Cycle de vie des Fintech: de la phase d’ébullition à la phase de consolidation
La fin de la phase d’ébullition du marché
L’année 2015, marquée par la vague du crowdfunding, a été l’année de l’ébullition. Le mot d’ordre, parfaitement crédible, était le suivant: «les Fintech vont disrupter les banques». La Fintech préfigurait alors les services financiers de demain.
A l’image des applications préférées de la nouvelle génération connectée, elle était agile, efficace, tout en étant cool. Avec elle, la finance changeait de visage, elle devenait Tech elle aussi. C’était l’époque où les jeunes diplômés et les éléments les plus doués des institutions financières étaient soucieux à l’idée de rater une opportunité qui ne se représenterait peut-être jamais. Déçus par la rigidité des grands groupes, un grand nombre d’entre eux quittaient les ors et les lambris haussmanniens pour créer leur Fintech. Ayant à cœur d’être les premiers à financer les étoiles montantes de la finance de demain, les fonds de venture et les Business Angels étaient également partie prenante.
Les banques: entre scepticisme et opportunisme
Face à l’insolence de ces nouveaux venus, les banques oscillaient entre aveuglement, perplexité et opportunisme. D’abord sceptiques sur le pouvoir de disruption de ces nouveaux entrants, les plus réactives d’entre-elles se demandèrent ensuite comment tirer parti de ce mouvement pour dynamiser leur propre croissance. D’autres restaient totalement paralysées, comme le lapin aveuglé par les phares d’une voiture.
Dans cette phase structurante, une chose est sûre: les Fintechs et les géants du Web ont joué et continuent de jouer un rôle fondamental d’accélérateur de la transformation digitale du secteur bancaire. Plus encore, ils fournissent, gratuitement, un test grandeur nature de tous les business modèles possibles et imaginables dans la finance connectée. Les banques -si elles savent surfer sur la vague en capitalisant sur leur puissance et sur leur relation client- leur en sauront gré pour l’éternité.
2016: la phase de maturité
En 2016, le rythme des créations de Fintech se stabilise et la phase de maturité se rapproche. Les Fintech sont aujourd’hui surtout préoccupées par leur rentabilité et, à court ou moyen terme, par le financement des étapes suivantes.
Les business models qui ont résisté à la phase d’ébullition continuent à être mis à l’épreuve du temps. Seuls les Fintech qui ont trouvé le moyen de gagner de l’argent et/ou de financer leur développement survivent. A ce petit jeu, les acteurs du B2B, dont les produits et services s’intègrent dans la chaîne de valeur des acteurs financiers traditionnels, contribuant à accroître leur performance globale, tirent mieux leur épingle du jeu que les acteurs du B2C, tributaire d’une large base de clients. Ces derniers devront beaucoup investir dans la conquête d’une base de clients, levée de fonds à l’appui, ou se rapprocher d’acteurs traditionnels.
2017: la phase de consolidation
2017 sera l’année de la consolidation, face à la multiplicité des plateformes et des technologies existantes. Les évolutions prendront des formes diverses, depuis l’incubation, par exemple, de certaines start-up B2C par les acteurs financiers traditionnels, dans une logique gagnant-gagnant, base de données clients gratuite contre capacité d’innovation, jusqu’à la prise de participation minoritaire, voire majoritaire pour certaines Fintech B2B. D’autres Fintech feront le choix de l’indépendance, en s’orientant vers des stratégies telles que l’expansion géographique ou, au contraire, vers la diversification des métiers, comme celles proposées, par exemple, par les projets de Bank-as-a-Service.
Dans ce contexte, le financement restera une problématique majeure. De nouveaux investisseurs en capital développement, avec des tickets d’investissement plus élevés, devront prendre le relais des fonds d’amorçage, pour permettre aux Fintech d’atteindre rapidement une taille critique, tout en rassurant leurs clients et partenaires sur leur pérennité. Quoiqu’il en soit, seuls les acteurs les plus agiles, professionnalisant leurs opérations capitalistiques et suffisamment dotés financièrement, pourront survivre. Et la règle d’or restera toujours valable: il faudra lever des fonds avant d’en avoir besoin…
Etre accompagné par des experts dans cette phase de consolidation: une nécessité
Dans cette phase de consolidation, tout va aller très vite. Chaque mouvement sera déterminant pour l’évolution de la Fintech, qu’il s’agisse d’améliorer son niveau de «traction», pour séduire les investisseurs ou les acquéreurs stratégiques potentiels, ou d’être en alerte par rapport à son écosystème pour ne manquer aucune opportunité de rapprochement ou d’ajustement. Plus que jamais, cette phase va nécessiter des dirigeants une ouverture et une attention à leur environnement, alors même qu’ils ont basé leur réussite sur leur capacité à être focalisé sur l’innovation technologique et sur l’efficacité de leur business model.
Pour réussir, les fondateurs de Fintech devront s’entourer des meilleurs experts en levée de fonds et en fusions & acquisitions, pour les accompagner dans le prochain tournant. Pour les aider au mieux, ces derniers devront maîtriser l’environnement des institutionnels. Ils apporteront ainsi une connaissance fine du réseau d’acteurs financiers traditionnels (banques, assurances, mutuelles et groupes de prévoyance) et leur expertise des rouages des Fintech. Dans cette nouvelle ère de consolidation des Fintech, réussite pourrait bien rimer avec stratégie d’accompagnement.
Stéphane Olmi est Managing Partner de AEC Fintech, la boutique M&A spécialisée dans l'accompagnement des Fintech. AEC Fintech accompagne les acteurs de la Fintech dans les opérations suivantes : conseil en fusions & acquisitions (M&A), levée de fonds (Equity et/ou Dette) et stratégie financière (partenariats, optimisation de valorisation,…).
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