Déploiement de la fibre et mutualisation, l'ARCEP précise les modalités
Afin que le déploiement de la fibre s’engage dans des conditions concurrentielles satisfaisantes, l’ARCEP publie, après consultation publique des acteurs, de premières recommandations suite à l’adoption de la Loi de modernisation de l’économie. L’ARCEP invite à la conclusion d’accords de mutualisation incluant l’ensemble des opérateurs et permettant de tester les différentes solutions à l’échelle de quelques grandes agglomérations. En complément, l’ARCEP préconise une pratique de bonne gestion consistant à ce que l’opérateur d’immeuble propose aux opérateurs tiers de poser pour leur compte des fibres surnuméraires sur la partie terminale. L’ARCEP publie par ailleurs une convention type permettant aux copropriétés et aux bailleurs sociaux de désigner un opérateur responsable de la fibre à l’intérieur de l’immeuble.
Le déploiement d’une nouvelle boucle locale en fibre est un enjeu technique, économique et concurrentiel majeur pour notre pays. Il s’agit d’un investissement de long terme qui nécessitera un nombre significatif d’années et de milliards d’euros, à l’instar du déploiement du réseau cuivre. Comme le montrent les réponses à la consultation publique, de nombreuses incertitudes demeurent à ce stade sur les coûts d’investissement et d’exploitation, les contraintes opérationnelles et les choix technologiques. Ces incertitudes sont accentuées par la complexité inhérente au fait de déployer cette nouvelle boucle locale, en coopération entre opérateurs concurrents.
L’Autorité a mené depuis 18 mois avec les acteurs une série de travaux techniques et économiques, visant à établir un cadre favorable à l’investissement dans le déploiement de boucles locales fibre tout en promouvant une concurrence pérenne. Une partie de ces travaux est d’ores et déjà entrée dans une phase opérationnelle, tandis que certains principes restent à poser sur d’autres questions. La consultation publique lancée avant l’été sur la mutualisation a permis d’approfondir les analyses. A travers les éléments qu’elle rend publics aujourd’hui, l’Autorité souhaite que les premiers déploiements puissent s’engager, dans le respect des principes de concurrence loyale et de neutralité technologique.
L’accès aux fourreaux de France Télécom
France Télécom a publié le 15 septembre 2008 une offre de référence d’accès à son génie civil. Cette publication intervient en application de la décision d’analyse des marchés adoptée par l’Autorité le 24 juillet dernier, qui impose à France Télécom de donner accès à son génie civil (fourreaux, chambres) dans des conditions transparentes, non discriminatoires et à un tarif orienté vers les coûts.
Les travaux techniques et les expérimentations qui avaient débuté à l’automne 2007 ont permis d’aboutir à une offre opérationnelle et ont confirmé le niveau satisfaisant de disponibilité du génie civil. Tous les opérateurs, quelle que soit leur technologie, peuvent désormais utiliser les fourreaux de France Télécom pour déployer la fibre.
La mutualisation de la partie terminale des réseaux fibre
La Loi de modernisation de l’économie du 4 août 2008 (LME) pose un principe de mutualisation pour garantir la concurrence dans le très haut débit sans multiplier les intervenants dans la propriété privée. L’opérateur qui installe la fibre dans l’immeuble doit ainsi faire droit aux demandes raisonnables d’accès des opérateurs tiers sur la partie terminale du réseau.
La mise en œuvre de cette obligation revêt plusieurs dimensions : modalités d’intervention dans l’immeuble, localisation du point de mutualisation, choix technique de mutualisation, informations des opérateurs tiers, etc. Il s’agit de questions nouvelles, sur lesquelles les acteurs proposent des solutions diverses et pour lesquelles les retours d’expérience sont encore peu nombreux.
Dans une phase de démarrage, l’Autorité privilégie la recherche de solutions par les acteurs, sur la base de recommandations qu’elle publie aujourd’hui. De premiers accords ont déjà été signés. D’autres accords sont nécessaires pour que tous les opérateurs puissent démarrer. Il s’agit de tester les différentes solutions sur quelques grandes agglomérations, c’est-à-dire à une échelle suffisante pour dégager des retours d’expérience sans pour autant préjuger de la suite.
Dans ses recommandations, l’Autorité préconise notamment que le premier opérateur équipant un immeuble propose aux autres opérateurs de poser des fibres supplémentaires pour leur compte sur la partie terminale. Cette option viendrait le cas échéant en complément des solutions de mutualisation envisagées par les opérateurs et serait préfinancée par les opérateurs intéressés. Compte tenu de son surcoût limité et de sa compatibilité avec les choix techniques de l’ensemble des opérateurs, il s’agit d’une pratique de bonne gestion préservant l’avenir.
Publication d’une convention-type
La loi prévoit que l’installation de la fibre fasse l’objet d’une convention entre l’opérateur d’immeuble et le propriétaire ou le gestionnaire d’immeuble.
Grâce aux retours de la consultation publique, l’Autorité est en mesure de publier une convention type conciliant les attentes formulées par les acteurs. Ce document pose les garanties essentielles aux propriétaires tout en limitant les lourdeurs administratives pour les opérateurs. Il permet d’offrir aux propriétaires et aux opérateurs un cadre contractuel de référence répondant aux principes posés par la loi. La convention type peut être utilisée dès à présent par les acteurs.
Suite des travaux
Les travaux techniques se poursuivront avec les acteurs sur l’ensemble de ces sujets, pour préciser les principes applicables aux premiers déploiements et préparer les étapes suivantes sur la base des retours d’expérience. L’Autorité prendra par ailleurs en compte la recommandation sur les nouveaux réseaux d’accès en cours d’élaboration par la Commission européenne ainsi que les décrets d’application de la LME.
D’ici la fin de l’année, l’Autorité mettra en place un tableau de bord trimestriel du très haut débit pour suivre l’avancement des déploiements et de la mutualisation ainsi que l’utilisation des fourreaux de France Télécom.
L’Autorité sera particulièrement vigilante à ce qu’aucun opérateur ne dispose d’avantages injustifiés dans le déploiement de la fibre, que ce soit en termes d’avance de déploiement, de capacité à tirer la fibre dans le génie civil ou de faculté à démarcher les immeubles et les clients. La possibilité, pour l’ensemble des opérateurs, de déployer la fibre jusqu’à l’abonné constitue en effet la meilleure incitation à investir dans le très haut débit et la meilleure garantie en termes de concurrence et d’innovation.