L’Europe à l’heure du défi de l’ubérisation
On aurait tort de croire que seule la France est confrontée au défi de l’ubérisation de son économie. Passé le débat sur l’offre concurrentielle en matière de transport à la personne ou d’hébergement qui ont agité l’hexagone, l’Europe tout entière – y compris ses dirigeants – prend la mesure du numérique appliqué au secteur marchand ou de service, avec ses succès et ses échecs.
Ainsi, Uber, plateforme de VTC américaine a quitté la Hongrie la semaine passée; ce pays membre ayant légiféré pour interdire aux conducteurs hongrois, l’usage de leur véhicule à des fins commerciales (1). De son côté Airbnb, géant de l’hébergement collaboratif a scellé un accord avec Carlson Wagonlit, American Express et BCD afin d’accélérer le développement du voyage d’affaires. 10 millions de voyageurs ont déjà été accueillis en Airbnb en France. On imagine parfaitement que la combinaison de l’espace Shengen et de la monnaie unique ne peuvent qu’être bénéfiques à l’économie collaborative européenne.
L’Europe pour un marché numérique communautaire
D’ailleurs, la Conférence franco-allemande sur la transformation numérique des économies, qui s’est tenue au Palais de l’Elysée l’automne dernier l’a confirmé. Le Président de la Commission européenne Jean-Claude Juncker a d’ailleurs affirmé en la matière, que «la seule échelle nationale ne pouvait suffire» et que l’Europe était «l’échelle pertinente» (2). Andrus Ansip, Vice-président de la Commission européenne a même été chargé du développement du marché numérique européen.
On aurait donc tort de penser que l’espace communautaire est à l’origine de tous les maux nationaux, ou pire, qu’il ne sert à rien. Car la réflexion menée par ses instances se veut prospective. Elle vise à lever les barrières en direction des entreprises pour qu’elles trouvent, hors des frontières nationales, des compétences afin d’opérer des transitions dans leur pays d’origine. Voire même de garantir aux consommateurs des conditions plus justes d’accès aux produits et services.
Vers un environnement réglementaire ouvert et équitable.
Ce serait sans doute l’occasion d’unifier le marché unique européen encore trop divisé par ses 28 économies nationales et de répondre aux exigences des chefs d’entreprises et investisseurs qui souffrent de petits marchés fragmentés. Bien sûr, ce nouveau cadre exigera d’harmoniser les exigences sociales par le haut, et qui sont pour le moment, trop hétérogènes d’un Etat à l’autre. Donc de mettre fin par la même occasion, aux incertitudes juridiques sur le statut des free-lances en lui donnant une dimension européenne. Le dernier rebondissement dans la re-qualification des salariés de Uber en France en est un bon exemple et devrait encourager le législateur européen.
Le développement d’un marché numérique européen serait en tout cas cohérent avec celui de la e-concurrence, à la condition que les règles du jeu soient parfaitement établies pour les consommateurs et les prestataires; l’un et l’autre devant être protégés par un environnement réglementaire ouvert et équitable.
Il reste maintenant à encourager les PME françaises dans cette aventure. A positionner la France comme un pays moteur car c’est par le continent européen, avec un avenir numérique commun que nous retrouverons sans doute, une grande partie de notre compétitivité.
(1) Source : Les Echos, vendredi 15 juillet 2016
(
2) Magazine Europe Parlementaire, 1er trimestre 2016.
LIRE aussi: Le «virus» Uber passé au crible par Fabernovel
Julien Pérona est PDG d'Addworking, une agence d'emploi digitale spécialisée dans le «hors salariat» créée en 2014.
Il a auparavant travaillé pour la société Schindler ainsi que pour General Electric.
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