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Doctolib, Pennylane n’ont pas créé une app ou une solution Saas. Elles ont bâti une infrastructure.

Alors que beaucoup rêvent de créer la prochaine application à succès. Interface fluide, onboarding soigné, courbe d’adoption ascendante. Le produit est roi, l’usage le juge, la viralité l’arbitre. Mais ce modèle cache une autre manière de bâtir : ne pas créer une application, mais une infrastructure. Non pas séduire l’utilisateur final, mais structurer des processus critiques. Être moins visible, mais indispensable.

Doctolib et Pennylane, incarnent cette logique. Leur ambition dépasse le produit. Elles visent le socle. Elles ne cherchent pas seulement à s’intégrer au quotidien des professionnels : elles veulent devenir l’armature de secteurs entiers.

Doctolib : devenir l’ossature numérique du système de santé

Doctolib ne vend plus un service de prise de rendez-vous. Elle orchestre une transformation radicale des usages dans le secteur médical. En intégrant la téléconsultation, la gestion du parcours patient, la prescription en ligne, l’interopérabilité avec les hôpitaux, la plateforme s’est imposée comme une brique d’infrastructure invisible mais structurante.

Ce n’est pas une app. C’est une couche intermédiaire entre les patients, les professionnels de santé, les systèmes publics et les logiciels métiers. Une fois installée, elle ne s’utilise pas ponctuellement : elle s’imbrique. Elle devient le canal par lequel transite l’essentiel de l’activité médicale non clinique.

La startup n’a pas eu besoin d’imposer son usage. Elle a capté le flux, puis redéfini le protocole. Quand un professionnel quitte Doctolib, ce n’est pas un simple outil qu’il abandonne, mais un rythme, une logique, une norme implicite qui structure son quotidien.

Pennylane : réécrire la grammaire financière des PME

Dans un autre registre, Pennylane poursuit un chantier similaire. Loin d’être un énième outil de gestion, la startup s’attaque à la colonne vertébrale financière des petites entreprises. Connexion bancaire automatique, synchronisation comptable, facturation, pilotage temps réel, intégration directe avec les experts-comptables : le produit masque un objectif plus ambitieux. Créer un système unifié, normé, modulaire et extensible.

Pennylane ne cherche pas à faire gagner du temps. Elle cherche à remodeler la manière dont les flux financiers circulent, se consolident, se déclarent. La plateforme ne se contente pas d’être utilisée : elle s’intègre aux processus, transforme les habitudes, déplace la frontière entre production comptable et pilotage stratégique. Elle devient une interface de dialogue entre métiers qui, jusque-là, travaillaient en silos : dirigeants, experts-comptables, banques, administrations.

Ce qu’elles ont compris avant les autres

Ce que ces deux entreprises ont compris, c’est qu’il ne suffit pas de résoudre un irritant utilisateur. Il faut capter un point d’entrée — le rendez-vous médical, la facture — puis étendre la portée du service jusqu’à absorber le système. Il ne s’agit pas d’améliorer un segment, mais de devenir la matrice du secteur. La solution est un cheval de Troie : ce qui compte, c’est la profondeur d’intégration.

Dans les deux cas, la startup impose progressivement une logique d’usage, puis une dépendance structurelle. C’est un modèle plus lent, plus exigeant, mais aussi plus défensif. Car une infrastructure ne se copie pas. Elle se construit, morceau par morceau, jusqu’à devenir trop coûteuse à remplacer.

Une nouvelle ambition pour les startups européennes

Il y a dans ces trajectoires un signal stratégique fort. L’Europe, longtemps cantonnée à des modèles B2C sous-financés ou à des solutions trop verticales, produit désormais des infrastructures sectorielles capables de s’imposer comme des standards implicites. Pas par le marketing, mais par la robustesse fonctionnelle et l’intégration dans les chaînes de travail.

Doctolib et Pennylane n’ont pas inventé des marchés. Elles ont trouvé des systèmes dysfonctionnels, fragmentés, inefficaces. Et elles y ont injecté un langage commun, une automatisation progressive, une logique d’interface normalisée. C’est cette capacité à structurer, pas seulement à fluidifier, qui change la donne.

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