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Le torchon brûle entre des hôteliers et Airbnb, assigné en justice pour « concurrence déloyale »

Par Séverine ROUBY / AFP

Une vingtaine d’hôteliers épaulés par l’Umih, premier syndicat patronal du secteur, ont assigné en justice la plateforme Airbnb pour « concurrence déloyale », lui réclamant 9,2 millions d’euros de dédommagement.

L’assignation devant le tribunal de commerce de Lisieux a été notifiée à la société Airbnb Ireland, établie à Dublin et siège européen du groupe, ce jeudi 20 juin, a annoncé leur avocat Jonathan Bellaïche, du cabinet d’avocats Goldwin.

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L’audience est prévue le 6 septembre.

Les 26 hôtels participant à l’action sont situés dans 15 départements et sont de « toutes typologies », avec aussi bien des hôtels indépendants qu’affiliés à des groupes (Ibis, Best Western, Kyriad), selon la liste présentée par l’Umih lors d’une conférence de presse.

Le syndicat soutient cette action, mais ne s’y est pas associé, étant à l’initiative d’une autre plainte pour concurrence déloyale contre Airbnb auprès du tribunal de commerce de Paris, avec une audience prévue le 13 septembre.

Les hôteliers reprochent notamment à la plateforme de ne pas respecter ses obligations comme la mention du numéro d’enregistrement sur certaines annonces dans des communes où c’est obligatoire, un huissier ayant constaté l’absence de numéro d’enregistrement sur des annonces à Kaysersberg en Alsace et à Cannes.

Ils estiment aussi que la plateforme « ne supprime pas les annonces de plus de 120 jours pour les résidences principales, ne collecte pas, ne déclare pas et ne paye pas la taxe de séjour ».

Pour Me Bellaïche, Airbnb ayant été reconnu éditeur de contenus (décision de la cour d’appel de Paris de janvier 2023), « la plateforme a une obligation de vigilance sur la légalité des annonces publiées », ce que conteste Airbnb qui estime que son statut est celui d’hébergeur de contenus.

« Nous savons que beaucoup de gens louent leur appartement sans autorisation », en sous-louant ou en ne respectant pas la réglementation sur le changement d’usage, selon laquelle des mesures de compensation sont réclamées dans certaines villes, soutient Me Bellaïche.

– 187 millions –

« Cette assignation s’inscrit dans une longue série d’actions infructueuses intentées ces dernières années par des lobbies hôteliers », a répondu Airbnb dans une déclaration transmise à l’AFP.

« Tandis que ce lobby hôtelier s’évertue à défendre des arguments contraires aux droits français et européen, Airbnb a permis à de nombreuses familles de gagner environ 3.800 euros en moyenne, et aux communes de percevoir 187 millions d’euros de taxe de séjour, sur la seule année 2023 », indique la plateforme qui assure se conformer à toutes ses obligations.

« S’il s’avère que cette nouvelle action en justice nuit à l’activité d’Airbnb ou à la capacité des hôtes français de louer leur bien, nous envisagerons toutes les options, y compris judiciaires, pour protéger ces droits », poursuit-elle.

Me Bellaïche, qui mise sur des condamnations antérieures de la plateforme pour faire valoir les préjudices, a également mis en demeure Airbnb de produire les titres de propriétés de certaines annonces de logements localisées autour d’hôtels participant à l’assignation.

« S’ils ne demandent pas les titres de propriété ça les rend coresponsables des manquements des hôtes », estime l’avocat.

« A Nice, nous avons trouvé 3.673 annonces non autorisées, sans numéro d’enregistrement », assure Eric Abihssira, exploitant d’un hôtel à Nice et participant à l’action.

Avec la hausse des locations Airbnb autour de lui, cet hôtelier estime que « c’est comme si j’avais un hôtel de 60 chambres autour de moi qui me fait concurrence sans les mêmes obligations ».

« On ne remet pas en cause l’économie des plateformes, ni le droit des gens à louer leur logement » maintient toutefois Jonathan Bellaïche. « On remet en cause la concurrence déloyale », fait-il valoir, indiquant que les plateformes sont aussi des partenaires et que des hôteliers utilisent Airbnb ou Booking.

L’assignation intervient au moment où une loi sur les meublés touristiques, très attendue par la profession car elle devait davantage réguler le secteur et rééquilibrer la fiscalité, est en suspens du fait de la dissolution de l’Assemblée nationale.

Sur la loi, « on devrait pouvoir repartir au même point », espère Véronique Siegel, présidente de la branche hôtellerie de l’Umih, relevant l’urgence de ce dossier qui doit répondre au problème de pénuries de logement en France, de surtourisme et de logement des saisonniers.

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