[Path] Scandales en cascade dans la Silicon Valley
Path, jusqu’ici, c’était ce petit réseau social qui monte et qui recevait la plus grande des sympathies. Basé uniquement sur une appli mobile, centrée principalement sur le partage de photos, Path a surtout la particularité de proposer un argument choc : ce n’est pas un “réseau social”, mais un “réseau personnel”, sur lequel vous êtes limité à 150 amis maximum, et où on vous promet que votre vie privée restera privée.
Tout ça, c’était jusqu’à la semaine dernière quand un développeur a découvert que l’application iPhone Path téléchargeait sa liste de contacts sans lui demander son autorisation. C’était d’autant plus étonnant que depuis peu, la version Android de l’application proposait aux utilisateurs d’autoriser ou non l’application à faire exactement ça : télécharger leur carnet d’adresses pour les aider à trouver leurs contacts.
La révélation n’a pas tardé à faire le tour de la blogosphère anglophone, et au crédit de Path, la start-up a réagit promptement en s’excusant publiquement sur son blog et en promettant d’effacer les données et de proposer au plus vite une update de l’application qui demandera dorénavant l’autorisation des utilisateurs avant d’aller piocher dans leur carnet d’adresses. Le schéma est connu et on aurait pu en rester là : une start-up à la mode se fait prendre la main dans le sac des données privées, s’excuse et promet qu’elle ne recommencera pas, puis la blogosphère passe au buzz suivant. C’est arrivé plusieurs fois à Facebook, et ça ne les a pas empêché de grandir… et de recommencer.
Pas de chance pour Path, certains journalistes semblent en avoir assez de ce cycle de fautes et d’excuses. Du coup des articles dans le New York Times ou Gawker ont continué à critiquer vertement Path. En particulier, Nick Bilton du New York Times, semblait peu convaincu par les excuses présentées et a écrit un article expliquant comment ces données, qui peuvent sembler triviales pour nous, sont vitales dans les pays du moyen orient où les réseaux sociaux sont utilisés par des dissidents et observés par le pouvoir.
Une pratique courante sur iPhone
Suite à cet article, donc, c’est toute une autre partie de la blogosphère high tech qui est venu à la rescousse de Path : Michael Arrington et MG Siegler se fendent tous les deux d’une série d’articles qui attaquent personnellement le journaliste du Times et qui révèlent que ce qu’a fait Path sur son application iPhone, beaucoup d’autres développeurs le font sans être inquiétés, notamment Foursquare.
Le vrai coupable dans l’affaire, ce serait donc Apple, qui approuve sur son app store des applications “douteuses”.
Le fait est que si ce cycle de fautes suivis d’excuses peut agacer, il est malheureusement compréhensible : les startups, par nature, vont très vite, doivent prendre des raccourcis, et font des erreurs de jeunesse. Elles n’ont pas de longs process de vérification, d’aller-retours avec un service juridique tatillon. C’est ce qui leur permet de grandir vite, et les erreurs comme celles là font partie du jeu. Une entreprise établie comme Apple devrait mieux protéger ses clients de développeurs qui essaieront toujours de tester les limites de l’éthique et de le légalité.
Encore une fois, on pourrait en rester là mais il y en a d’autres dans cette histoire qui testent les limites de l’éthique : les blogueurs.
Un milieu trop consanguin
Ce que je n’ai pas mentionné dans le paragraphe précédent, c’est que Michael Arrington et MG Siegler ne sont pas que blogueurs : ce sont respectivement un ancien fondateur et un ancien blogueur de TechCrunch, qui ont quitté le navire contraint et forcé quand un conflit d’intérêt est apparu. Car ensemble ils ont lancé “Crunchfund”, un fond d’investissement qui finance exactement le genre de startups dont TechCrunch parle à longueur d’articles.
Siegler et Arrington ont beau avoir quitté TC, ça ne les empêche pas de rester des blogueurs influents sur leurs blogs personnels, et quand ils prennent la défense de Path avec tant de véhémence, il faut savoir qu’ils sont tout sauf neutres puisque Crunchfund a investit beaucoup dans cette start-up. Et pas dans Foursquare, par exemple, qu’Arrington n’a pas hésité à dénoncer pour défendre Path.
Toute cette affaire a donc inspiré un autre intervenant dans ce qui est devenu une guerre des blogueurs de la Silicon Valley : Dan Lyons, qui “imagine” l’histoire d’un journaliste de la Valley qui, frustré de voir les gens sur qui il écrit devenir beaucoup plus riches que lui, décide de monter un fond d’investissement qui lui permet d’aller voir des entrepreneurs en leur promettant des articles positifs contre la possibilité d’acheter quelques parts qui, probablement, vaudront beaucoup plus dans quelques années. Et en cas de refus, attendez-vous à des articles beaucoup moins positifs…
On ne saurait juger du bien fondé de ces accusations, mais ce n’est sans doute pas le dernier épisode de l’affaire. A moins que tout le monde ne soit trop occupé demain à parler de l’iPad 3…
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Il manque une partie de l’affaire ici, avec les réponses d’Arrington et Siegler, et surtout la superbe ligne d’Arrington : « Disclosure: CrunchFund is not an investor in Foursquare, but we’d sure love to be. That’s probably some kind of conflict of interest. »
Très hontement, François, j’ai lu ces réponses (celle d’Arrington est même évoquée dans l’article) mais je ne vois pas vraiment ce qu’elles apportent de plus au débat.
(il fallait bien sur lire « honnêtement » et pas « hontement », qui ne veut rien dire)
Pour moi, ces réponses réduisent à néant tout l’argumentaire « oh mais ils défendent Path parce qu’ils sont actionnaires » et accessoirement expliquent pourquoi l’attaque Lyons est personnelle et pitoyable.
« On ne saurait juger du bien fondé de ces accusations, mais ce n’est sans doute pas le dernier épisode de l’affaire. », oui en effet ce n’était tellement pas le dernier épisode que les suivants étaient déjà sortis au moment de la publication de l’article, je ne fais que le remarquer ;)
C’est toujours le risque quand les actionnaires d’un journal sont les mêmes que ceux des start-up dont il parle.