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eCommerce : l’efficacité a tué la joie d’acheter

Le commerce en ligne a atteint une efficacité sans précédent. Les parcours sont optimisés, les recommandations sont pertinentes, et les taux de conversion sont scrutés à la décimale. Pourtant, cette performance technique cache une faille croissante : l’expérience d’achat est devenue ennuyeuse, mécanique, et dénuée d’émotion.

Un parcours rationalisé, mais sans relief

Selon une étude menée par Criteo auprès de 7 000 consommateurs dans le monde, 76 % jugent le parcours d’achat en ligne peu excitant. L’hyper-personnalisation et les moteurs de recommandation montrent en priorité ce que l’utilisateur est supposé vouloir. La découverte, l’imprévu, l’effet de surprise ont disparu. Résultat : 36 % déclarent qu’il est difficile de tomber sur un produit inattendu ou inspirant.

Le paradoxe est net. L’e-commerce promet la personnalisation, mais livre une expérience répétitive. Ce qui relevait autrefois de la découverte devient une suite d’actions utilitaires. Plus inquiétant encore : près d’un tiers des répondants considèrent désormais les achats en ligne comme une corvée.

Le déficit émotionnel des marques en ligne

L’autre enseignement majeur de l’étude concerne la relation entre consommateurs et marques dans l’environnement digital. Si les attentes restent fortes en matière d’efficacité – 63 % attendent un parcours rapide et sans friction – elles ne suffisent plus à nourrir un attachement durable.

Seuls 37 % des consommateurs déclarent se sentir connectés à une marque lorsqu’ils naviguent sur son propre site. Cette proportion chute à 23 % lorsqu’il s’agit d’un site d’influenceur, malgré l’omniprésence de ces derniers dans les stratégies d’activation. Loin d’ancrer la marque, les relais d’audience la diluent.

En revanche, certains leviers traditionnels conservent leur efficacité :

    • 74 % estiment que les avis positifs renforcent leur lien à une marque.
    • 76 % valorisent la qualité du service client ou la relation humaine dans leur expérience d’achat.

Le digital n’a pas effacé les fondamentaux. Il les a simplement négligés.

L’illusion de la donnée suffisante

L’industrie dispose de volumes massifs de données. Mais la donnée seule ne produit pas d’émotion. La pertinence algorithmique n’a pas d’âme. Elle ne raconte rien. Elle ne crée ni tension ni surprise.

L’étude de Criteo révèle que 43 % des consommateurs souhaitent une expérience à la fois “pertinente et engageante”. Cette distinction est cruciale : la pertinence est aujourd’hui bien maîtrisée. L’engagement, en revanche, reste un angle mort. Pourtant, près d’un consommateur sur deux comprend désormais qu’un partage accru de données peut améliorer l’expérience, signe d’une maturité nouvelle. Le marché est prêt. Il attend qu’on l’étonne.

Trois leviers pour réenchanter le parcours client

    1. Réintroduire la découverte
      L’interface doit cesser d’être linéaire. L’expérience doit permettre l’exploration, l’inattendu, la proposition qui déroute, qui amuse ou intrigue. Laisser une place à l’errance maîtrisée, à l’association d’idées, à l’hybridation des usages.
    2. Créer des formats interactifs et émotionnels
      La vidéo courte, l’animation subtile, le design sensoriel sont autant de leviers sous-exploités. À l’heure où les utilisateurs passent des heures sur des plateformes ludiques, le e-commerce reste figé. L’émotion est une construction visuelle, sonore, contextuelle.
    3. Utiliser l’IA au service de l’expérience, pas seulement de la performance
      Un moteur conversationnel bien calibré, une logique de micro-scénarisation ou un système de gamification intelligent peuvent créer des expériences différenciantes. L’IA ne doit plus se limiter à la recommandation produit. Elle peut générer une forme de narration individualisée.

Replacer l’expérience client au centre

Le commerce en ligne a été optimisé pour convertir, pas pour séduire. Or, la fidélité ne se construit pas sur l’utilité seule. Elle naît d’une expérience marquante, cohérente, et mémorable. Réenchanter l’expérience client ne relève pas du marketing émotionnel superficiel, mais d’un repositionnement stratégique.

Il ne s’agit pas d’ajouter du contenu, mais de concevoir des systèmes de relation et d’exploration à la hauteur des attentes d’aujourd’hui. L’e-commerce ne peut plus se contenter d’être rapide. Il doit redevenir vivant.

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