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Entrepreneur ou salarié, lequel trime le plus?

En France, on aime se plaindre, c’est connu. C’est même, à y réfléchir de plus près, un sport national. Tout le monde se plaint, les petits parce qu’ils sont petits et les grands parce qu’ils sont grands ; les chômeurs parce qu’il sont au chômage et les travailleurs parce qu’ils pensent travailler trop; les jeunes parce qu’ils sont trop jeunes et les vieux parce qu’ils sont trop vieux. On est tous mécontents de notre sort, et nous considérons tous que l’herbe est plus verte ailleurs (et maintenant que j’ai lu «Thinking fast and low» , je peux même vous dire que ça fait partie du caractère humain).

Alors quand un ministre prétend que la vie d’un entrepreneur est plus dure que celle d’un salarié, il n’est pas étonnant de voir le débat enflammer la toile.

A tort ou à raison?

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C’est dur, la vie d’un salarié

Je peux vous le dire, oui, c’est dur. C’est dur parce qu’avec le temps, la lassitude vient, et que psychologiquement, c’est difficile à vivre. C’est dur parce qu’on ne fait pas toujours ce que l’on veut. C’est dur, parce qu’on a parfois un petit chef au-dessus de soi qui nous pourrit la vie (vous le reconnaissez?…). C’est dur, parce que les collègues nous font suer, parce que les trajets dans les embouteillages ou les transports en commun, c’est long, parce qu’on n’est jamais maître de son destin ni de son temps, parce qu’on se fait piquer les projets intéressants, parce qu’on est mal payé, parce que parfois le travail est physiquement difficile, parce que … (ajoutez ce que vous voulez). Bref, c’est dur, je le reconnais, j’ai été salarié pendant 18 ans.

Et puis un jour j’ai créé ma boîte. Croyez-vous que ma vie est devenue plus douce pour autant?

C’est dur, la vie d’un entrepreneur

Contrairement à ce que vous pouvez croire, c’est dur d’être entrepreneur, et largement plus dur que d’être salarié. C’est dur, parce qu’au début, vous êtes seul(e). Que le démarrage prend du temps. Que vous n’arrivez pas à vous payer. Que vous vous mettez à douter. Que vous n’avez pas de back-up, pas d’indemnités de chômage, pas de filet. C’est dur, parce que votre famille compte sur vous, et se demande si vous ne devriez pas redevenir employé. C’est dur, parce que vous passez 80, 90 heures par semaine à bosser. Que vous vous couchez en pensant aux problèmes non résolus la veille, et vous vous réveillez avec ceux à résoudre le matin même.

C’est dur, parce que quand ça démarre, vous vous retrouvez à faire le commercial, le manager, le consultant, le comptable, et même le responsable des moyens généraux. C’est dur, parce que les salariés ne sont pas toujours motivés, pas toujours stables, pas toujours fidèles, pas toujours talentueux (mais c’est vous qui les avez recrutés, et vous devez leur faire confiance). Parce qu’à leurs yeux vous n’êtes qu’un patron (même si vous avez été salarié pendant plus longtemps qu’eux), et que patron, ça rime avec c…

C’est dur parce que vous portez le risque de votre affaire, de votre entreprise. C’est dur parce que le salaire d’un chef d’entreprise, ce n’est ni celui d’un trader, ni celui d’un patron du CAC 40. C’est dur parce que vous connaissez les deux côtés du fleuve, mais que personne ne vous croit quand vous dites que c’est dur. C’est dur parce que même quand vous réussissez à vous développer, vous n’êtes pas à l’abri d’une catastrophe et de tout perdre. C’est dur parce que vos choix sont décisifs, qu’on vous les reprochera s’ils sont mauvais, et que personne ne reconnaîtra votre talent s’ils s’avèrent judicieux.

Oui, je peux vous le dire, c’est dur d’être entrepreneur.

Mais alors, d’où vient l’erreur?

L’erreur vient du fait que dans l’imaginaire des gens, entrepreneur = patron d’une entreprise du CAC. J’ai même entendu, hier, sur France Infos, un journaliste parler des entrepreneurs du CAC ! Belle manipulation intellectuelle: en quoi Stéphane Richard ou Alexandre Ricard sont-ils des entrepreneurs? Ont-ils créé les sociétés qu’ils dirigent? Absolument pas. Ils ne sont pas plus entrepreneurs que je ne suis trompettiste.

Des entrepreneurs, des vrais, j’en ai croisé, et j’en croise souvent. Des gens accessible, bosseurs, qui se donnent à fond pour leur boîte. Et dont la vie est loin d’être la sinécure que vous pourriez imaginer.

