La simplification doit être au cœur de la transformation numérique
Comme je le dis souvent à ceux qui veulent se lancer dans leur transformation digitale mais ne savent par où commencer, ni quel cap prendre : essayez de rendre les choses simples aussi bien pour le collaborateur que pour le client.
Cela a beau avoir l’air… simple, voire simpliste, je vous promets que ça aide à rapidement donner du sens aux choses et trouver une foule d’initiatives concrètes. Pourquoi ne l’a-t-on encore jamais fait avant ? Parce qu’il est infiniment plus simple d’ajouter et empiler que d’enlever et simplifier. Faire simple est une des choses les plus difficiles qui soient, mais indéniablement le meilleur moyen de répondre à la complexité. Historiquement, on a davantage eu recours à la complication et on voit où cela nous a mené.
L’édition 2015 de l’Etude Deloitte sur les tendances RH nous donne quelques informations intéressantes sur les chantiers à venir pour la profession RH.
- Développer le leadership (87%) qui est encore trop considéré comme une option à court terme et non comme une vision à long terme ;
- Favoriser l’apprentissage et le développement (85%) en enrichissant et en digitalisant l’offre de formation ;
- Exploiter les données RH (75%) car 78% des répondants considèrent que leur expertise en la matière est faible ;
- Faire évoluer les technologies RH (73%) en mettant en place un SIRH dans les entreprises ;
- Travailler sur la simplification du travail (70%) pour améliorer à la fois la productivité et le bien-être des salariés ;
- Instaurer une culture de la diversité (80% en France) pour découvrir et développer de nouveaux talents.
La contribution des RH à la transformation digitale est un vaste chantier (voir ici et ici) et je retire deux points saillants de ce que dit Deloitte.
Les RH doivent simplifier le travail
Les RH ont un rôle majeur dans la simplification du travail. Comme le rappelle l’étude c’est une question de qualité de vie et de productivité à la fois. Un sujet que l’on peut prendre sous deux angles.
Le premier est que, mal maitrisé, le digital est un facteur de complication voire de mal-être et de stress dans certains cas extrêmes. De ce point de vue, il y a beaucoup à faire non pas sur la maîtrise des outils mais sur la manière de s’en servir, sur la manière de gérer aussi bien l’information entrante que celle qu’on émet (on tous à la fois bourreau et victimes sur ce sujet). Apprendre à gérer l’information aide à gérer son temps et son stress. J’ajouterai également qu’il y a une dimension «bonne conduite» que je rapproche souvent de sujets comme la politesse au bureau et dans les échanges sur laquelle on part de très loin. L’environnement digital de travail, et notamment l’e-mail, est souvent un monde d’incivilité avec des comportements et des manières de s’exprimer qu’on oserait avoir en face d’une personne sous peine de passer ou un rustre ou prendre une paire de claques.
Le second tient, quand même, à la maitrise des outils. On a beau dire que tout est affaire d’usages et de technologie, on ne peut pas être serein et confortable quand on ne sait pas quoi faire, comment le faire, qu’on se sent dépassé par ses collègues ou qu’on a peur de déclencher une catastrophe à chaque clic.
Le chantier de la simplification du travail dépasse le cadre purement RH
Au début de l’été, j’ai assisté à une intéressante table ronde sur l’expérience employé. Partant du principe assez rabâché que sans expérience employé il n’y aura pas d’expérience client, l’accent a été mis sur la nécessaire simplification des processus RH tout au long du parcours employé, de son « cycle de vie » dans l’entreprise, du recrutement au départ.
Une simplification qui de mon point de vue peut prendre différentes formes :
• Simplification «pure et dure» : moins d’étapes, de formalisme, de contraintes, une meilleure expérience utilisateur (simplicité, fluidité) lorsque l’utilisation d’une interface est requise etc. Approche «Lean RH».
• Socialisation du processus : remettre de l’intelligence collective dans la conception et l’exécution du processus par implication des parties prenantes
• Uberisation du processus : simplifier l’intermédiation entre le demandeur et le fournisseur d’un service quitte à sortir le RH du dispositif et le positionner en fournisseur de plateforme. Très pertinent pour une partie croissante et nouvelle du besoin en formation.
Mais même si les processus RH sont (trop?) nombreux et omniprésents dans la vie du salarié, la simplification du travail va bien au-delà. Elle touche à l’environnement de travail au sens large et aux processus non RH et sur ce plan j’ai du mal à voir les RH prendre en main légitimement un chantier qui concerne 90% du travail de simplification sans avoir les compétences métier nécessaires. Il s’agit davantage d’un rôle de sensibilisation et de mise en mouvement du reste de l’entreprise.
La formation doit cesser d’être une usine à gaz
Le deuxième point que je relève touche à la digitalisation de la formation. Un sujet qui de mon point de vue est très lié à la simplification et s’avère crucial. Apprendre n’est plus (ou plus seulement) une affaire de formations traditionnelles, même si ces dernières conserveront toujours l’avantage de sortir le collaborateur de sa bulle et de lui permettre de socialiser. C’est également quelque chose de très granulaire qui peut et doit être dispensé «à la demande» et pas forcément par un formateur. On rentre là dans le social learning. Les collaborateurs ont besoin d’un accès simple et rapide au savoir, à la personne qui le détient.
En termes d’interfaces et de contenus – bref d’expérience – la formation n’échappe pas non plus (et peut être encore moins que tout) à une demande de consumérisation et d’expérience digne d’une expérience client. Et force est de reconnaitre qu’on en est encore à des années-lumières.
Le chantier digital est tout sauf simple pour la profession RH qui doit se digitaliser elle-même avant de pouvoir digitaliser les autres. Mais elle ne peut pas dire qu’elle manque d’axes directeurs, en voici déjà deux à même de l’occuper pour un certain temps. C’est quand même autre chose que de faire des vidéos virales sur YouTube pour recruter des millenials.
Bertrand Duperrin est Digital Transformation Practice Leader chez Emakina. Il a été précédemment directeur conseil chez Nextmodernity, un cabinet dans le domaine de la transformation des entreprises et du management au travers du social business et de l’utilisation des technologies sociales.
Il traite régulièrement de l’actualité social media sur son blog.
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