Intelligence artificielle: cinq choses à savoir sur les projets de l’UE
AFP
Des applications de traduction instantanée à la reconnaissance faciale, l’intelligence artificielle va envahir notre quotidien. Dès lors, l’UE veut mettre de l’ordre dans ce « Far West » numérique, dominé par les États-Unis et la Chine. La présidente de la Commission européenne, Ursula von der Leyen, a appelé à une intelligence artificielle « responsable » et maîtrisée par l’humain, lors de la présentation mercredi de la stratégie de l’UE sur ce secteur hautement stratégique et sensible. Consciente d’être passée à côté de la première révolution Internet, qui a vu l’émergence des géants américains, comme Google et Facebook, ou chinois tel que Tencent, l’UE tient désormais à jouer un rôle central dans la définition des règles et la promotion de ses propres champions.
Voici cinq choses à savoir sur les projets de l’UE:
Valeurs européennes
Bruxelles reconnaît que les entreprises européennes ont raté la première vague de la révolution Internet: seule la plateforme suédoise, Spotify, numéro 1 mondiale de la musique en ligne, est un acteur aussi connu que Google, Facebook et Amazon. En revanche, l’Europe est en pointe sur la défense de certaines valeurs éthiques, comme elle l’a montré avec le RGPD. Lancé le 25 mai 2018, le « Règlement général sur la protection des données (RGPD) » prévoit des droits renforcés pour les internautes et impose à toute entreprise, sur internet ou non, de demander un « consentement explicite et positif » pour utiliser des données personnelles collectées ou traitées dans l’UE.
Le Commissaire européen à l’Industrie, Thierry Breton, veut maintenir les mêmes principes avec l’intelligence artificielle. « Comme avec le RGPD, nous aurons nos propres règles (…) nous nous assurerons que les droits individuels et fondamentaux que nous chérissons en Europe seront respectés », a-t-il dit.
Big Brother vous regarde
La reconnaissance faciale est l’un des exemples les plus en vue de l’intelligence artificielle, réveillant l’angoisse d’un « Big Brother » qui espionne chacun des mouvements des citoyens. La rumeur avait couru que la Commission allait demander un moratoire sur son usage. Il n’en est rien. Car elle est déjà largement utilisée dans tout un tas de domaines: pour débloquer son smartphone ou passer rapidement les contrôles dans les aéroports. « Nous allons dire, dans un langage très juridique, que nous allons faire une pause et déterminer s’il existe des circonstances dans lesquelles la reconnaissance faciale de masse doit être autorisée », a déclaré récemment la vice-présidente de la Commission, en charge du numérique, Margrethe Vestager.
Un business à haut risque
Réglementer l’intelligence artificielle, « c’est un peu comme le Far West, on démarre sur des terres vierges où on fait un peu comme on veut mais après cela, on doit s’organiser », commente M. Breton. L’attitude de l’UE vis-à-vis de l’intelligence artificielle sera proportionnelle au risque: plus l’utilisation sera dangereuse ou controversée, plus les règles seront strictes. Cette stratégie est plutôt bien accueillie par les entreprises qui craignaient que Bruxelles ne tente de fixer des règles générales pour l’industrie toute entière et du coup étouffe l’innovation. Bruxelles compte examiner les activités au cas par cas: les applications médicales seront ainsi strictement encadrées, mais pas celles de traductions simultanées.
Pas de guerre avec Pékin et Washington
La Commission européenne insiste sur le fait que la stratégie de l’Union ne vise pas à déclarer la guerre aux États-Unis et à la Chine. « En termes de responsabilité ou de sécurité, quelle que soit l’origine de ces produits, un certain nombre de règles devront être acceptées pour pouvoir opérer dans l’UE », a déclaré le commissaire à la justice, Didier Reynders. Selon M. Vestager, ces projets visent tout autant à donner l’exemple qu’à faire respecter les règles de l’UE.
Les lobbyistes à la manoeuvre
Les premières annonces de la Commission européenne sont le coup d’envoi d’un long processus législatif. Au cours des trois prochains mois, les parties prenantes auront la possibilité d’influencer les plans de la Commission. Les patrons de Google et de Facebook ont déjà fait connaître leur point de vue lors de leurs récentes visites au siège de l’UE. « La discussion est véritablement ouverte à tous. L’objectif n’est pas de dire ‘voilà, ce sont les règles’ », a déclaré le commissaire Reynders, ancien ministre belge des affaires étrangères. L’UE espère faire à la fin de l’année des propositions législatives qui devront être approuvées par les États membres et ratifié par le Parlement européen.
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