Alors, entre l’entrepreneur et le salarié, lequel trime le plus? Tout est une question de perception et de choix de vie. On peut se donner à fond dans les deux cas, ou bien décider de lever le pied dans les deux cas, mais les conséquences ne sont pas les mêmes: je connais peu d’entreprises dans lesquelles le ou les fondateurs ne se soient pas impliqués à 200%.

Et si jamais certains d’entre vous, salariés de leur boîte, pensent que j’ai tort, et bien je les invite à se lancer et à créer leur affaire. On reparlera de ce sujet deux ans plus tard…

herve-kablaHervé Kabla, directeur général de be angels et co-fondateur de Media Aces

 

 

 

Crédit photo: Fotolia, banque d’images, vecteurs et videos libres de droits

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11 commentaires

  1. Le mot entrepreneur recouvre des situations très différentes : artisans, indépendants, chômeur qui « se vend » sous le smic, agriculteurs, startupers, anciens cadre avec rente qui s’ennuie, etudiant d’ecole de commerce privé qui lance une startup, etc….
    Le cas que vous décrivez est celui d’un privilégié, mais vous ne semblez pas en avoir conscience/
    Et pour le cas des créateurs de startup, ce sont majoritairement WASP et fils de riche… c’est la sociologie qui le dit.

    1. Il vaut mieux lire votre commentaire que d’être aveugle vous me direz… Où voyez-vous le cas d’un privilégié décrit dans ce billet ? Je suppose que vous n’avez jamais franchi le pas ou n’avez pas eu les compétences ou le courage de poursuivre l’aventure quand elle devenue difficile et pleine d’incertitudes pour dire cela. Vous semblez être l’illustration parfaite de l’introduction…

    2. Il vaut mieux lire votre commentaire que d’être aveugle vous me direz… Où voyez-vous le cas d’un privilégié décrit dans ce billet ? Je suppose que vous n’avez jamais franchi le pas ou n’avez pas eu les compétences ou le courage de poursuivre l’aventure quand elle devenue difficile et pleine d’incertitudes pour dire cela. Vous semblez être l’illustration parfaite de l’introduction…

      1. Pourquoi c’est un cas privilégié ? Je cite « C’est dur parce que le salaire d’un chef d’entreprise, ce n’est ni celui d’un trader, ni celui d’un patron du CAC 40.  » Il se trouve que certains ne gagnent même peine plus que le SMIC, donc l’échelle que vous mentionnez est d’une autre catégorie…
        Quant à mon cas, votre supposition est erronée… Désolé de pas rentrer dans votre grille de lecture courageux et intrépide entrepreneur VS salarié planqué « qui n’aurait jamais osé franchir le pas « .

        1. Je pense que nous ne devons pas avoir lu le même billet, car je ne comprend décidément pas votre point de vue.

          L’auteur ne cherche pas à diviser dans ce qu’il écrit, bien au contraire. Il essaye juste de faire comprendre que la vie de nombreuses personnes que beaucoup jugent privilégiée est une vie difficile.

          Après, il existe des milliers d’exemples prouvant qu’être salarié est plus dur qu’être entrepreneur, comme il en existe tout autant pour prouver le contraire.

          À titre personnel, ce que je pense vraiment décisif dans le fait que la vie d’entrepreneur est de loin plus difficile que la vie de salarié est l’incertitude.

          Pour avoir été 4 ans chef de groupe dans l’armée, je peux vous assurer que la pire des choses est de ne pas avoir de visibilité. si je vous demande de marcher sans vous donner d’indication sur la distance, il vous sera bien plus difficile de marcher ne serais-ce que 20km alors que si je vous avait demandé de marcher 40km, cela aurait été plus facile.

          J’en ai fait l’expérience, et je pense que c’est ce qui rend la vie d’entrepreneur aussi difficile. Vous n’avez pas de visibilité et vous risquez de facilement vous laisser gagner par le désespoir et l’envie de renoncer.

Je vous dit ça alors que je suis moi même salarié dans une startup, et que je ne sais pas si j’aurais un jour le courage de me lancer à mon tour. Cela ne m’empêche pas de saluer la force des fondateurs de ma startup qui continuent de se donner à fond tous les jours ( et même en vacances ).

          Ensuite, il se peut que je me trompe, mais votre commentaire « WASP et fils de riche… » me semble inapproprié voire injurieux.

          c’est un fait que notre société est loin d’être parfaite au niveau des inégalités et de l’ascenseur social, et oui certains on commis l’erreur de naitre avec un taux de mélanine faible dans une famille un peu plus aisée que la moyenne.

          Selon vous, cela enlève le mérite qu’ils ont à se lancer dans l’aventure de l’entreprenariat?

