Loi Macron: 2 mesures qui concernent les start-up et leurs salariés
Présenté hier en Conseil des ministres, le projet de loi pour la croissance et l’activité, surnommée « loi Macron », fait beaucoup parler de lui notamment en ce qui concerne l’assouplissement du travail le dimanche, les professions juridiques, les notaires ou la régulation du marché des autoroutes. Pourtant, le projet qui sera présenté au Parlement le 22 janvier contient 106 articles, parmi lesquels figure un volet actionnariat. Certaines mesures concernent directement les entreprises, notamment les plus petites comme les start-up.
Les BSPCE
Ainsi, les bons de souscription de parts de créateurs d’entreprise (BSPCE), une des formes de « stocks options », pourraient être facilités pour les salariés de start-up. Une solution qui séduit de nombreux entrepreneurs qui, au démarrage de leur activité, ne disposent pas des moyens financiers nécessaires au recrutement de développeurs ou d’ingénieurs par exemple. Pour les attirer, ils peuvent alors leur accorder des parts au capital de l’entreprise à un prix fixé, espérant jouer un rôle incitatif sur les nouvelles recrues.
« Il est crucial qu’une start-up « early stage » puisse associer ses premiers salariés à son capital faute de pouvoir leur offrir des salaires de grands groupes » selon Jean-David Chamboredon, administrateur de FranceDigitale, PDG du fonds d’investissement ISAI Gestion, et ancien chef de file du « mouvement des Pigeons » en 2012 lors de la réforme sur les plus-values de cessions, sur laquelle le gouvernement avait reculé.
« Les start-up peuvent déjà accorder des BSPCE mais, en l’état actuel, le problème survient lorsqu’une entreprise souhaite accorder aux salariés d’une de ses filiales des actions de la société mère du groupe. C’est un problème rencontré tous les jours et qui constitue un grand point de blocage, car les entreprises créent souvent des filiales distinctes, notamment pour leur R&D. En l’état actuel, les salariés de cette filiale ne peuvent pas bénéficier de BSPCE de la société mère, mais seulement d’actions de la filiale elle-même, ce qui n’a que peu intérêt. La loi Macron veut élargir les BSPCE de la maison-mère à tous les salariés, y compris ceux des filiales » explique Nicolas Duboille, avocat associé, spécialiste de la fiscalité des entreprises chez Granrut. A ce jour, le texte stipule que cela ne sera possible que pour une entreprise qui détient plus de 75% du capital de sa filiale.
« Cela paraît anodin mais dans le cadre d’une internationalisation ou d’une diversification, permettre à un petit groupe d’avoir tous ses salariés alignés sur les mêmes objectifs de création de valeur via un seul instrument est une vraie avancée » ajoute M. Chamboredon. Pour rappel, seules les entreprises de moins de 15 ans dont le capital est détenu au moins à 25 % par des personnes physiques et dotées d’une valorisation inférieure à 150 millions d’euros si elles sont cotées en Bourse, peuvent distribuer des BSPCE.
Les attributions gratuites d’actions
Par ailleurs, la loi Macron prévoit un aménagement du régime des actions gratuites pour l’entreprise et les salariés. Celles-ci sont similaires aux BSPCE si ce n’est qu’elles sont octroyées… gratuitement, mais ne sont disponibles qu’après une période de conservation obligatoire de deux ans.
Ces attributions d’actions gratuites sont soumises à la fiscalité à deux moments : lors du gain réalisé avec l’acquisition des titres (intégré au revenu imposable), et sur la plus-value touchée au moment de la cession. « Les actions gratuites, qu’Axelle Lemaire appelle aussi les Actions d’Intrapreneurs, sont devenues inutilisées par les entreprises de croissance du fait d’un coût devenu exorbitant pour l’entreprise et d’une fiscalité pour les bénéficiaires devenue inattractive. Pour faire simple, dans certains cas, cela coûte moins cher à une entreprise de verser un bonus court terme à un salarié que de lui permettre de devenir actionnaire… C’est absurde ! » estime M. Chamboredon.
