Director of Social Strategy chez Broadvision, qui me présentait la solution Vmoso. L’occasion de rappeler une fois que plus que non seulement les briques collaboratives doivent se parler entre elles mais doivent aussi s’intégrer avec le reste du SI métier.
Bertrand Duperrin : Pouvez-vous me dire ce qu’est Vmoso ?
Richard Hugues : C’est une plateforme de communication et de collaboration intégrée, qui permet de travailler plus efficacement. Il ne s’agit pas seulement de s’envoyer facilement des messages, mais surtout d’organiser les informations qui sont générées dans ces discussions afin de pouvoir les retrouver et y naviguer très facilement, pas seulement maintenant mais également plusieurs mois après que la conversation soit terminée. J’aime dire que Vmoso est l’endroit où le KM rencontre la collaboration mobile.
Quels types d’applications peuvent être réunies dans Vmoso ?
R. H : Voici les 5 principaux composants de Vmoso :
- Messagerie – qu’on parle de message courts – messagerie instantanée – ou longs comme l’email.
- Partage de fichiers – la plupart des tâches professionnelles mettent en jeu le partage de fichiers, et ce partage doit respecter des règles de contrôle d’accès cohérentes avec celles de la messagerie.
- Réseau social d’entreprise – certaines communications se font au sein de petits groupes de personnes, mais d’autres correspondent davantage à une logique de blog avec la possibilité pour un large public de lire et de commenter le contenu.
- Gestion de tâches – quand vous demandez à quelqu’un de faire quelque chose dans Vmoso, vous pouvez préciser qui doit le faire, qui est inclus simplement pour son information, et pour quand cela doit être fait.
- Gestion des contacts – la possibilité de gérer l’annuaire de toutes les personnes avec qui vous travaillez.
Il est clair que l’environnement de travail numérique – ou digital workplace – est un environnement très fragmenté. Avez-vous conçu Vmoso comme une réponse à cette fragmentation ? Et, plus généralement, quelle est votre stratégie au travers de Vmoso ?
R. H : Effectivement, l’un des objectifs de Vmoso est de réduire la fragmentation de l’information. Je suis très content que vous me parliez de fragmentation car c’est un sujet qui est loin de recevoir l’attention qu’il mérite. Les gens parlent beaucoup des limites de l’email que l’on peut résumer par (1) une surcharge d’informations – nous recevons trop de messages et les manières de les gérer sont inadaptées et (2) un manque de responsabilisation – être tout le temps obligé de courir après les gens et leur demander pourquoi ils ne répondent pas à vos emails ou n’ont pas fait ce que vous leur aviez demandé de faire. La plupart des gens admettent ces problèmes mais il est plus difficile pour eux de se mettre d’accord sur une solution. Il y a toujours une nouvelle application mobile à la mode qui leur fait croire qu’elle va les débarrasser des problèmes de l’email. Mais tout le monde choisit une application différente, ce qui entraine une fragmentation de plus en plus importante de la communication et de la connaissance au sein de toute sorte de services applicatifs différents et incompatibles entre eux.
La différence entre fragmentation de la communication et fragmentation de la connaissance mérite d’être observée. Si les collaborateurs de votre entreprise utilisent 10 systèmes de messagerie instantanée différents pour dire “j’aurai 10 minutes de retard”, cela a-t-il une importance ? Pas vraiment. Mais si ces échanges contiennent des informations métier dont on risque d’avoir besoin plusieurs mois ou années plus tard, cela constitue un problème bien plus important. Dans quel système a été approuvé ce contrat ? Y avez-vous encore accès alors que la personne qui l’a rédigé a quitté l’entreprise ? La fragmentation de la connaissance représente un risque très important pour les entreprises et de nombreuses personnes sont tombées dans ce piège, avec la bonne intention de résoudre les problèmes de l’email.
Ainsi, Vmoso vise à adresser les trois défis de la communication en entreprise : la surcharge d’information, la responsabilisation des personnes, et la fragmentation de l’information.
Pourquoi avez-vous adopté une approche “mobile only” pour Vmoso ? La fragmentation existe sur tous les périphériques.
R. H : Vmoso n’est pas exclusivement pour les appareils mobiles. Cette solution fonctionne aussi sur les ordinateurs de bureau. Mais cette question soulève un point important. Beaucoup de nouveaux outils de communication sont “mobile first” voire “mobile only”. Le mobile est là où se passe le buzz du secteur en ce moment et c’est la plateforme de communication préférée du grand public.
Mais la communication en entreprise est différente. Bien sûr, il y a des catégories de collaborateurs qui bénéficient grandement des avantages des appareils mobiles – comme les équipes commerciales ou les ingénieurs de terrain. Mais, il faut se souvenir que dans beaucoup d’entreprises la majorité des employés est derrière un bureau. Ils ont un clavier et une souris, un grand écran et ils vont bien sûr les utiliser plutôt que leur téléphone.
Aujourd’hui, les appareils mobile sont essentiels pour la communication d’entreprise mais une approche “mobile only” serait discrimante envers de nombreux collaborateurs. Donc plutôt que le terme “mobile first” je préfère celui d’«indépendance par rapport au terminal » et d’«indépendance par rapport à l’endroit». Vmoso donne aux utilisateurs la possibilité de choisir l’appareil et l’endroit qui convient le mieux à la tâche du moment, leur permet de passer d’un appareil à un autre facilement et d’avoir la même expérience utilisateur où qu’ils soient.
Donc Vmoso n’est pas limité aux produits de Broadvision mais peut s’intégrer avec d’autres solutions ?