          Je vous rassure, les enfant issus des très grandes familles vraiment riches catapultés à la tête d’une entreprise grâce à leur nom et aux relations de leur parents existent, mais ne font pas la majorité des entrepreneurs, et dans de nombreux cas, ne sont pas des entrepreneurs, mais juste des gestionnaires.

          Et votre commentaire me semble tout aussi déplacé si vous aviez dit que les chômeur était majoritairement issus de l’immigration et ne recherchaient pas réellement un travail.

          1. C’est la catégorie d’entrepreneur qui est biaisée… Vous comprenez bien que mettre tous les travailleurs non-salariés
            dans une même case n’a pas de sens.
            Et l’auteur de ce billet tombe dans le piège : tout comme avant lui d’autres ont restreint entrepreneur à patron du Cac40, lui le restreint implicitement aux employeurs (75% des « entrepreneurs » n’ont pas de salarié en réalité) et gagnants « moins que des traders » (comme si c’était peu). Sans doute sur la base de son expérience personnelle.
            Et, par dessus, il reprend les poncifs de l’entrepreneur qui prend des risques, qui doit faire avec des salariés « pas toujours stables, pas toujours fidèles » en mettant de côté leur condition sociale.
            Poncifs mais contredit par les faits et plusieurs travaux scientifiques :

            Sur le mythe de l’entrepreneur qui prend des risques : http://soq.sagepub.com/content/2/4/331.short
            La plupart des endettés ne sont pas entrepreneurs ou issu de.
            Sur l’origine sociale des entrepreneurs : http://isb.sagepub.com/content/8/1/11.abstract
            Dire que les entrepreneurs sont en écrasante majorité des hommes blancs de la classe bourgeois c’est un fait établi aux Etats unis qui font des quotas par race. De même qu’il y a plus de noir ne prisons que de blanc. Ne soyez pas choqué, mais regardez en face les conditions historiques et sociales qui déterminent ces faits.

          2. Vous avez raison, il est nécessaire de redéfinir ce que nous entendons par entrepreneur pour bien se comprendre.

            c’est pourquoi nous somme en désaccord, nous n’avons pas la même définition de l’entrepreneur.

            Ce terme est d’ailleurs beaucoup trop général, c’est pour cela que les mots de M. Macron font couler autant d’encre. Toutefois il me semble que vous vous méprenez sur cet article, car justement il me semble ( dites moi si je me trompe ) qu’il différencie sa définition de l’entrepreneur du patron du CAC 40.

            Pour cet article, il me semble que l’auteur parle de l’entrepreneur de la french tech, ou le patron de PME/TPE qui met toute sa vie dans son entreprise.

            Et bien que vous semblez croire le contraire, le recrutement est capital pour cet entrepreneur. Dans une aussi petite structure, une seule personne incompétente ou faisant mal son travail peut couler la boîte. Et c’est de cela que l’auteur essaye de parler il ne dit pas que les salariés sont des fainéants et que le patron est le seul à bosser, mais qu’il n’a pas le droit à l’erreur dans son recrutement.

            Enfin, vous citez le marché américain, avec des chiffres ( ce qui est une excellente chose ), toutefois, je ne suis pas d’accord avec vous, car le marché français est très différent du marché américain d’un point de vue entreprenarial.

            Aux états-unis, la culture du self made man et la vison de l’argent et la richesse ne sont pas du tout les même qu’en France. De plus, nous avons beaucoup plus de freins légaux et fiscaux pour nous permettre de comparer ces marchés sur le vécu de l’entrepreneur. D’autant plus que nous avons la chance d’avoir une forte protection sociale pour les salariés en France, là où la précarité de l’emploi n’est plus à prouver aux états-unis

            Pour ce qui est des inégalités ethniques, vous avez raison de replacer les chiffres dans leur contextes car sinon on peut leur faire dire tout et n’importe quoi. c’est pourquoi je suis d’autant plus étonné que vous ayez commenté cela, car ( je me trompe peut être) mais quand je lis votre commentaire, j’ai vraiment l’impression que c’est une tare d’être un WASP issu d’une famille aisée, et que de se faisant, vous ne rencontrerez aucun problème lors de la création de votre entreprise.

            ( mais là encore, il s’agit du marché américain, et même si nous ne parlerions pas de WASP en France, les chiffres montreraient certainement qu’une majorité des créateurs de startup sont issus de familles plus aisées que la moyenne)

          3. En France il y a aussi des données sociologiques qui vont dans le même sens. Ce n’est pas différent des Etats-Unis.
            Allez dans une pépinière numérique, vous le constaterez aisément.
            Sur l’entrepreneur Frenchtech (sic), vous confondez difficulté de son projet avec pénibilité et conditions de vie. Les fins de moi ne sont pas le mêmes pour tout le monde…

          4. Justement, au delà des données sociologiques, ce que j’essaye de vous dire, c’est que la relation à l’entreprenariat et la législation rendent la comparaison de ces deux marchés biaisée.