« La loi Macron prévoit d’instaurer un abattement pour durée de détention sur le gain d’acquisition ( la valeur des actions au moment où elles sont attribuées gratuitement, ndlr). Ce dispositif avait déjà été instauré il y a quelques années mais la loi Macron prévoit d’appliquer cet abattement également au gain d’acquisition » précise M. Duboille.
«L’une des vraies problématiques qui devra être traitée par le Parlement est le remboursement de la contribution patronale», Nicolas Duboille.
« Cela rend cet instrument bien plus attractif pour les actionnaires de moyen terme que sont les salariés en bénéficiant » selon M. Chamboredon. « Le texte prévoit un volet pour simplifier les périodes d’acquisition et de conservation (aujourd’hui 2 ans + 2 ans) pour aligner le schéma sur les pratiques internationales (typiquement 1 an + 1 an) ce qui est parfaitement en ligne avec une taxation des plus-values maintenant fonction de la durée de détention des actions » ajoute-t-il. « Le texte favorise aussi les petites allocations (inférieures au plafond de la Sécurité Sociale) via un système de franchise de contribution pour les sociétés ne versant pas de dividendes ».
Enfin, les salariés pourraient pour leur part être exonérés des 10% de contribution salariale lors de l’acquisition des titres. Ceux-ci sont recouvrés à la date de cession. Objectif affiché dans le projet : « associer plus étroitement les salariés à la réussite de leur entreprise (…), soutenir et accélérer le développement de la French Tech (…) et attirer ou retenir sur notre sol les sièges sociaux des entreprises et les meilleurs talents ».
La contribution patronale
La contribution patronale acquittée par l’entreprise au moment de la décision d’attribution d’actions gratuites devrait également évoluer avec cette loi pour la croissance et l’activité. Alourdie à 14% en 2011 (contre 10% auparavant), celle-ci est passée à 30% lors du changement de majorité pour aligner le traitement social et fiscal des actions gratuites, des stocks options et des BSPCE sur la fiscalité applicable au salarié. Il est désormais question de l’abaisser à 20%.
« Il est important qu’un Criteo puisse attirer des talents aux quatre coins du monde sans être pénalisé par le fait d’être une société anonyme française », Jean-David Chamboredon
« Mais l’une des vraies problématiques qui devra être traitée par le Parlement est le remboursement de cette contribution de 30%, si finalement les actions ne sont pas attribuées » estime M. Duboille. En effet, les entreprises conditionnent souvent l’attribution d’actions gratuites à des objectifs : durée de présence dans la société, atteinte de bénéfices… « Mais si les actions ne sont finalement pas livrées pour une raison ou une autre, cette contribution n’est pas remboursable actuellement » rappelle M. Duboille.
Selon Jean-David Chamboredon, « avec ces modifications, les entreprises de croissance ont deux outils rénovés qui ressemblent à ceux dont bénéficient les sociétés étrangères et sont encouragées à élargir l’actionnariat au plus grand nombre de salariés (notamment via le mécanisme de franchise). Il est important qu’un Criteo puisse attirer des talents aux quatre coins du monde sans être pénalisé par le fait d’être une société anonyme française. Il est sans doute possible d’être encore plus ambitieux dans l’élargissement de l’éligibilité aux BSPCE pour les PMEs ou dans la baisse des contributions payées par l’entreprise sur les actions gratuites. Mais ne boudons pas notre plaisir de voir que les mentalités changent et que les nouveaux modèles d’entreprises semblent dorénavant compris par nos gouvernants ! ».
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En ce qui concerne l’évolution des actions gratuites : qu’en est il en cas de cession / revente rapide de la start-up? jusqu’à présent, sauf erreur de ma part, si la cession se fait pendant la période d’acquisition des actions gratuites (actuellement 2 ans, bientot 1 an), le salarié perd tout…pas très motivant tout cela…