FoodTech: comment la restauration d’entreprise innove face à la crise
AFP
Repas à emporter, commandés en ligne ou en libre accès: confrontée à une baisse d’activité durable du fait du recours accru au télétravail depuis la crise sanitaire, la restauration d’entreprise s’efforce de réduire l’érosion de ses revenus en accélérant de nouveaux services. « Notre métier historique c’était d’assurer le service pour des gens qui vont à la cantine le midi », dit Frédéric Galliath, directeur général du marché entreprises d’Elior, un géant du secteur qui compte quelque 1 400 clients en France.
Mais avec la pandémie, le télétravail s’est imposé deux à trois jours par semaine dans de grands groupes tertiaires d’Ile-de-France et des métropoles régionales – une tendance que va encore amplifier le couvre-feu. L’activité du secteur, à l’arrêt pendant le confinement du printemps, n’a retrouvé depuis septembre que 60% de ses niveaux d’avant Covid. Certaines entreprises suppriment même leur cantine, plus assez fréquentée pour être viable: les repas peuvent alors être préparés « dans une autre cuisine d’entreprise, et leur être livrés », précise Paul Quipourt, directeur de la transformation chez Elior France.
Parfois les entreprises ferment tout simplement des sites à l’activité en chute libre, notamment dans la sous-traitance automobile ou aéronautique. « Pour l’instant cela reste assez marginal, heureusement. Beaucoup d’entreprises attendent de savoir dans quels délais on va sortir de cette crise sanitaire », indique le directeur général d’Elior, qui a déjà annoncé 1 888 suppressions de postes en France suite à la crise sanitaire.
«Toucher les collaborateurs en télétravail»
Le groupe présente lundi de nouvelles offres visant les salariés présents dans leur entreprise, mais qui désertent la cantine: des applications où commander un plat chaud à emporter, servi « dans les étages » ou livré en « click and collect« , des repas ou produits d’enseignes partenaires -Exki, Daily Monop, Paul, Sushi Shop- en libre-service dans un frigo connecté à déverrouiller avec un badge… « Le coeur de métier reste le même, il nous faut juste trouver des solutions hybrides », souligne M Quipourt.
Un virage pris aussi par les deux autres grands acteurs du secteur dans l’hexagone, le français Sodexo et le britannique Compass, dont la filiale Eurest propose le « click and collect » sur 250 de ses 800 sites: « On commande son repas sur son téléphone, on le récupère à un point de retrait et on le consomme dans la salle à manger, au bureau ou à l’extérieur », précise à l’AFP Camille Berthaud, directeur général d’Eurest. Et pour « toucher les collaborateurs en télétravail », Eurest étudie « des partenariats avec des sociétés de livraison, ou des paniers à récupérer sur le lieu de travail et à emmener à la maison ».
Des cantines 2.0
Très touchée elle aussi par la crise sanitaire qui a fait chuter son chiffre d’affaires de 23% au deuxième trimestre et de 9% au troisième, la société de services prépayés Edenred, maison mère de Ticket Restaurant, développe ce qu’elle appelle la « cantine 2.0 », dont la « croissance est exponentielle actuellement », selon Patrick Bataillard, son directeur financier: le paiement en tickets restaurant dématérialisés de repas commandés via des plateformes de livraison de repas à domicile. Sodexo a lancé une carte « Pass Restaurant » sur le même principe.
Pour l’heure, la législation n’impose pas à l’employeur de prendre en charge le déjeuner des salariés en télétravail et le coût de livraison, ajouté à celui du repas, pourrait s’avérer dissuasif. Les sociétés de restauration collective espèrent donc surtout fidéliser les salariés avec leurs nouvelles offres. « Avant le Covid, 55% d’entre eux fréquentaient le restaurant d’entreprise. On peut, dans les années à venir, compenser une partie des pertes de nos volumes par un taux de captage de 70% ou 80% », estime le DG d’Eurest.
« Mais pour cela, il faut que la prestation soit au rendez-vous », souligne-t-il, avec des repas répondant « aux attentes du consommateur autour du plaisir et du bien manger… avec du bio, du local, du frais ». Servir un repas « nutritionnellement impeccable » à des horaires flexibles, « comme à la maison, mais en mieux », résume M Galliath, doit aider les entreprises qui le souhaitent à « réattirer les salariés au bureau ». Un défi de taille pour le secteur.
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