Prêt-à-porter: d’Auchan à Kiabi, des géants à l’assaut du marché de l’occasion
La banque d’investissement Cowen & Co prévoit que le marché de la revente en ligne augmentera 10 à 15 fois plus rapidement que celui de la fast fashion. Avec de telles estimations, pas étonnant que le secteur connaisse de belles levées, à l’instar de celle réalisée par l’un des poids lourds américain du secteur, ThredUp. Celui-ci a réuni 100 millions de dollars en août 2019 auprès notamment de Goldman Sachs Investment Partners.
Vinted a de son côté réalisé un tour de table de 128 millions d’euros en novembre 2019 mené par un nouvel investisseur, Lightspeed Venture Partners. Des investisseurs historiques avaient également participé comme Sprints Capital, Insight Venture Partners, Accel et Burda Principal Investments. L’entreprise devenait par la même occasion, la première licorne lituanienne. Ce tour de table porte à un peu plus de 260 millions de dollars les fonds levés par l’entreprise depuis sa création. Comme nous le verrons plus loin, le secteur est gourmand en investissement et le Lituanien n’est pas encore rentable.
Mais les perspectives du marché sont belles et les nouveaux acteurs qui sont actuellement en train d’investir le marché ne partent pas de zéro comme l’a fait Vinted à ses début. Parmi les derniers venus, on retrouve des entreprises traditionnelles du prêt-à-porter comme Kiabi, la puissante plateforme d’e-commerce allemande Zalando, mais aussi des enseignes de la grande distribution à l’instar d’Auchan. Comment s’y prennent-ils?
Voici le second et dernier volet consacré au succès de Vinted et au marché de la seconde main (découvrez le premier volet ici).
Kiabi, Cyrillus… quand les grandes marques traditionnelles s’y mettent
Parmi les marques traditionnelles, à partir de 2017 Cyrillus a par exemple lancé «Seconde Histoire» son site dédié à la revente entre particuliers de vêtements de sa marque. L’entreprise de prêt-à-porter s’en sert surtout comme levier de fidélisation, les vendeurs pouvant encaisser le fruit de leur vente en cash ou en e-carte cadeau d’un montant plus élevé à dépenser sur le site.
La même année, Petit Bateau a de son côté créé un espace de vente d’occasions dans son application. Les clients peuvent y revendre et acheter des vêtements de la marque entre eux.
En août 2019, c’était le géant français de l’habillement Kiabi qui annonçait le lancement prochain de son site de seconde main.
Finalement, c’est un mode de développement de l’occasion un peu différent qu’a choisi Kiabi. La marque a inauguré son premier corner dédié à la seconde main en physique dans son magasin de Louvroil dans les Hauts-de-France en août. 50 mètres carrés y sont dédiés. L’espace a la particularité d’être multimarque. Les clients peuvent déposer les vêtements qu’ils souhaitent revendre et recevoir en retour un bon d’achat. Les prix peuvent être jusqu’à 80% inférieurs à ceux du neuf. L’enseigne devrait poursuivre le déploiement dans d’autres magasins. Mais elle n’abandonne pas complètement son ambition de se lancer aussi en ligne. Une partie de son site web devrait être consacré à cette offre.
La deuxième vie de la startup Patatam
D’ailleurs pour lancer son activité de seconde main, Kiabi s’est associé à la startup Patatam. L’entreprise est à l’origine un site d’e-commerce dédié au seconde main fondé en 2013. Basée à Anglet, elle avait levé 3 millions d’euros en 2017. Contacté par Frenchweb, le co-fondateur Eric Gagnaire explique que son activité en ligne est aujourd’hui très marginale.
La startup est désormais principalement fournisseuse de vêtements de seconde main pour des GSS (grande surface spécialisée) comme Kiabi mais également Gémo qui a aussi commencé à installer des corners dans certains de ses magasins exactement sur le même principe.
La grande distribution à l’attaque
Et le marché s’est considérablement ouvert pour Patatam. La startup travaille également avec la grande distribution. Auchan– qui comme Kiabi- fait partie de l’Association familiale Mulliez, s’est également lancé dans le grand bain dès février dernier. L’enseigne qui a commencé avec cinq points de vente prévoit de l’étendre largement au sein de son réseau. De son côté, elle fait le choix de prix uniques par catégorie de vêtements: 3 euros pour un tee-shirt, 8 euros pour un pantalon ou encore 15 euros pour la catégorie manteau/blouson/parka pour les adultes, par exemple.
Exemple d’organisation de l’espace seconde main au sein du Auchan d’Englos (Hauts-de-France).
Parmi les enseignes avec qui elle travaille, la startup Patatam cite également Système U et Carrefour. À chaque fois, il s’agit de proposer des vêtements multimarque et des bons d’achat pour ceux qui déposent des produits. Patatam alimente aussi les rayons en textiles. Les enseignes sont ainsi certaines de ne pas manquer de stock.
Au tour de Zalando de se lancer dans l’occasion en France
La formule de bons d’achat peut paraître moins alléchante que ce que propose Vinted, où les revendeurs reçoivent directement le fruit de leurs ventes, mais ces géants de la grande distribution pourraient venir lui grappiller quelques parts de marché. Sachant que Vinted devra aussi composer avec l’arrivée prochaine de Zalando dans l’occasion au sein de son plus grand marché, la France. Le site a déjà lancé son service de seconde main en Allemagne et en Espagne. La France, la Belgique et les Pays-Bas doivent bientôt suivre.
Si Vinted a bien pris de l’avance, l’entreprise va devoir accélérer pour ne pas se laisser prendre de vitesse. Pas encore rentable, elle ne prévoit donc pas de le devenir tout de suite mais de privilégier son expansion. Si les fonds suivent pour l’instant, la question est de savoir jusqu’à quand?
Se développer coûte cher à Vinted
Il faut dire que l’expansion de la marketplace ne s’est pas faite sans notamment un investissement massif dans des opérations marketing. L’entreprise a communiqué de façon intensive en ligne et via des spots TV pour se faire connaître. En début d’année dernière, le site Offremedia dévoilait que l’agence My Media avait été sélectionnée par Vinted pour mettre en place son dispositif média comprenant plus de 40 chaînes de télévision, un dispositif «puissant» de vidéo online (VOL) et 5 000 faces dans les transports parisiens, avec pour la marque des objectifs de développement de
Contacté, Vinted ne communique pas son chiffre d’affaires. Cependant, selon un article du Monde paru en février dernier, il se serait élevé à 24,3 millions d’euros en 2018, en France, Espagne et Belgique. Outre les petites commissions prélevées aux acheteurs sur les transactions, ses revenus sont issus de la publicité.
Si un mastodonte comme LeBonCoin, entré en Bourse sous le parapluie d’Adevinta en avril 2019, a montré que l’on pouvait mettre en place un modèle rentable autour de la vente entre particuliers, avec un chiffre d’affaires de 357,4 millions d’euros enregistré en 2019 et une marge opérationnelle de 54%, reste à voir si Vinted parviendra a réussir son pari sur la seule verticale des vêtements et accessoires.
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