Pour une French Tech Montpellier vertueuse, transparente et bienveillante…
La French Tech est un label communautaire, open source, qui permet à chacun de le décliner, de le faire vivre à sa manière sur son territoire. De ce label ouvert, sont nées de nombreuses actions collectives et individuelles, toutes porteuses d’un sens commun. Quel est-il ? En écoutant les motivations d’acteurs très différents depuis deux ans, je le définirai ainsi:
Mieux vivre sur le territoire, dans les métropoles, grâce au développement économique des start-ups et à la solidarité d’un écosystème qui — tout en participant à cet élan — tisse en son sein des liens transversaux, se renforce lui-même. Cette dynamique économique territoriale d’un nouveau genre génère des effets exogènes et endogènes positifs pour chacun des participants (entreprise, individu, salarié, association, artiste, école, etc.).
Les effets exogènes se jouent à une échelle nationale. A travers la French Tech, la France s’est rendue visible auprès des investisseurs internationaux,crédibles auprès des écosystèmes les plus dynamiques mondialement. Cette image de «start-up nation», renforcée par le grouvernement à travers la création de hub internationaux de la French Tech, permet à la France de créer un effet de levier pour des entreprises innovantes, qui ainsi auront des conditions plus favorables à leur réussite. Démarcher commercialement ensemble à l’étranger, sous une même bannière, donne plus de force à chacun.
Les externalités positives
Les effets endogènes sont la création de nouvelles collaborations entre les entreprises d’une même métropole, qui avaient de la peine à s’identifier malgré leur proximité géographique. Cette fluidité de l’information, à travers des rencontres physiques démultipliées, des événements inventés, des conversations organisées dans des groupes, des sites en ligne, a permis d’identifier — pour chacun des participants — de nouveaux partenaires.
A Montpellier, on peut citer les événements organisés par le Conseil de la Frenchtech, qui sont répertoriés sur le site de la Métropole, animatrice de ce conseil (gouvernance de l’écosystème Frenchtech local). Egalement de nombreux événements spontanés ont lieu Les Poulaillers de la Frenchtech Montpellier, des rendez-vous informels, joyeux et qui rapprochent ; la MediaLab Session, La grande école du numérique UpTo portée par Dell et Face Hérault, et Simplon.co ; ou encore StartupXchange, un voyage des entrepreneurs de la Frenchtech à Austin (USA), etc.
D’un point de vue numérique, la dynamique se nourrit à travers le groupe Facebook fédérateur des interactions quotidiennes de la communauté (+2000 inscrits), l’émergence de l’association TIPI (TPE, indépendants partenaires de l’innovation), une page Facebook Frenchtech Montpellier gérée par la communauté, un kit de communication des événements entièrement libre, le tournage d’un clip réalisé par les start-upers, une lettre d’information dédiée La Press Tech et une multitude de relais médias spontanés sur des blogs spécialisés ou d’entreprises privés.
L'équilibre entre le marchand et le non marchand
Coopérer, collaborer, jouer collectif sont les moteurs de cette énergie bénévole, mise par chacun au service de tous. Dans une communauté comme la French Tech Montpellier où chacun a sa place, la valeur du collectif est subjective et tient à l’équilibre fragile entre les attentes et les contributions.
Dans un système marchand, la réponse est simple, l’équilibre se fait entre l’offre et la demande, et la transaction financière permet d’en établir une valeur négociée transparente, par le prix affiché. Les entreprises qui se rapprochent au sein de la Frenchtech métropolitaine développent leur chiffre d’affaires, embauchent et créent des emplois salariés.
Dans un espace immatériel comme le net, où circulent les idées et les relations, l’échange libre de la connaissance partagée en ligne doit être favorisé par «l’abandon des conceptions inhibitrices de l’innovation de la pseudo-rareté» (fondée sur la supposition que le flux du savoir doit être restreint, raréfié, à travers des copyrights excessifs) comme l’indique la P2P Fondation 1. En un sens, la communauté est la réelle détentrice de la French Tech. Elle n’appartient ni à une collectivité, ni à un individu. En revanche, elle fait émerger des leaders, émergence facilitée par le travail en réseaux et les usages participatifs suscités par le ou les administrateurs d’un groupe qui créent des conditions propices au partage.
Depuis deux ans, au sein du groupe Facebook «Frenchtech Montpellier Ecosystem» la possibilité est donnée aux gens de participer sans avoir besoin d’autorisation a priori ; le contrôle de la qualité des échanges se faisant a posteriori par la communauté.