R. H : Effectivement, les versions web et mobile de Vmoso étant entièrement construites autour de son API, il est donc possible d’intégrer Vmoso aux solutions d’entreprises existantes, que ce soit pour intégrer les données en backend, ou pour ajouter Vmoso dans l’interface utilisateur de l’application.
Par exemple, cela pourrait simplement être un moyen d’accéder à vos répertoires de fichiers – nous nous intégrons avec Google Drive afin de vous permettre de choisir des fichiers stockés dans Google Drive et les rendre partie intégrante d’une discussion sur Vmoso.
Cela peut aussi être beaucoup plus sophistiqué. Nous avons ainsi réalisé une intégration avec SugarCRM, afin que les discussions Vmoso puissent avoir lieu dans le contexte d’un incident rapporté au service client. Les systèmes CRM sont bons pour enregistrer qui est le client, ce qu’il a demandé et ce qu’on a fait. Par contre, ils n’ont que peu de capacités pour gérer la collaboration souvent nécessaire à la résolution d’un incident. Prenez l’exemple d’un client d’un opérateur téléphonique qui a signalé un problème sur sa ligne, nécessitant l’intervention d’un technicien. Même à cette petite échelle, la collaboration entre l’agent du support client, le client et le technicien peut vite devenir inefficace lorsque les interventions respectives des acteurs de la collaboration ne sont pas enregistrées dans une source unique de vérité. Donc si pour chaque incident client référencé dans l’outil CRM, on a dans Vmoso une discussion qui lui correspond, alors la communication devient plus efficace. Pour l’agent du support client, la discussion Vmoso est intégrée dans son outil CRM, pour le technicien elle est accessible depuis son mobile, et le client peut utiliser Vmoso depuis le web, l’application mobile ou même au travers de son système email car Vmoso s’intègre aussi avec les applications email.
C’est l’exemple typique des environnements réels de collaboration que Vmoso essaie de rendre plus efficaces, et l’intégration est une composante essentielle de ces environnements, car c’est souvent le contexte défini par les systèmes métiers qui va déclencher la collaboration.
Voyez-vous Vmoso comme une solution collaborative – ce qui est le terrain de jeu historique de Broadvision – ou pensez-vous qu’elle joue aussi sur le terrain de la gestion d’identité. Et dans ce cas comment se positionne Vmoso face à des solutions comme Okta ?
R. H : Vmoso est véritablement une solution de communication et de collaboration. Je ne la présenterais pas comme une solution de gestion d’identité. Evidemment, il y a effectivement un recouvrement entre collaboration et identité, mais nous nous attendons à ce que les organisations aient un système de gestion d’identité existant – comme Active Directory. Vous pouvez bien sûr utiliser Vmoso sans annuaire mais même dans ce cas je ne le vois pas comme un système de gestion d’identité.
Quels sont les autres défis auxquels répond Vmoso ?
R. H : Jusqu’à présent j’ai parlé de la communication au sein de l’entreprise mais Vmoso permet aussi d’améliorer la manière dont les organisations communiquent avec leurs clients et leurs partenaires. Beaucoup de nouveaux outils collaboratifs sont dédiés à l’interne mais Vmoso essaie de combler le fossé entre communications internes et externes.
En tant que consommateur il peut être réellement frustrant de communiquer en ligne avec votre opérateur téléphonique, votre fournisseur d’électricité ou avec des enseignes de grande distribution. Si vous leur téléphonez, vous êtes automatiquement dirigé vers un serveur vocal; si vous leur envoyez un email, vous risquez d’attendre 48h ou plus pour avoir une réponse; et le service client via les medias sociaux est encore trop souvent une façade marketing devant les canaux traditionnels de service client. Vmoso permet aux entreprises d’offrir à leurs clients un point de contact unique pour les échanges avec le service client, une plateforme au sein de laquelle tout l’historique des conversations est conservé pour les deux parties.
Quels bénéfices ont déjà été mesurés pour les clients de Vmoso?
R. H : Notre affirmation est que Vmoso peut vous faire économiser une heure par jour en communiquant et collaborant de manière plus efficace. Bien sûr le chiffre exact dépendra de votre métier. McKinsey a publié un rapport intitulé “The social economy: unlocking value and productivity through social technologies” sur le temps que les “travailleurs du savoir” passent à rechercher de l’information et à communiquer. Ils ont estimé que les technologies sociales pourraient augmenter la productivité de 20 à 25%. Le rapport date d’il y a 4 ans mais il est autant d’actualité qu’en 2012. C’est justement les sources d’inefficacité identifiées ici – le temps passé à communiquer et à rechercher de l’information – que Vmoso adresse.
Bien sûr une des choses qui rend difficile la mesure des bénéfices apportés, c’est que personne (ou presque) ne mesure le temps passé avec leurs vieux outils inefficaces. Ils savent que quelque chose ne va pas, mais ils n’arrivent pas à le mesurer avec précision. Ainsi, une des étapes de notre méthodologie d’implémentation de Vmoso est de démarrer par un audit des outils et des process utilisés par l’entreprise et, de là, identifier où les améliorations les plus significatives peuvent s’insérer. Ensuite, au fur et à mesure de l’avancement du projet, on mesure les résultats et on les compare avec les objectifs définis au départ.
Article initialement publié sur Bloc-notes, le blog de Bertrand Duperrin.
Bertrand Duperrin est Digital Transformation Practice Leader chez Emakina. Il a été précédemment directeur conseil chez Nextmodernity, un cabinet dans le domaine de la transformation des entreprises et du management au travers du social business et de l’utilisation des technologies sociales.
Il traite régulièrement de l’actualité social media sur son blog.
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