L’expérience collaborateur …fondation de l’expérience client
Par Bertrand Dalle, fondateur de Conseil & recherche et larecherchecollaborative.com
Répondre à la complexité croissante
Le travail est devenu tant dicté par l’incertitude que certains pensent que nous ne tirerons plus de performances nouvelles à continuer à le penser rationnellement. Et les organisations du travail ont atteint un tel niveau de complexité qu’il devient là aussi nécessaire de lâcher prise sur notre velléité de vouloir encore les maîtriser.
La prescription du travail, comme la structuration d’une organisation répondent encore à des croyances que l’on est en mesure de penser à quelques-uns les conditions qui vont pouvoir dégager plus de valeur pour nos clients. Laisser aux collaborateurs le soin de définir leur travail comme leur organisation est un saut dans l’inconnu. Et pourtant, tout est devenu si complexe que certains y songent pour appréhender différemment ce dilemme organisationnel.
Et avec la disparition de ces formes de prescription, les individus sont remis au centre de l’organisation. Le fonctionnement de l’entreprise peut alors se penser autour de ce que l’on appelle déjà l’expérience collaborateur. En s’inspirant des logiques développées par le marketing sur l’expérience client – l’UX ou l’user experience – l’expérience collaborateur désigne l’ensemble des interactions et expériences vécues par un collaborateur, dans les moments-clés de son parcours comme dans son quotidien professionnel.
Repenser les organisations au service des individus
Et si nous nous attachions à comprendre et penser le parcours des collaborateurs et promouvoir des modes de management différenciés propices à une expérience de vie professionnelle de grande qualité ? Ces logiques permettent d’aller plus loin que les dispositifs RH restrictifs réservés aux hauts potentiels, de dépasser les démarches de qualité de vie au travail, et surtout de penser la relation collaborateur dans une symétrie des attentions : choyer ses collaborateurs c’est choyer ses clients.
Travailler avec la tête …mais aussi avec le cœur !
Les entreprises qui misent sur la force de l’humain pour réguler leurs organisations s’appuient ainsi sur des dynamiques individuelles qui laissent la part belle à l’expression des émotions. Comment un collaborateur peut-il se saisir à bon escient de l’espace d’autonomie qui lui est donné ? Comment peut-il prendre des (bonnes) initiatives ? Les sociologues du travail nous ont proposés maintes fois ces questions. L’engagement individuel répond aussi d’une envie personnelle qui se déclenche assez peu par des processus rationnels. Il s’agit alors de penser comment chacun va trouver dans son expérience professionnelle une envie qui lui permette un engagement vraiment différent que le seul engagement par la tête !
Une logique qui repose sur des valeurs
Commencer à penser l’expérience collaborateur est une belle manière de mettre l’organisation au service de la réussite de chacun. Depuis son entrée dans l’entreprise, jusqu’à sa sortie, nous travaillons dans des contextes si singuliers qu’il est a priori bien difficile de penser l’expérience collaborateur de manière standard.
Nous vivons d’innombrables situations de travail, dont l’influence des conditions de travail, au sens large, mais aussi de notre état émotionnel vient complexifier leur appréhension. A son tour, notre état émotionnel est lui aussi affecté par de nombreux facteurs, professionnels comme personnels, ce qui ne rend pas l’exercice nécessairement simple. La multiplicité des situations de travail comme la singularité des individus, amènera donc sans doute « l’expérience collaborateur » à se mettre en place sous forme de valeurs plutôt que sous forme de process.
Le débat promet d’être riche !
Cet article a été publié dans le numéro de mars 2018 de Liaisons Sociales Magazine
Le contributeur:
Bertrand Dalle est le fondateur de Conseil & recherche et larecherchecollaborative.com.