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[DECODE] Instagram & la publicité: les défis qui attendent la plateforme

Toujours plus de publicité : en juin dernier Instagram a annoncé l’insertion de nouveaux espaces publicitaires dans sa rubrique Explorer, offrant toujours plus d’opportunités aux annonceurs pour cibler son milliard d’utilisateurs actifs mensuels. La plateforme est devenue au fil des années une source de revenus essentielle pour Facebook. Mais à quel point cette démultiplication de la publicité sur un réseau social, qui en était originellement dépourvue, ne va-t-elle pas faire fuir les utilisateurs ? Retour sur la transformation du réseau social en l’une des plateformes publicitaires en ligne les plus importantes au monde.

Aujourd’hui, partie 4 sur 4 : les défis qui attendent la plateforme.

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Retrouvez la partie 3 sur 4 : comment Instagram a fait exploser ses revenus publicitaires.

Retrouvez la partie 2 sur 4 : comment le réseau a cloné Snapchat pour accélérer.

Retrouvez la partie 1 sur 4 : la publicité va-t-elle tuer Instagram ?

Jusqu’où ira Facebook pour maximiser le potentiel publicitaire d’Instagram ?

Encore une fois, la stratégie d’Instagram se révèle gagnante en 2018: le réseau social enregistre cette année-là un chiffre d’affaires issu de la publicité de 9 milliards de dollars, selon eMarketer. A tel point qu’on estime désormais qu’Instagram, qui pourrait atteindre les 989,1 millions d’utilisateurs (réels) en 2022, va devenir le principal moteur de croissance de Facebook dans les prochaines années. Selon certaines estimations, l’application pourrait représenter près de 30% des revenus publicitaires de Facebook (la quasi-totalité de son chiffre d’affaires) d’ici à 2021, contre environ 15% mi-2018. L’entreprise pourrait par ailleurs enregistrer un chiffe d’affaires situé entre 11 milliards (selon eMarketer) et 14 milliards (selon le cabinet Jeffries) de dollars en 2019, soit autour de 20% du chiffre d’affaires de Facebook. Selon The Information, le chiffre d’affaires 2019 d’Instagram pourrait même atteindre 15,8 milliard de dollars, soit presque un quart du revenu global de sa maison-mère.

Mais l’avenir d’Instagram reste « étroitement lié à Facebook », souligne eMarketer. « Une grande partie de la croissance de son activité publicitaire (…) provient du fait qu’étendre un achat publicitaire à Instagram est aussi facile que de cocher une case dans le gestionnaire de publicités de Facebook. Et des fonctionnalités comme les Instagram Stories se sont révélées très efficaces, ce qui maintient la pression sur l’application pour continuer à livrer des concepts marketing à succès». Outre la saturation d’influenceurs sur la plateforme et, en conséquent, des publications sponsorisées moins bien rémunérées, la société d’études juge qu’Instagram va devoir faire face à au moins trois grands défis ces prochains mois :

  • l’insatisfaction des utilisateurs due à la présence toujours plus importante de publicités
  • le harcèlement en ligne
  • l’ingérence lors de différentes élections dans le monde

Si, depuis l’éclatement du scandale Cambridge Analytica en mars 2017, Facebook peaufine sa communication quant à la brand safety de ses différentes plateformes, un rapport du Senate Select Committee on Intelligence de décembre 2018 estime qu’Instagram a finalement joué un rôle plus important que Facebook ou Twitter dans la diffusion de fausses informations en ligne dans le cadre de l’élection présidentielle américaine de 2016. Le réseau social devrait également être largement utilisé aux mêmes fins lors de l’élection de 2020.

Risque de saturation publicitaire et de perte de l’identité originelle d’Instagram

Aujourd’hui, l’essentiel pour Facebook réside dans la découverte du bon équilibre entre optimisation du potentiel publicitaire d’Instagram et conservation d’une bonne expérience utilisateur. Mais alors que la perception des publicités sur les réseaux sociaux est de plus en plus négative — 39% des Américains auraient de moins en moins confiance dans ces publicités et près de deux tiers d’entre eux aimeraient voir moins de publicités ciblées sur les réseaux sociaux, selon une étude de Sprout Social —, l’équation semble complexe.

C’est justement cette mainmise trop importante et une orientation trop axée sur les résultats commerciaux via la publicité et le shopping qui auraient poussé Kevin Systrom et Michel Krieger à quitter l’entreprise: « dans les près de onze mois qui ont suivi la nomination de Mosseri, la majeure partie des effectifs de la haute direction a été remplacée, Facebook a ordonné à Instagram de plus ou moins doubler le nombre de publicités dans l’application, et l’entreprise est en train de rassembler les fondements techniques des services de messagerie derrière Facebook, WhatsApp et Instagram. Additionnés, ces changements envoient le signal que l’âge de l’indépendance d’Instagram, dont les employés s’étaient habitués à leur autonomie au sein de Facebook, touche à sa fin », souligne The Information. Un autre risque se présente alors pour Facebook sur le long terme : la perte des employés des premières années d’Instagram, ceux qui ont mis en place les bases de son succès actuel.

Tout porte cependant à croire qu’Instagram n’en a pas fini avec l’étoffement de son offre publicitaire et son objectif de convertir toujours plus d’entreprises disposant d’une page professionnelle en annonceurs. En juin 2019, le réseau social annonce donc par exemple que sa rubrique Explorer, qui permet aux usagers de découvrir de nouveaux contenus susceptibles de les intéresser, hébergera des publicités. L’application de partage de photos, dont près de la moitié des utilisateurs utilisent Explorer, devait déployer cette insertion « lentement et intelligemment » dans les mois qui allaient suivre, assure-t-elle. Explorer peut aider les 80% d’utilisateurs qui suivent une entreprise sur Instagram à « découvrir la prochaine entreprise ou le prochain produit qu’ils vont adorer », promet également le réseau social. Mais l’initiative paraît risquée : il s’agissait jusqu’alors de l’une des rares parties d’Instagram exemptes de toute publicité. De nouveau, le risque de saturation publicitaire pourrait diminuer l’engagement des utilisateurs.

En attendant, Instagram, tout comme sa maison-mère, fait face à des problèmes d’utilisation abusive des données de ses utilisateurs : le réseau social a bloqué début août l’accès à sa plateforme de Hyp3r, plateforme américaine de marketing géolocalisé. La start-up californienne est accusée d’avoir enregistré les données publiques de millions d’utilisateurs visitant des hôtels, casinos, aéroports ou encore clubs de sports, dans le but de construire des descriptions détaillées d’individus. Des données exploitées ensuite par des annonceurs, selon Business Insider. Si le volume de données enregistrées n’est pas connu, Hyp3r affirme détenir « une base de données unique de centaines de millions de consommateurs de haute valeur dans le monde ».

Toujours en août et toujours dans l’optique de rendre à ses utilisateurs un semblant de contrôle sur leurs données, Facebook a annoncé le lancement mondial prochain d’une fonctionnalité qui permet de dissocier son profil Facebook et ses données collectées par Facebook auprès d’applications ou sites internet tiers. Une manière de limiter quelque peu la publicité ciblée sur Facebook et Instagram, mais surtout une nouvelle opération de communication de l’entreprise de Mark Zuckerberg, qui cherche avant tout à redorer son blason avant le prochain scandale lié à l’utilisation abusive des données de ses utilisateurs.

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