Récemment, un événement m’a reposé la question de la valeur de la communauté et des modes de contribution. En tant qu’administratrice du groupe, j’ai supprimé une publication qui me semblait en conflit avec le bon fonctionnement de la communauté. Cet épisode me donne l’occasion de rappeler que, si je ne suis pas la seule leader de la French Tech Montpellier, et si je ne suis pas non plus la seule animatrice, je gère le fonctionnement de ce groupe Facebook pour la communauté et ce, bénévolement. Cette énergie que je donne m’enrichi humainement — comme pour les autres — à la hauteur de ce que j’y donne.
Si j’ai supprimé un post, c’est parce qu’il était caractéristique de l’incompréhension du rôle de chacun dans l’écosystème et du mien en particulier. (Discloser : le post avait été publié par une personne d’un côté à la suite du refus d’une prestation tarifée qui m’avait été demandée pour développer des relations spécifiques au sein d’une partie de la communauté ; et d’un autre côté en méconnaissance du fait que bénévolement j’étais en parallèle administratrice de ce groupe au bénéfice de la même communauté). Au-delà de ma petite personne, et du fait que je comprends très bien qu’on puisse refuser mon devis, cela pose la question de la compréhension de «qui fait quoi» dans un écosystème et de la tarification de prestations dans un système ouvert, dont le format est lui-même nouveau pour nombre d’entreprises.
La French Tech : la création d’un commun
Les relations tissées dans la French Tech et la connaissance produite gérées par et pour la communauté sont un bien commun qui doit être protégé par des règles spécifiques, pour gérer ces ressources de façon viable, équitable et durable. Le système ouvert que représente la French Tech Montpellier, a la vertu d’éduquer mutuellement ses contributeurs, de manière agile et de faire en sorte que les nouveaux savoir-faire qui se construisent (individuels ou collectifs), soient valorisés au sein de la communauté. Et pour que cette dernière soit pérenne, la répartition de la valeur est importante. La captation de la valeur par des tiers (intermédiaires, nouveaux entrants, etc.) est un risque pour l’équilibre de la répartition de la valeur créée, de ce commun.
Je propose donc de réajuster mon propos et que soient précisées les règles de participation au groupe Facebook Frenchtech Montpellier, de manière à assurer aux entreprises de la Frenchtech et à toute personne qui souhaite s’y adresser, qu’elles ne s’exposent pas inconsciemment au risque de mal s’en servir.
Concrètement : nous pourrions modifier le mot d’accueil dans le groupe de la façon suivante.
Ce groupe est consacré à l’entraide au sein de l’écosystème French Tech.
Bienvenue à tous les happy French Tech Members de Montpellier !
Ici nous postons nos réflexions communes, nos créations, nos idées, nos événements qui font rayonner la Métropole numérique, Montpellier et sa région.
Nous nous engageons à contribuer de manière bienveillante à la vie de cet écosystème par la mise en oeuvre de notre état d’esprit :
– favoriser la compréhension de notre écosystème aux personnes qui souhaitent y interagir et y contribuer, par une attitude pédagogique
– faire en sorte que les relations tissées et les savoir-faire acquis au sein de la French Tech Montpellier soient valorisés en son sein et bénéficient à la communauté
– diffuser cette culture et faire un retour sincère aux personnes qui n’auraient pas une attitude de contribution non marchande, en contrepartie de la recherche de valeur pécuniaire
Transparence et confiance
L’innovation ou l’accélération des entreprises par la bienveillance de la communauté fonctionne de façon durable si chacun contribue aux flux non marchands, en retour, et de manière significative. Et pas seulement par la récupération ponctuelle de la valeur co-construite. La nature de ces flux non marchands dépend bien entendu des compétences présentes dans le collectif.
La confiance est le ciment de notre collectif et elle est mise à l’épreuve par la difficulté des jeux d’influence qui traversent la French Tech. J’en fais doncappel à l’auto-régulation par les pairs, vous tous, qui vivez dans cette French Tech en général et dans le groupe French Tech Montpellier en particulier. Ce groupe n’est pas seulement un outils numérique, mais un système vivant, où chacun interagit et se nourrit de façon dynamique.
Et je suis à votre écoute pour faire évoluer les choses.
Merci à ceux qui m’ont inspirée : Duc Ha Duong pour son manifeste pour une plateforme de valeurs https://medium.com/l-avenir-appartient/manifeste-pour-une-plateforme-de-valeurs-8f1dffaeef5f#.xcael5v5e
Et à lilian ricaud pour son texte sur les wikishttp://www.lilianricaud.com/travail-en-reseau/les-wikis-des-ecosystemes-de-communs/
Marie-Laure Vie est la fondatrice de l’agence de conseil Digital et Sens, créée en 2013. Elle est consultante auprès des décideurs pour les aider dans la transition numérique.
Site Internet : marilor.fr
Twitter : @marilor