            Enfin, la difficulté du projet va souvent de pair avec pénibilité et condition de vie, car nombreux sont ceux qui ne peuvent pas se payer. Il existe c’est vrai de très belle success story en France, mais elle ne sont pas majoritaire.

            Et quand bien même, je trouve cela normal que mon patron gagne plus que moi, car il a plus de responsabilités, et il est déjà là depuis longtemps quand j’arrive, et s’en vas bien après moi s’il n’a pas de rendez vous.

            Il existe des patrons qui se payent beaucoup sur le dos de leurs salariés c’est un fait, mais je pense que l’on peur affirmer sans se tromper que plus de 90% des patrons ne sont pas dans ce cas là.

            dire le contraire serait aussi stupide de dire que tous les fonctionnaires ne sont que des fainéants qui ne font que le minimum de leurs horaires en faisant durer leur travail pour en faire le moins possible…

            ho wait…

          5. Ce ping-pong peut être sans fin car vous ne comparez pas les mêmes choses.

            Monter une entreprise est difficile et risqué. Beaucoup d’entrepreneurs ne se payent pas pendant des mois et peu pendant des années, souvent moins que leurs salariés, avant que la boite ne tourne et qu’ils ne puissent retirer les fruits de leur engagement. Evidement, cet effort n’est possible que si on a quelques économies devant soi et/ou des soutiens financiers familiaux et/ou une maison à hypothéquer, ce n’est pas donné à tout le monde (les banques ne faisant pas leur travail).

            À diplôme et profil égal, il est clairement plus dur d’être entrepreneur. Et même à diplôme et profil un peu moins élevé, il est plus dur d’être entrepreneur (pour toutes les raisons évoquées dans cet excellent article) que d’être technicien, commercial, fonctionnaire ou la plupart des métiers à pénibilité restreinte et je dis cela en respectant ces professions (j’en ai exercé 2 parmi elles). Le stress, la responsabilité, le nombre d’heures et les sacrifices familiaux sont sans commune mesure.

            Bien sûr, il est beaucoup plus facile d’être entrepreneur qu’hôtesse de caisse en CDD, au SMIC, à temps partiel, à la merci d’un petit chef pervers, dont le mari est au chômage et ne trouve pas de travail parce que son nom ne sonne pas assez français et qui se demande dès le 2 comment elle va finir le mois. Le profil cité n’est pas une caricature et n’est malheureusement pas si rare. Mais ce n’est pas avec elle que la comparaison est faite, c’est avec la très grande majorité des salariés qui heureusement sont loin de cette situation.

            Entrepreneur n’est une situation privilégiée que lorsque la boite est stable et en réussite, ce qui prend des années et ne vient parfois jamais. Ce privilège a certes été acquis sur un terreau favorable, mais il serait malhonnête d’ignorer le prix qui a été payé. N’oublions pas ces entrepreneurs qui on fait faillite et on parfois tout perdu et dont on ne parle jamais.

            Enfin, pour être juste, il faut rappeler que si les entrepreneurs ont une espérance de vie à 60 ans à peu prés égale (à peine plus longue) aux employés, elle est inférieure à celles des cadres (qui ont pourtant des profils similaires).
            Tout comme celle des employés, elle reste évidemment supérieure à celle des ouvriers pour lesquels la pénibilité du travail, mais c’est surtout un déficit d’éducation à la santé (notamment alimentaire) et une qualité de l’environnement de vie médiocre explique cet état de fait.

            Pour info, le revenu médian d’un dirigeant de SARL est de 2000 €. La plupart des gens imagine beaucoup plus évidemment.

  2. Bravo pour ce billet. Vous résumez très bien les difficultés de la vie d’un entrepreneur (vous avez oublié de parler de l’accès au crédit pour les jeunes entrepreneurs dans le pays du CDI), du moins de ma vie quotidienne: être tout le temps au travail, trouver continuellement de nouvelles solutions, y penser nuit et jour, être sans filet, ne pas pouvoir faire de crédit, investir ses propres économies, …

    Pour avoir été les deux, les difficultés des salariés existent aussi mais sont différentes. Le stress n’est pas le même, la protection sociale non plus.

    Je suis très heureux de ma vie et de mon choix même s’il demande beaucoup de sacrifices.

    Et n’oublions pas que pour qu’il y ait des salariés, il faut qu’il y ait des entrepreneurs, ces gens qui croit à une idée en oubliant leurs soirées, leurs vacances, leurs week ends et parfois leur salaire pendant plusieurs mois pour la développer.

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