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La vérification de l’âge des internautes, nouvel eldorado pour les entreprises?

AFP

« Sur internet, personne ne sait que vous êtes un chien. » Cette célèbre légende d’un dessin publié en 1993 illustre toujours la difficulté à vérifier l’âge des internautes, mais des avancées législatives et techniques visant à protéger les enfants dessinent aujourd’hui les contours d’un marché prometteur, notamment en Europe. En France, le Conseil supérieur de l’audiovisuel (CSA) a récemment mis en demeure 5 sites pornographiques parmi les plus visités de trouver une solution sous deux semaines pour interdire leur accès aux mineurs, sous peine de blocage.

Parallèlement en Allemagne, plusieurs plateformes pornographiques pourraient devenir inaccessibles si elles ne mettent pas en place des systèmes de vérification d’âge. Selon Der Spiegel, plusieurs importants portails sont concernés, dont YouPorn et Pornhub. A l’automne 2019 pourtant, le Royaume-Uni qui s’apprêtait à devenir l’un des premiers pays à imposer la vérification d’âge avait finalement renoncé, décevant les nombreuses entreprises qui s’apprêtaient à investir le marché.

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Une mesure pas très populaire

Le gouvernement avait justifié ce retournement par les risques pour la vie privée et parce que les solutions envisagées étaient trop facilement contournables. « Boris Johnson (parti conservateur) pensait que ce n’était pas une mesure très populaire avant une élection », regrette Iain Corby, le directeur exécutif de l’Avpa qui fédère les fournisseurs de solutions de vérification d’âge, dans un entretien à l’AFP. « Depuis, les créateurs de ces technologies se sont diversifiés vers d’autres secteurs », explique-t-il. Ils ont notamment trouvé une utilité à leurs systèmes sur des marchés plus petits comme les sites de vente d’alcool, de tabac ou de jeux d’argent.

Des parlementaires britanniques tentent également de réintégrer la vérification d’âge sur les sites pornographiques dans la nouvelle loi sur la sécurité en ligne, mais celle-ci n’aura « probablement pas d’effet concret avant 2025 », estime M. Corby. Les espoirs de l’industrie reposent donc sur l’Union européenne, et notamment sur la directive sur les services audiovisuels (AVMSD), révisée en 2018, qui prévoit que les plateformes de vidéos à la demande empêchent réellement les mineurs d’accéder à des contenus potentiellement néfastes pour eux.

En septembre, la Commission européenne a rappelé à l’ordre les Etats membres qui n’avaient pas transposé cette directive dans le temps imparti, dont Chypre, où plusieurs plateformes pornographiques comme Pornhub ont élu domicile.

Une vérification de l’âge sur 30% des sites

Pour vérifier l’âge d’un internaute sans lui demander son identité complète, il n’existe « pas de solution miracle », considère la Cnil, le gendarme français des données personnelles. Soit des documents d’identité sont requis et analysés par un tiers de confiance, qui ne transmet au site demandeur que l’âge de l’internaute, soit il faut passer par une estimation de l’âge. Dans tous les cas, « c’est une grosse friction. Tant que ce n’est pas généralisé par la loi, ceux qui le mettent en place se privent d’une importante partie de leur trafic », explique à l’AFP Nils Lataillade, cofondateur de The Poken Company, qui utilise la solution technologique Yoti pour son application de contenus pour adultes.

Yoti, qui revendique 500 millions de vérifications à ce jour, estime l’âge à partir d’une photo de l’utilisateur, avec une précision de 1,5 an (selon l’entreprise), et garde en mémoire cette information pour la réutiliser sur d’autres sites. Cette réutilisation est d’ailleurs essentielle pour éviter que l’utilisateur ne doive sans cesse recommencer la vérification. Ainsi le consortium EUConsent, né d’un appel d’offres de la Commission européenne, vise à rendre interopérables les différents acteurs afin qu’ils puissent s’échanger les vérifications déjà effectuées. En test à partir de février 2022, le dispositif sera prêt à l’été, promet Iain Corby qui en est l’un des promoteurs.

« Les entreprises devront alors s’accorder sur la manière dont elles veulent être rémunérées pour avoir effectué la vérification. Nous créons un marché ouvert et compétitif », estimé selon l’Avpa à 4 milliards d’euros dans l’Union européenne d’ici cinq à sept ans. « Une hypothèse qui n’est peut-être pas immédiatement évidente est que 30% des sites devront d’une manière ou d’une autre vérifier l’âge » de leurs visiteurs, estime l’association, qui compte notamment sur les acteurs publicitaires, dont Google et Facebook. Selon le règlement européen RGPD, entré en application en 2018, le recueil d’un consentement valide n’est en effet valide qu’au dessus d’un seuil d’âge fixé selon les pays entre 13 et 16 ans. Un aspect juridique largement ignoré pour le moment, faute de pouvoir les identifier.

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