Coronavirus : la Chine a franchi un nouveau cap dans la surveillance de masse de sa population
Avec l’épidémie de coronavirus qui met le pouvoir communiste à rude épreuve, le big data a le vent en poupe en Chine. L’usage des données et de l’intelligence artificielle pour surveiller la population chinoise n’est évidemment pas une nouveauté dans l’Empire du Milieu, mais le phénomène s’est considérablement accéléré avec la crise sanitaire de ce début d’année.
En effet, afin d’endiguer l’épidémie du nouveau coronavirus Covid-19, les autorités chinoises ont lancé de nouvelles campagnes de collecte de données pour mieux retracer les déplacements des résidents dans les espaces publics. Une manière pour Pékin de détecter les personnes identifiées, mais aussi de les traquer purement et simplement, ce qui ne manque pas de soulever des inquiétudes autour du respect de la vie privée des Chinois, déjà lourdement mis à mal depuis de nombreuses années avec une boulimie technologique à base d’intelligence artificielle et de big data.
Au moins 15 provinces et villes chinois, représentant une population de plus de 358 millions d’habitants (sur les 1,4 milliard que compte la Chine, ndlr), ont ainsi annoncé des mesures fortes au cours des deux derniers mois pour collecter encore plus de données personnelles. Des mesures qui viennent s’ajouter à gamme déjà bien fournie d’outils de surveillance déjà utilisés, comme la reconnaissance faciale, la géolocalisation et l’épluchage des échanges sur les différentes messageries.
Un QR code de couleur pour suivre l’état de santé des Chinois
Dorénavant, les personnes qui se rendent dans les immeubles de bureaux, dans les centres commerciaux, dans les complexes résidentiels ou encore dans le métro sont invités à scanner un QR code avec leur smartphone pour remplir des questionnaires en ligne où elles doivent renseigner le détail de leurs déplacements récents, leur adresse ou encore leur température corporelle, selon des résidents et des médias locaux cités par Reuters. Une manière pour les autorités chinoises d’identifier les citoyens qui ont été en contact avec une personne infectée par le nouveau coronavirus, mais pas seulement.
Une nouvelle fois, les géants technologiques chinois sont en première ligne pour aider le gouvernement chinois. Ainsi, Alibaba et Tencent ont été sollicités pour mettre au point un nouveau système de QR code basé sur différentes couleurs dans l’optique de suivre l’état de santé des Chinois. En fonction des informations communiquées en ligne sur leurs voyages de ces derniers mois et leur état de santé, comme de potentiels symptômes du coronavirus Covid-19 (toux sèche, fièvre…), ils reçoivent un QR code coloré qui détermine la mesure appropriée. Si le code est rouge, l’utilisateur doit rester chez lui en quarantaine au moins 14 jours. S’il s’agit de la couleur jaune, le confinement à domicile devra durer 7 jours, tandis qu’avec la couleur verte, les personnes peuvent se déplacement librement, sans restriction.
Dans un autre registre, les groupes chinois Baidu et Megvii ont été mis à contribution pour développer des technologies de reconnaissance faciale, à l’aide de l’intelligence artificielle et de caméras thermiques, pour détecter les passagers qui présentent une température anormale dans les gares. Baidu assure que son système peut contrôler plus de 200 personnes par minute. Des mesures qui ont certes permis à la Chine d’endiguer l’épidémie, mais aussi de renforcer la surveillance de la population chinoise. Certains représentants du gouvernement chinois ont d’ailleurs reconnu des problèmes de confidentialité, mais des responsables ont assuré que les données collectées seraient détruites une fois que les mesures mises en place pour contrôler la crise sanitaire actuelle seraient supprimées.
Une fièvre technologique qui suscite des craintes
Il ne s’agit là que d’un échantillon des dispositifs technologies employés par la Chine dans le cadre de l’épidémie du coronavirus Covid-19. Entre des mini-chars pilotés à distance pour désinfecter les rues, des caques de réalité virtuelles portés par les policiers pour connaître la température corporelle des passants et interpeller les personnes fiévreuses le cas échéant ou encore des drones multi-usages pour prendre la température d’habitants à leur balcon, pour diffuser du spray désinfectant et rappeler à l’ordre les personnes ne portant pas de masque dans la rue, les autorités chinoises n’ont pas manqué d’imagination pour mettre les technologies à leur service.
Cependant, cet arsenal technologique, aussi utile soit-il en ces temps de crise, mène déjà à des dérives. Reuters rapporte ainsi que certains résidents chinois doivent soumettre leurs données en moyenne six fois par jour alors qu’ils vivent dans des villes largement épargnées par l’épidémie. D’autres personnes ont quant à elles été placées en quarantaine car les autorités assurent qu’elles ont été en contact avec une personne infectée, ce que la plupart contestent. Reuters cite notamment le cas d’un habitant de Hangzhou placé en quarantaine par la police alors qu’il affirme ne pas avoir rencontré physiquement la personne infectée, un ami. Un cas parmi tant d’autres qui jettent le trouble sur l’usage des données personnelles des Chinois, surtout qu’il est difficile de savoir si l’ensemble des données collectées dans le pays sont centralisées, dans la mesure où les autorités locales ont souvent utilisé leurs propres systèmes développés par différentes entreprises.
Xuexi Qiangguo, l’application de propagande à la gloire de Xi Jinping
Toujours est-il que les autorités chinoises s’en donnent à coeur joie en multipliant les initiatives technologiques dans l’Empire du Milieu pour contrôler la population et répandre «la bonne parole» du régime au pouvoir à travers tout le pays. Pékin avait notamment lancé en janvier 2019 «Xuexi Qiangguo», une application de propagande à la gloire du président chinois Xi Jinping développée par Alibaba. Destinée à tous les cadres du Parti communiste chinois, l’application exige des utilisateurs qu’ils s’inscrivent avec leur numéro de téléphone et leur vrai nom. En fonction de leur utilisation sur l’application, ils récoltent des «points d’apprentissage».
Avec ce dispositif, Pékin peut surveiller l’utilisation de l’application, qui est obligatoire pour tous les cadres du Parti communiste chinois. Ces derniers sont donc contraints d’utiliser l’application tous les jours et d’accumuler des points pour montrer leur loyauté et leur dévouement à Xi Jinping. Téléchargée par plus de 100 millions de Chinois, l’application a en réalité été conçue pour espionner le téléphone des utilisateurs et le piloter à distance, selon le spécialiste de cybersécurité allemand Cure53. Une preuve de plus de la volonté du Parti communiste chinois (PCC) de surveiller les moindres faits et gestes de ses serviteurs au quotidien, qu’il y ait une épidémie ou non.
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