Un mot: Ambitieux
Il faut, en moyenne, quatre minutes pour lire un article, et «deux minutes chrono!» pour monter «à pied tous les jours» les cinq étages («huit avec les demi étages») qui séparent le directeur général d’Havas Media Group France de son bureau. Surtout, il faut moins de 32 millions de minutes (l’équivalent d’une vie active avec une retraite à 62 ans), pour, si possible, atteindre le sommet que l’on veut atteindre. C’est dans cette timeline qu’évolue Raphael de Andreis, l’ex-directeur général de la filiale BETC, revenu en 2013 dans le giron Bolloré, chez Havas, pour diriger la branche média de la sixième agence mondiale de publicité d'après Adbrands (1ère selon le classement Recma).
Rencontrer Raphael de Andreis est donc avant tout une question d’aiguilles; celles de la montre d’abord, et celles qui tirent à la perfection le costume de dirigeant d’une agence qui a généré 3,2 milliards d'euros de chiffre d'affaires en 2014-2015, sur une croissance organique de +5,1%. Dans cette mécanique, aucun grain de sable possible hors du sablier: «J’ai un rendez-vous avec un client juste après (en réalité un entretien avec un candidat au recrutement ndlr) », s’enthousiasme celui qui dirige l’ensemble des services de l'agence; du pôle média, à l’achat d’espace, aux boîtes de production (Save Ferris, Upside Télévision).
Ambitieux dès la sortie de ses études, le remplaçant de Dominique Delport est certain d’être aujourd’hui à sa place. Après une première expérience dans le marketing chez TBWA, une formation intensive à BETC sous la houlette de Mercedes Erra et d'Éric Ton Cuong, et une parenthèse en tant que DGA des contenus payants chez Canal+, Raphaël de Andreis se sent aussi « trilingue » avec ce fusil à trois coups.
Il sait choisir les bonnes personnes. Il est constamment soucieux de progresser; c'est un garçon qui se programme», se souvient Mercedes Erra, sa mentor et amie.
Passé à la vitesse supérieure, les années d'initiation et d'apprentissage semblent révolues. Si Raphaël de Andreis ne siège pas au Comex du groupe de communication, il est l'outil choisi pour emmener la vieille maison, «qui vient du offline», vers la transformation digitale. Le tout à un rythme infernal. «Nous vivons dans un monde extrêmement complexe avec des médias, des technos, des devices, et des contenus nouveaux tous les jours», enchaîne le DG qui reconnait vouloir «aller parfois trop vite», «ne pas laisser le temps aux choses de distiller…» Temps de lecture: 2 minutes 50.
Sa méthode: Accélération
Pour faire d’Havas «l’agence UX», et diffuser « (sa) religion, celle où «le vrai patron de tout ça, c’est le consommateur», Raphaël de Andreis, « évite de passer du temps à discuter, à brancher des solutions qui n’auraient pas de traduction intéressante pour le consommateur…» Cela se fait donc aussi dans la douleur. Pour mettre tout le monde à la data regroupée dans la DMP (le Labo), à la modélisation des parcours, à «l'attribution modeling», au programmatique, à la performance, ou à l’adserving, la méthode est radicale: «On a du créer de l'inconfort; 6 000 heures de formation pour 300 personnes, obligatoires pendant un an».
A 47 ans, Raphael de Andreis veut être l'homme de la synthèse. «J'ai mis 100% du groupe Havas en open space, moi compris. Nous avons mis ensemble tous les patrons de services, de trading, d'achat TV, les consultants et les partenaires». «Une idée sur trois naît d'une rencontre impromptue; je crois à l'étincelle inter-humaine», confie-t-il.
A l’heure de la disruption des acquis, être bien né et dirigé comme hier ne suffisent plus, Raphaël de Andreis l’a bien compris. Il en faut plus pour affronter des concurrents voraces: les Publicis, Groupe M, Aegis… qui chassent les Carrefour, LVMH, Volkswagen, chipées au portefeuille Havas. Mais aussi les consultants de «Capgemini Entertainment et Accenture» et surtout «Google et le last click». Aussi, chaque mois, un « digital native » est nommé pour «tuer» l'agence, raconte le DG. Un jeune de la génération Y doit ainsi démolir la maison créée en 1832, à coup d’e-solutions et de nouveaux usages. «On ne peut plus se contenter de benchmarker et d’analyser», observe le publicitaire.
Ses modèles
Fils d'Edouard de Andreis, éditeur et fondateur des éditions Rivages (rachetées par Payot), Raphaël nourrit une admiration sans faille pour celui «qui avait, dit-on, un charme incroyable», détaille Mercedes Erra. «Il a disparu alors que j'avais 23 ans, mais il a fait 70% de ma formation intellectuelle», révèle très vite le DG.
Son modèle phare est aussi la patronne emblématique de BETC, presque ex aequo avec son autre éducateur, Éric Ton Cuong. Mercedes Erra raconte:
Raphaël ne se laisse pas faire, il a un vrai caractère. Un jour nous faisions le point sur une campagne qu’il avait vendue. J’étais très mal à l’aise; je voulais aller dire au client que ce n’était pas bien. Raphaël m’a alors indiqué que si j’intervenais, il n’était plus là, que tout cela représentait une année de travail. Au final c’est moi qui me suis tue car Raphaël était important pour moi. Et ajoute : «Raphaël c'est aussi la fidélité. J’ai l’impression d’être parfois un peu sa maman.»
Sa mentor qui l'avait choisi pour son côté «travailleur et organisateur» n'a pas toujours compris ses choix. Au sujet de la parenthèse Canal Plus: «Le showbiz l’attirait, c’était pour lui au-delà de la publicité. Moi je ne voyais pas ce qu’il y avait de plus intéressant… Il avait peut-être aussi l’impression de mieux faire son trou ailleurs.»
Un échec, une réussite
Cuisinier à ses heures, Raphaël de Andreis est fier lorsque, grâce à lui, la sauce prend bien entre des profils opposés tels les scénaristes des Kaïra (Save Ferris Production) et «un prix Nobel de mathématiques», au sein d'une même équipe. Son autre victoire est celle obtenue avec Stéphane Xiberras, à BETC, avec lequel il conçoit «le film de pub le plus primé de l'histoire des films publicitaires».
Côté échec, il s'est un jour «enivré de son geste créatif» sur une campagne de lancement très importante. «Au final, j'avais quitté le bon sens», résume celui qui a appris le pilotage automatique.
Ses engagements personnels
«Il y a deux trois causes que je soutiens activement, mais je n'aime pas trop en parler. Il y a un centre pour les enfants mal traités au Maroc, et l'autisme, au travers du groupe Havas».
- Enfant, il voulait être cuisinier, comme Jamie Oliver, «le cuistot businessman et Chef».
- Raphaël de Andreis est au téléphone avec Yannick Bolloré (le patron de Havas Group) «deux fois par jour, au moins».
- Il travaille sur un projet personnel pour l'agence, une idée dans le domaine de l'IoT qu'il décrit comme «révolutionnaire».
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